3e dose pour tous aux USA: OMS et scientifiques s’insurgent
Nature." data-caption="Pourquoi les scientifiques sont vent debout contre la troisième dose? “L'augmentation des niveaux de COVID-19 favorisera l'évolution de nouvelles variantes qui pourraient être encore plus transmissibles que Delta" explique...
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CORONAVIRUS - Un tollé. Ce mercredi 18 août 2021, les autorités de santé des États-Unis ont fait savoir que l’ensemble des Américains vaccinés il y a plus de huit mois pourraient obtenir une troisième dose des vaccins Pfizer et Moderna, à partir du 20 septembre prochain.
Cette annonce a été suivie de vives critiques de la part de la communauté scientifique internationale. Un grand nombre d’experts et d’institutions estiment que distribuer ce rappel vaccinal à l’ensemble des Américains en âge d’être vaccinés n’est, au mieux pas utile, au pire contre-productif pour la lutte mondiale contre le Covid-19.
Première inquiétude, l’utilité de ce rappel. Les Américains ont fait le choix d’ouvrir le rappel à tous les vaccinés, alors qu’il n’existe pas encore de consensus sur sa nécessité: “Il n’y a pas de justification scientifique convaincante de l’importance d’une troisième dose en dehors de cas médicaux très particuliers”, estime Antoine Flahault, épidémiologiste à l’Institut de Santé Globale de l’Université de Genève, interrogé par Le HuffPost.
Manque de données
Si la France et de plus en plus de pays dans le monde mettent en place une campagne de rappel, elle est d’ordinaire réservée aux personnes de plus de 80 ans, aux immunodéprimés et aux personnes ayant des pathologies spécifiques, car ces publics ne seraient pas suffisamment protégés, huit mois après la deuxième dose, selon la plupart des études.
Quelques heures avant l’annonce américaine, Soumya Swaminathan, la scientifique en chef de l’OMS alertait elle aussi sur le bien-fondé d’une telle décision: “Les données actuelles n’indiquent pas que les rappels sont nécessaires. Nous ne savons pas quand les rappels sont nécessaires, quels groupes de personnes et quels vaccins ont besoin de rappels″, a-t-elle expliqué en conférence de presse.
On why first doses for the unvaccinated shld be prioritized over boosters for the fully vaccinated. Also, what the world can do to improve supplies of lifesaving tools @AfricaCDC@Chikwe_I@WHO@GaviSeth@CEPIvaccines@JeremyFarrar@carlbildt@jarottingenhttps://t.co/LOg9wArVU2
— Soumya Swaminathan (@doctorsoumya) August 19, 2021
Au-delà du manque de données, l’objectif poursuivi embarrasse les scientifiques: “C’est une décision court-termiste, très discutable par rapport à l’objectif initial qui est de vacciner le plus rapidement possible, le plus de monde possible, sur la totalité de la planète”, ajoute Antoine Flahault.
“La troisième dose n’est pas la priorité. Certains pays parmi les plus riches en sont déjà à envisager une surprotection alors que le reste de la planète n’est pas protégé. Le virus circule partout dans les pays en développement”, affirme Catherine Hill, épidémiologiste et chercheuse au CNRS, interrogée par LeHuffPost.
Ailleurs, seulement 15% de vaccinés
À l’heure où Joe Biden a annoncé en direct sur la chaîne ABC qu’il allait recevoir une troisième dose, la couverture vaccinale des pays en dehors du G20 ne dépasse pas 15%. Injecter un rappel maintenant reviendrait à “distribuer des gilets de sauvetage supplémentaires à des personnes qui en ont déjà un, pendant que nous laissons d’autres personnes se noyer sans le moindre gilet de sauvetage”, selon Mike Ryan, le directeur des urgences de l’OMS.
Même la revueNature, considérée comme à la pointe de la science, s’est fendue d’un avis publié mercredi: “Au lieu d’offrir des rappels à un grand nombre de personnes, les pays riches doivent s’employer plus activement à faire vacciner le monde entier”, peut-on y lire.
Riposte immédiate de la Maison-Blanche: “Nous pouvons prendre soin des Américains et aider le monde en même temps”. En même temps qu’ils injecteront 100 millions de doses de rappel sur leur territoire, les États-Unis donneront dans le même temps “plus de 200 millions” de doses à d’autres pays, selon Joe Biden.
Risque de variants résistants aux vaccins
Reste que les commandes de rappels vont tenir occupés les fabricants. Ces derniers ne disposent pas de capacités de production illimitées. Et d’autres pays riches pourraient à leur tour distribuer des rappels, suite à la décision américaine. Pas vraiment de quoi donner la priorité à l’élargissement de la couverture vaccinale mondiale.
Le risque? “L’augmentation des niveaux de COVID-19 favorisera l’évolution de nouvelles variantes qui pourraient être encore plus transmissibles que Delta, plus mortelles que les souches existantes ou capables d’échapper à la réponse immunitaire”, conclut Nature. Tant que l’ensemble de la population mondiale n’a pas atteint une très haute couverture vaccinale, il est possible qu’un variant résistant aux vaccins émerge dans un pays peu vacciné et s’impose partout dans le monde. Une troisième dose n’aurait alors plus aucun effet.
À voir également sur Le HuffPost: pourquoi certains variants s’imposent et d’autres non? (expliqué par les jeux vidéo)