12 tubes en 12 pistes : le 1er album idéal de Wet Leg

“Tout est encore en gestation, on ne sait pas quand on enregistrera d’autres chansons”, nous avouait en août dernier Rhian Teasdale, chanteuse du groupe d’enfer Wet Leg, avec ce petit air fuyant et ce sourire aux lèvres qui caractérisent celles...

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Wet Leg

Tout est encore en gestation, on ne sait pas quand on enregistrera d’autres chansons”, nous avouait en août dernier Rhian Teasdale, chanteuse du groupe d’enfer Wet Leg, avec ce petit air fuyant et ce sourire aux lèvres qui caractérisent celles et ceux qui nous expliquent des craques. Le duo qu’elle forme avec Hester Chambers, jeune femme en apparence plus réservée que l’on imagine bien à la tête d’un groupe de folk bucolique, n’a alors sorti qu’un single, et quel single !

Chaise longue, un tube construit autour d’une batterie minimaliste, d’une ligne de basse aussi groovy que sexy et d’un riff en forme de cavalcade postpunk : “Quand j’y repense, le succès de cette chanson est assez mystérieux pour moi, dévoile-t-elle aujourd’hui, dans les locaux parisiens du label Domino. Elle a fédéré les gens, alors que le refrain se contente de répéter ‘On the chaise longue/On the chaise longue’ tout au long du morceau.” Et voilà qu’elles rigolent toutes les deux. Depuis combien de temps l’indie pop n’a-t-elle pas dégainé un hit de cet acabit ?

Comment expliquer le succès insensé du groupe ?

À l’époque de notre 1er coup de fil, non seulement Wet Leg n’a rien d’autre à nous faire écouter, mais en plus elles n’ont qu’une poignée de concerts dans les pattes. Et encore, elles n’ont toujours pas mis les pieds hors du Royaume-Uni. Hester se souvient de leur 1er show outre-Manche, à Paris, en novembre 2021, dans le cadre du Pitchfork Music Festival. Devant la salle du Supersonic, pleine à craquer, une foule interdite d’accès pour cause d’explosion de jauge doit se contenter de profiter du show à travers les immenses baies vitrées du rade parisien.

“Henry [Holmes, batteur du groupe] s’amusait à saluer les gens dans la rue à travers les fenêtres en signe de solidarité. C’était incroyable de voir qu’autant de monde était si enthousiaste à l’idée de venir nous voir ce soir-là.” Depuis, elles ont joué aux États-Unis, avec un passage sur le plateau du late show de Seth Meyers ; elles ont même ouvert pour Idles à Londres, en janvier. Une sorte d’accomplissement si l’on considère que c’est lors d’un concert des Bristoliens en 2017 que le projet Wet Leg s’est mis en branle. Rhian : “Voir ces types prendre leur pied comme ça sur scène a vraiment été décisif pour nous.”

Brûler les étapes et s’en sortir avec les honneurs

Comment, dès lors, expliquer le succès insensé du groupe ? On les titille : “Vous nous mentiez quand vous disiez que tout était encore en gestation, n’est-ce pas ?” Regards croisés, sourires complices. “Coupables. Mais ce n’était pas personnel, on était obligées”, répond Rhian. L’excellent 1er album de Wet Leg est en réalité mis en boîte depuis belle lurette – avril 2021, si l’on est bien renseigné. Ou comment brûler les étapes et s’en sortir avec les honneurs.

À l’heure où les groupes enchaînent EP, tremplins et concerts dans des bouges avant d’entrer en studio pour lustrer un 1er format long avec un producteur star trois ans plus tard, Wet Leg fait tout à l’envers et s’offre avec aisance le coup de l’année : “C’était une façon non conventionnelle de faire les choses, poursuit Rhian. Quand on a signé avec Domino, nous n’avions jamais joué nos morceaux sur scène. On s’est dit qu’en attendant la levée des restrictions, le mieux à faire serait d’enregistrer cet album. J’imagine que l’on a fonctionné à rebours de ce qui se fait habituellement, mais avec le recul, je pense que c’est une bonne chose. On était prêtes.”

Des fulgurances textuelles et mélodiques

Sur les bons conseils de leur management, Wet Leg entre en studio avec l’incontournable Dan Carey, un producteur “taiseux”, mais “tellement accro à la musique”, selon les termes du duo. Les filles le connaissent parce qu’elles connaissent Fontaines D.C. et Squid, deux groupes dont elles vénèrent le son. Chez le boss de l’écurie Speedy Wunderground, la recette est simple : pour garder la dynamique rock prometteuse des demos de Hester et Rhian, on fait du live en deux temps : basse-batterie d’abord, guitare-voix ensuite.

Le mixage de l’ingénieur du son Alan Moulder, vétéran de la scène shoegaze, garantit la cohérence d’un disque qui semble vouloir tenter le même genre de hold-up qu’Arctic Monkeys au mitan des années 2000.

Avec ses chansons de rupture revanchardes (Ur Mum), ses fulgurances textuelles (“Baby do you wanna come home with me I got Buffalo ’66 on DVD”) et mélodiques, cette façon maligne de jouer des ad-libs et des sonorités qui semblent vouloir nous faire atteindre le point de félicité (“Sometimes life gets hard to deal/I like you you’ve got sex appeal”), Wet Leg ne prend pas seulement le contre-pied de l’agenda de l’industrie, elles fluidifient le message pop, dynamitent, reviennent à l’essence de l’urgence adolescente à grand renfort de formules simples mais fracassantes, épurées de toute forme de gravité surjouée ou plombée – comme certains groupes trop sérieux pour être honnêtes. Le tout avec un sourire affiché qui semble vouloir dire : “On va te rétamer.”

Wet Leg (Domino/Sony Music). Sortie le 8 avril. Concert le 14 mai à Paris (Point Éphémère).