Afghanistan: à l'aéroport de Kaboul, les vols civils et militaires suspendus

AFGHANISTAN - Chaos à Kaboul. L’Afghanistan se trouvait ce lundi 16 août aux mains des talibans après l’effondrement des forces gouvernementales et des milliers de personnes tentaient désespérément, dans un chaos total, de fuir le pays à l’aéroport...

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Les vols civils et militaires suspendus à l'aéroport de Kaboul en plein chaos  (Photo by Wakil Kohsar / AFP)

AFGHANISTAN - Chaos à Kaboul. L’Afghanistan se trouvait ce lundi 16 août aux mains des talibans après l’effondrement des forces gouvernementales et des milliers de personnes tentaient désespérément, dans un chaos total, de fuir le pays à l’aéroport de Kaboul.

La situation à l’aéroport, dont les pistes ont été envahies, a empiré au point que tous les vols, civils et militaires, ont dû être suspendus ce lundi après-midi, a annoncé le Pentagone. On ignore encore quand ils vont reprendre. 

Le fulgurant triomphe des insurgés avait déclenché des scènes de panique monstre. Une marée humaine s’est précipitée vers ce qui est la seule porte de sortie de l’Afghanistan, pour tenter d’échapper au nouveau régime que le mouvement islamiste, de retour au pouvoir après 20 ans de guerre, promet de mettre en place.

Scènes d’anarchie totale sur le tarmac

Des vidéos diffusées sur les réseaux sociaux montraient des scènes de totale anarchie, comme ces centaines de personnes courant près d’un avion de transport militaire américain qui roule pour aller se mettre en position de décollage, pendant que certaines tentent follement de s’accrocher à ses flancs ou à ses roues.

D’autres font apparaître des milliers de personnes attendant sur le tarmac même et des grappes de jeunes hommes, surtout, s’accrochant aux passerelles pour tenter de monter dans un avion.

Après avoir tiré en l’air dimanche, les forces américaines ont ouvert le feu lundi, tuant deux hommes “qui ont brandi leurs armes d’un air menaçant”, a déclaré à Washington un responsable du Pentagone. 

“Nous avons peur de vivre dans cette ville”

Cette foule désespérée n’est pas convaincue par les promesses des talibans selon lesquelles personne n’avait rien à craindre d’eux, a raconté à l’AFP un témoin. “Nous avons peur de vivre dans cette ville et nous tentons de fuir Kaboul”, a dit, de l’aéroport, à l’AFP Ahmad Sekib, 25 ans, un autre témoin utilisant un faux nom. “J’ai lu sur Facebook que le Canada accepte des demandeurs d’asile d’Afghanistan. J’espère que je serai l’un d’eux”, a-t-il expliqué.

Les compagnies internationales ont suspendu le survol de l’Afghanistan, à sa requête, pour laisser l’espace aérien aux militaires chargés des évacuations.

La capitale était en revanche plutôt calme. Les rues n’étaient pas aussi bondées que la veille, des talibans en armes y patrouillaient abondamment et y installaient des postes de contrôle.

Sur les comptes Twitter qui leur sont favorables, les talibans se vantaient d’avoir été chaleureusement accueillis à Kaboul ou encore du fait que des jeunes filles retournaient dès lundi à l’école, comme à l’accoutumée.

“Nous devons montrer que nous pouvons servir notre nation”

Ils ont aussi assuré que des milliers de combattants convergeaient vers la capitale pour en assurer la sécurité.

Le désormais ex-président Ashraf Ghani a reconnu dimanche soir que les talibans avaient “gagné”, après avoir fui son pays.

Dans une vidéo postée sur les réseaux sociaux, le mollah Abdul Ghani Baradar, co-fondateur de ce mouvement islamiste, a appelé ses troupes à la discipline. “À présent, c’est le moment d’évaluer et de prouver, à présent nous devons montrer que nous pouvons servir notre nation et assurer la sécurité et le confort dans la vie”, a-t-il affirmé.

