Afghanistan: ce qui attend les talibans désormais seuls aux commandes du pays

AFGHANISTAN - Les talibans ont gagné la guerre en Afghanistan, mais ils doivent désormais gouverner. Alors que les derniers Américains ont quitté le pays, le mouvement islamiste se retrouve désormais à la tête d’un des pays les plus pauvres...

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Ce qui attend les talibans désormais seuls aux commandes de l'Afghanistan (Photo d'illustration: des talibans arrivent à l'aéroport de Kaboul après le départ des Américains le 31 août 2021 par AP Photo/Khwaja Tawfiq Sediqi)

AFGHANISTAN - Les talibans ont gagné la guerre en Afghanistan, mais ils doivent désormais gouverner. Alors que les derniers Américains ont quitté le pays, le mouvement islamiste se retrouve désormais à la tête d’un des pays les plus pauvres du monde, isolé diplomatiquement et qui sort exsangue de plus de quatre décennies de guerre.

Voici les cinq principaux défis auxquels le nouveau régime va être confronté:

Une défiance omniprésente

Une suspicion généralisée entoure les talibans dans la population urbaine et éduquée, et pour une bonne raison. Beaucoup d’Afghans ont encore en mémoire la période 1996-2001 lorsque le mouvement islamiste était au pouvoir et avait appliqué une lecture ultra-rigoriste de la charia, la loi islamique. Les femmes n’avaient plus le droit de travailler et les écoles pour filles étaient fermées. Les opposants politiques étaient exécutés et les minorités ethniques persécutées.

Vingt ans après, les talibans assurent qu’ils entendent mener une politique différente, y compris à l’égard des droits des femmes. Ils ont aussi promis d’établir un gouvernement inclusif. Des contacts ont notamment été établis avec l’ex-président Hamid Karzaï. Ils ont aussi envoyé des représentants causer à la minorité majoritairement chiite Hazara, persécutée par les talibans dans les années 1990.

Si le retour des talibans a été accueilli avec soulagement dans certaines parties rurales du pays, où les habitants aspirent avant tout à la fin de la violence, de nombreux Afghans ont prévenu qu’ils ne jugeraient que sur les actes. 

Les femmes dans les villes restent sur le qui-vive, pour une grande partie cloîtrées chez elles, signe de la défiance prégnante. Dans la vallée du Panchir, au nord-est de Kaboul, c’est une vraie résistance qui s’est organisée autour notamment d’Ahmad Massoud, fils du commandant Ahmed Shah Massoud assassiné en 2001 par Al-Qaïda.

Une “catastrophe humanitaire” à venir

L’Afghanistan est l’un des pays les plus pauvres du monde. Après la chute du régime taliban, chassé du pouvoir en 2001, l’aide étrangère avait afflué dans le pays. En 2020, les aides internationales représentaient plus de 40% du PIB.

Mais une grande partie de cette aide est désormais suspendue et les talibans n’ont pas accès aux fonds de la banque centrale afghane, dont la majorité est détenue à l’étranger. Washington a d’ores et déjà fait savoir que les talibans n’auraient pas accès aux avoirs détenus aux États-Unis. 

La situation pourrait donc tourner au désastre à l’heure où les talibans vont devoir trouver rapidement de l’argent pour verser les salaires des fonctionnaires et faire en sorte que les infrastructures vitales (eau, électricité, communications) puissent continuer à fonctionner.

Les revenus actuels des talibans, qui viennent principalement d’activités criminelles, sont estimés par l’ONU à entre 300 millions et plus de 1,5 milliard de dollars par an. Une manne financière qui fait figure de goutte d’eau face aux besoins actuels de l’Afghanistan, selon les experts. 

Dans ce contexte, l’ONU a mis en garde contre une “catastrophe humanitaire” qui toucherait de plein fouet les Afghans dès cet hiver. 

Des talibans arrivent à l'aéroport de Kaboul après les départ des Américains le 31 août 2021.

La menace Daech

La prise de contrôle du pays par les talibans n’a pas mis fin à la menace terroriste, comme l’a montré l’attentat commis le 26 août aux abords de l’aéroport de Kaboul, revendiqué par la branche locale de l’État islamique et qui a fait plus de 180 morts.

Tenant d’une ligne sunnite radicale semblable à celle des talibans, l’État islamique au Khorasan (EI-K) diverge toutefois avec ces derniers en terme de théologie et de stratégie. Signe de la forte inimitié qui les oppose, l’EI a qualifié les talibans d’apostats dans plusieurs communiqués et ne les a pas félicités après leur prise de Kaboul le 15 août.

Le défi s’annonce donc complexe pour les talibans: défendre la population afghane face au même type d’attaques que ses propres combattants ont mené durant des années dans le pays.

Fuite des cerveaux et isolement diplomatique

Au-delà de la crise économique, les talibans devront également composer avec une autre pénurie, tout aussi critique et dramatique, celle des cerveaux.

Juristes, fonctionnaires, techniciens... les Afghans qualifiés ont été nombreux à fuir le pays à bord des vols d’évacuation affrétés par les puissances étrangères ces dernières semaines.

Signe de leur inquiétude, les talibans ont exhorté la semaine dernière les Occidentaux à évacuer les seuls étrangers et non les experts afghans, tels que des ingénieurs, nécessaires au pays.

Autre menace, celle de l’isolement diplomatique. Entre 1996 et 2001, le régime taliban faisait figure de véritable paria sur la scène internationale. Cette fois, le mouvement islamiste semble enclin à chercher une reconnaissance à l’étranger, quand bien même la plupart des pays ont suspendu ou fermé leurs missions diplomatiques à Kaboul.

Le groupe a des contacts avec plusieurs puissances régionales, que ce soit le Pakistan, l’Iran, la Russie, la Chine ou encore le Qatar. Mais aucune d’entre elles n’a pour l’heure reconnu le nouveau pouvoir en place à Kaboul et les États-Unis ont prévenu que les talibans devraient “mériter” leur légitimité. 

À voir également sur Le HuffPost: À l’aéroport de Kaboul, les talibans paradent en vainqueurs