“A La Sala” : le joyeux mélange des genres des Texans de Khruangbin

Il n’y a pas mille façons de s’affranchir des cartes et des territoires : opter pour une déambulation permanente ou refuser d’être défini·e par un lieu, une ville, un quartier. “On a toujours eu l’impression d’avoir une vision universaliste”,...

“A La Sala” : le joyeux mélange des genres des Texans de Khruangbin

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Il n’y a pas mille façons de s’affranchir des cartes et des territoires : opter pour une déambulation permanente ou refuser d’être défini·e par un lieu, une ville, un quartier. “On a toujours eu l’impression d’avoir une vision universaliste”, dévoilent d’une même voix Laura Lee et Donald “DJ” Johnson, convaincu·es d’être “à la maison un peu partout dans le monde”.

Lancé en éclaireur d’un cinquième album refusant de poser un quelconque accent sur la langue d’une pop apatride, A Love International s’entend ainsi comme la parfaite bande-annonce pour cette musique peu soucieuse des frontières (May Ninth), dont les harmonies et les références participent à un astucieux mélange des styles et des époques.

Un retour salutaire à Houston, Texas

“On avait envie de revenir à ce qui constituait l’ADN de notre musique, explique DJ. En 2010, on n’était encore qu’un groupe instrumental et on avait envie de proposer un nouveau single dépourvu de paroles.” Pour concrétiser ce retour aux sources, Khruangbin est donc retourné là où tout a commencé : à Houston, Texas, où DJ vit toujours.

“Tous nos 1ers souvenirs sont liés à cette ville, rembobine Laura, désormais établie à New York. C’est là que nous nous retrouvions tous les mardis pour partager un hamburger au Rudyard’s, que j’ai demandé pour la 1ère fois à DJ de faire partie de mon groupe, que nous avons écrit nos 1ères chansons ensemble.”

Il existe un vrai mystère autour de Khruangbin, orchestré par le groupe lui-même

À entendre les deux complices – le guitariste Mark Speer ayant visiblement d’autres préoccupations –, rien n’aurait vraiment changé ces quatorze dernières années. Après le succès de Mordechai (2020), “indéniablement notre album le plus disco”, il a toutefois fallu se recentrer, ne pas céder aux certitudes d’une industrie qui aimerait tant voir le groupe réitérer, si ce n’est les collaborations (Leon Bridges, Vieux Farka Touré, Paul McCartney), du moins les succès de So We Won’t Forget et Texas Sun. Malin·ignes, les trois comparses préfèrent puiser dans leur “coffre-fort d’idées” afin de façonner une musique contrastée, riche en suggestions et pourtant profondément énigmatique.

Il existe en effet un vrai mystère autour de Khruangbin, un jeu de piste orchestré par le groupe lui-même, joueur et soucieux de ne jamais trop se dévoiler. À l’image de ces titres, nommés de manière à nourrir un imaginaire (Fifteen Fifty-Three, Farolim de Felgueiras, etc.), de ces concerts régulièrement donnés avec une perruque ou diverses tenues censées susciter la curiosité, ou des rares paroles d’A La Sala, un disque tourné vers l’intime et pourtant suffisamment ambigu pour ne pas verser dans la grande confession.

Une bienfaitrice, connectée au va-et-vient des vagues

“Au sein d’une époque où tout se sait, le mystère nous paraît être une réponse créative. Cela passe par ces personnages que nous créons, par ces textes où nous refusons de trop en dire”, détaille DJ. Et Laura d’ajouter : “Il ne faut pas oublier que nous sommes ici pour faire de l’art. Si tout le monde sait ce que j’ai mangé au petit-déjeuner ou quelle est ma routine quotidienne, quels fantasmes pouvons-nous susciter ?”

Rhétorique, la question en dit long sur cette musique qui, aussitôt entendue, s’installe dans notre esprit et y diffuse des pensées apaisantes. C’est même là tout le charme du groupe : il y a toujours un moment, en écoutant les morceaux de Khruangbin, où l’on se croirait en bord de plage, totalement détendu·e, en compagnie d’une musique bienfaitrice, connectée avec le va-et-vient des vagues.

En bout de course, un titre français se distingue : Les Petits Gris

Et puis il y a la voix de Laura Lee, d’une belle douceur, modérément taciturne, quasi céleste, achevant par sa discrétion d’accompagner l’énergie solaire de ces chansons qui encouragent à l’accalmie, forcent la pop music au mélange des genres (dub, blues, psyché), la condamnent au trilinguisme.

En bout de course, un titre français se distingue : Les Petits Gris. Est-ce là le digne successeur de Connaissais de face ? Une déclaration d’amour au pays de Françoise Hardy, que Laura dit “écouter avec passion” ? Une manière subtile d’accueillir des pensées plus sombres ? “Cette chanson, Mark l’a écrite lors de notre 1ère semaine de studio, nuance DJ.

Avec Laura, on a suivi le mouvement, et ça a donné ce morceau qui a finalement dicté le niveau d’intimité que nous voulions créer avec A La Sala.” Il y a en effet tout Khruangbin dans cette plage instrumentale : cette guitare bienfaitrice, cette justesse dans l’émotion et cette capacité à nous faire danser des slows en solitaire.

A La Sala (Dead Oceans/Modulor). Sortie le 5 avril. En concert au Jardin Sonore Festival, Vitrolles, le 10 juillet et à Musilac, Aix-les-Bains, le 11 juillet, à l’Olympia, Paris, les 4 et 5 novembre.