“Abuela” de Paco Plaza : veillir, quelle horreur

“25 ans ? Ah oui, t’es une vieille quoi !”, lâche, taquin, l’un de ses collègues à la mannequin Susana pendant une soirée mode à Paris. Le même soir, la jeune star espagnole reçoit un coup de téléphone : sa grand-mère (interprétée par Vera...

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“25 ans ? Ah oui, t’es une vieille quoi !”, lâche, taquin, l’un de ses collègues à la mannequin Susana pendant une soirée mode à Paris. Le même soir, la jeune star espagnole reçoit un coup de téléphone : sa grand-mère (interprétée par Vera Valdez, icône Chanel des années 1950) vient d’avoir une hémorragie cérébrale. Susana doit rentrer à Madrid, dans le vieil appartement où elle a grandi, afin de veiller sur le corps particulièrement diminué de celle qui l’a élevée.

Filmant ces deux femmes prisonnières de leur corps (du fait de la maladie pour l’une et d’une enveloppe-vitrine attaquée par la violence de sa profession pour l’autre), Abuela initie un conte sur le désir de jeunesse éternelle, motif connu du cinéma d’épouvante. Sans dévier de ce commentaire sur la dictature de la beauté, le film se double d’un regard aussi déchirant qu’effrayant sur la dégénérescence d’un corps et la douleur de ne plus reconnaître un être proche.

Haneke et magie noire

C’est dans cette seconde approche que le film atteint ses plus hauts sommets, à l’image d’une scène, l’une des plus terrifiantes vues depuis quelques années, dans laquelle la grand-mère regarde à la télévision un programme de divertissement et se met soudain à rire à gorge déployée. Son rire ne s’arrête plus. Inquiète, Susana éteint le poste, tandis que le rire se poursuit. Ce qui cause l’hilarité de la vieille dame n’est pas le programme diffusé, mais son reflet sur le petit écran.

Cette expiration sardonique, riant de sa terrible condition, est sûrement le même appel à l’aide que celui hurlé à répétion – “Mal !” – par le personnage d’Emmanuelle Riva dans Amour de Michael Haneke, dont le film épousait l’étude clinique de la déchéance d’un corps. Dès lors, les incarnations maléfiques et de magie noire auront beau s’agiter dans la dernière partie du film, produisant certes quelques fragments visuels saisissants, l’horreur est ailleurs. C’est le reflet projeté de sa condition humaine, le miroir, terrible, de son propre naufrage.

Abuela de Paco Plaza, avec Almudena Amor, Vera Valdez (Esp., 2021, 1 h 40). En salle le 6 avril.