5 ans après les attentats de Bruxelles, le covid-19 fragilise la lutte contre la radicalisation

Si en Belgique en ce 22 mars 2021, nous saluons amèrement la mémoire des 32 morts des attentats de Bruxelles et de ses 340 blessés officiels, nous n’en sommes pas guéris pour autant, pas plus que les Parisiens et les Français à chaque commémoration...

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5 ans après, la cérémonie d'hommage aux victimes de l'attentat de Bruxelles, qui avait été revendiqué par Daech, le 22 mars 2021 à Bruxelles. (Photo by YVES HERMAN/POOL/AFP via Getty Images)

Si en Belgique en ce 22 mars 2021, nous saluons amèrement la mémoire des 32 morts des attentats de Bruxelles et de ses 340 blessés officiels, nous n’en sommes pas guéris pour autant, pas plus que les Parisiens et les Français à chaque commémoration des attentats du 13 novembre 2015. Lors de ces différents attentats, des parents ont perdu des enfants, des enfants ont perdu des parents, des parents ont perdu des parents. La France comme la Belgique ont perdu lors de ces deux jours leur innocence. Comment une société peut-elle avancer quand elle perd la confiance de ses enfants et inversement?  

Que faire pour que cela ne resurgisse pas à la prochaine opportunité politique? Lors d’un nouveau Califat, ou d’une montée des tensions polarisantes dans nos sociétés, ou bien encore d’une dégradation globale de la situation économique et sociale dans l’après-Covid? Le sécuritaire n’est pas la clé de voûte unique d’une prévention du terrorisme et des extrémismes violents. Loin de là. Depuis 2006, il y avait en Belgique un PAR, un Plan d’Action contre la Radicalisation, qui dut être réadapté totalement, après les attentats et la commission parlementaire d’enquête post-attentats. En région bruxelloise, dans la région flamande et en Wallonie, les autorités essayèrent de rattraper leur retard avec l’actualité et la réalité au plus vite: cellules communales de prévention de la radicalisation, programmes de désengagement, formation dans les écoles aux dérives radicales de l’islam, suivis psychologiques dans les IPPJ (Institutions Publiques de Protection de la Jeunesse), programmes de désengagement et de réinsertion dans les prisons, soutien aux ONG créées par des familles concernées par le terrorisme, fondation du CAPREV (Centre d’Aide et de Prise en charge de toute personne concernée par la Radicalisation et les Extrémismes Violents) en charge du suivi de certains de ces individus sensibles, renforcement des suivis individualisés au niveau de la police, sensibilisation dans les associations sportives, nettoyage idéologique de certains établissements religieux comme la Mosquée du Cinquantenaire, réflexion globale sur l’islam de Belgique, etc.   

 

Combien de temps tiendrons-nous dans cette sensibilisation à distance, alors que la radicalisation s’est toujours nichée dans la distanciation entre les êtres humains: entre nos jeunes et les institutions, entre les jeunes et leurs familles, entre les jeunes, leurs espoirs et la réalité?

 

Mais entre la question des 500 FTF [1] encore sous surveillance côté belge, du retour ou non des femmes et des enfants, des première sorties de prison de certains recruteurs et individus condamnés pour leur dangerosité, la résurgence de Daech un peu partout dans le monde, le camp d’Al Hol en Syrie au bord de l’implosion, la diffusion de l’idéologie djihadiste qui se poursuit sur le dark web à vitesse grand V, l’arbre djihadiste bourgeonne de toutes parts. Mais comment lutter efficacement actuellement? 

Car depuis début 2020, la pandémie finit d’étouffer l’action de prévention sur le terrain, en “présentiel”, et fait le jeu de tous ces courants qui avancent dans l’ombre de notre ennemi invisible mais bien réel, le virus. On est en effet en train de tuer à petit feu tous les éléments mis en place depuis 5 ans pour prévenir des futures menaces sur le terrain social. Hélas, nombre d’initiatives en faveur de l’éducation, de la culture, de la sensibilisation aux dérives radicales, ont basculé dans le virtuel. Le présentiel était encore le meilleur moyen d’être à l’écoute d’un jeune en crise, de prendre en charge un père, une mère en difficulté. Et ce n’est pas fini. Que dire encore du décrochage de tant de jeunes de l’école, qui aura des conséquences sur les catégories sociales les plus fragiles, du refuge confortable et permanent que représente internet, de l’enfermement mental face à ce mal inconnu et invisible qu’est le virus, de la chute des consultations et suivis psychologiques en milieu hospitalier, de l’arrêt des groupes de paroles divers, qui sont autant d’indices qui doivent nous inquiéter sur l’après Covid-19? À la prochaine opportunité, le djihadisme séduira largement de nouveau.  

Combien de temps tiendrons-nous dans cette sensibilisation à distance, alors que la radicalisation s’est toujours nichée dans la distanciation entre les êtres humains: entre nos jeunes et les institutions, entre les jeunes et leurs familles, entre les jeunes, leurs espoirs et la réalité? En attendant, Daech, comme d’autres groupes extrêmes de tout genre, avancent et se reconstituent au moins dans les esprits et recrutent. La distanciation sociétale post-Covid risque d’avoir de bien plus lourdes conséquences dans les années à venir pour nous que la simple distanciation sanitaire mise en place péniblement depuis un an. 

[1] Foreign Terrorist Fighters: combattants étrangers

  

À voir également sur Le HuffPost: Journée des victimes du terrorisme: l’émouvante lecture par Chloé Bertolus du “Lambeau” de Philippe Lançon