“L’échec de la communauté internationale”

La débâcle est totale pour les forces de sécurité afghanes, financées pendant vingt ans à coups de centaines de milliards de dollars par les États-Unis. En dix jours, le mouvement islamiste radical, qui avait déclenché une offensive en mai à la faveur du début du retrait des troupes étrangères, a pris le contrôle de quasiment tout l’Afghanistan.

Et ce vingt ans après en avoir été chassé par une coalition menée par les États-Unis en raison de son refus de livrer le chef d’Al-Qaïda, Oussama Ben Laden, dans la foulée des attentats du 11 septembre 2001. 

La Chine a été le 1er pays à dire lundi vouloir entretenir des “relations amicales” avec les talibans.

Le ministère russe des Affaires étrangères a estimé que “la situation en Afghanistan et en particulier à Kaboul se stabilisait. Les talibans procèdent au rétablissement de l’ordre public”. 

A contrario, le ministre britannique de la Défense, Ben Wallace, a jugé que ce n’était “pas le moment” de reconnaître le régime taliban. Il a aussi qualifié leur retour au pouvoir d’”échec de la communauté internationale”.

Pour le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, “la communauté internationale doit s’unir pour s’assurer que l’Afghanistan ne soit jamais à nouveau utilisé comme une plateforme ou un refuge pour des organisations terroristes”. 

Le drapeau américain a été retiré tôt lundi de l’ambassade des États-Unis à Kaboul et “mis en sécurité avec le personnel de l’ambassade” regroupé à l’aéroport dans l’attente d’une évacuation, ont annoncé le département d’État et le Pentagone. 

Washington a envoyé 6000 militaires pour sécuriser l’aéroport et faire partir quelque 30.000 Américains et civils afghans ayant coopéré avec les États-Unis qui craignent les représailles des talibans.

Une pilule amère pour les États-Unis

De nombreux autres diplomates et ressortissants étrangers ont également été évacués à la hâte de Kaboul dimanche. Les États-Unis et 65 autres pays ont plaidé pour que les Afghans et les étrangers voulant fuir l’Afghanistan soient “autorisés à le faire”, appelant les talibans à la “responsabilité” en la matière.

Le gouvernement du président américain, Joe Biden, a défendu sa décision de mettre fin à 20 ans de guerre, la plus longue qu’ait connue l’Amérique. “Ceci n’est pas Saïgon”, a assuré dimanche le secrétaire d’État américain, Antony Blinken, sur CNN, évoquant la chute de la capitale vietnamienne, en 1975, un souvenir encore douloureux pour les États-Unis.

Mais la pilule est amère pour Washington dont l’image en ressort profondément écornée et qui déplore 2.500 morts et une facture de plus de 2.000 milliards de dollars. 

La Maison blanche a annoncé que Joe Biden s’adresserait en début de soirée aux Américains.  Selon un responsable de son administration, “les actifs de la Banque centrale que le gouvernement afghan possède aux États-Unis ne seront pas mis à la disposition des talibans”. 

“Le monde et les dirigeants afghans ont laissé tomber la jeunesse afghane”

Beaucoup d’Afghans, principalement dans les villes, craignent que les talibans n’imposent la même version ultra-rigoriste de la loi islamique que lorsqu’ils dirigeaient leur pays, entre 1996 et 2001.

Ils ont maintes fois promis que s’ils revenaient au pouvoir, ils respecteraient les droits humains, en particulier ceux des femmes, en accord avec les “valeurs islamiques”. 

Mais pour Aisha Khurram, 22 ans, qui a représenté la jeunesse afghane auprès de l’ONU et devait être diplômée de l’université de Kaboul dans les mois à venir, la journée de dimanche “a brisé nos âmes et nos esprits”.

“Le monde et les dirigeants afghans ont laissé tomber la jeunesse afghane de la manière la plus cruelle que l’on puisse imaginer”, a-t-elle accusé.

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