Aide sociale à l'enfance: la protection finalement étendue jusqu'à 21 ans?

ENFANCE - “Une avancée historique”. Alors que 36% des sans-abris de 18-24 ans sont des anciens enfants confiés à l’Aide sociale à l’enfance (ASE), les travailleurs sociaux et certains causementaires alertent régulièrement sur la situation de...

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Un jeune homme porte des sacs après une distribution d'aide alimentaire par l'association caritative française 'Secours Populaire' à Strasbourg, dans l'est de la France, le 12 décembre 2020 (photo d'illustration)

ENFANCE - “Une avancée historique”. Alors que 36% des sans-abris de 18-24 ans sont des anciens enfants confiés à l’Aide sociale à l’enfance (ASE), les travailleurs sociaux et certains causementaires alertent régulièrement sur la situation de ces jeunes, dont l’accompagnement s’arrête à la majorité.

Et pourtant, le projet de loi sur la protection de l’enfance, étudié en 1ère lecture à l’Assemblée nationale à partir de ce mardi 6 juillet, n’en faisait pas mention. Sur les 16 articles que comporte le texte, qui vise à “améliorer le sort des mineurs confiés à l’Aide sociale à l’enfance”, rien ne concernait l’après.

Jusqu’à l’amendement déposé mardi 6 juillet par le gouvernement, et dévoilé par Adrien Taquet à l’Assemblée nationale dans la soirée: selon l’ajout au texte, il s’agirait de rendre obligatoire la prolongation de la protection des enfants placés après 18 ans, jusqu’à 21 ans. 

Une mesure réclamée en commission et qui a surpris - agréablement - les associations. “On crée un droit opposable à la prolongation de la protection des enfants placés après 18 ans, et cela jusqu’à 21 ans”, se réjouit auprès du HuffPost Lyes Louffok, ancien enfant placé, en charge du plaidoyer pour le réseau associatif Repairs, qui regroupe d’anciens enfants placés.

Il n’hésite pas à causer d’une “avancée historique.” “C’est une victoire très importante, c’était inespéré. Je suis ému et bouleversé. Cela fait 10 ans que nous nous battons sans relâche pour cela”, souligne-t-il. 

“Pas de soutien familial, pas de réseau social”

Car la situation de ces jeunes, dont l’accompagnement s’arrêtait souvent à leur sortie de l’ASE, est plus que précaire: très peu de logements sociaux, pas de garants pour louer, pas de place en foyer de jeunes travailleurs sans emploi... Pour le Crous, il faut le statut d’étudiant. Des contrats jeune majeur (CJM), censés depuis 1974 éviter les “sorties sèches” du système de protection de l’enfance, mais qui sont très inégalement accordés sur le territoire.

Une situation loin d’être stable, qui peut basculer très vite. “Souvent, ces jeunes n’ont pas de soutien familial, pas de réseau social, très peu de figures d’attachement et de référence”, rappelle Léo Mathey, co-fondateur du réseau associatif Repairs.

Selon une étude d’avril 2021, publiée par l’Institut national d’études démographiques (Ined), ce départ est souvent vécu comme une expulsion de plus, dans un parcours déjà composé de ruptures. “Seuls 29% des enquêtés déclarent avoir quitté l’ASE de leur propre chef ou d’un commun accord avec les travailleurs sociaux.” Une expulsion du lieu de placement qui “a des retentissements sur tous les domaines de la vie” et rend le risque de se retrouver sans-abri “particulièrement élevé”.

Une “garantie jeune” systématique

En janvier, le secrétaire d’État chargé de l’enfance et des familles Adrien Taquet avait annoncé que les jeunes de l’ASE “qui atteignent 18 ans” se verraient proposer par l’État un parcours vers l’emploi ou une formation ainsi qu’une allocation allant jusqu’à 486€ par mois, durant 18 mois, pour les aider dans leur insertion.

Un dispositif qui fait partie de la “Garantie Jeunes”. Créée sous le quinquennat Hollande et étendue pendant la crise sanitaire, elle assure aux jeunes de 16 à 21 ans qui ne sont “ni en emploi ni en études ni en formation” une allocation mensuelle. En contrepartie, les bénéficiaires s’engagent à suivre un parcours d’insertion intensif et collectif en mission locale. 

Dans l’amendement du gouvernement, il est bien fait mention de la “garantie jeune”, qui deviendrait s’il est voté “systématiquement proposée” aux jeunes majeurs qui en ont besoin à leur sortie de l’ASE. Et qui sera cumulable au Contrat jeune majeur. “Cela va concerner tous les enfants placés, sans exception, y compris les mineurs non accompagnés, car il n’y a pas de condition de temporalité de prise en charge à l’ASE”, se réjouit Lyes Louffok.

“Ça avait été annoncé, on le met dans la loi pour que le message soit fort. C’est une manière pour l’État et les départements de prendre leurs responsabilités sur la question des ‘sorties sèches’, se félicite le cabinet d’Adrien Taquet au HuffPost. Lors de la crise sanitaire, le gouvernement avait par décret interdit les “sorties sèches” des jeunes de l’ASE, préconisant de les garder dans leur dispositif d’accueil jusqu’à la fin de l’épidémie. 

“Un tiers des jeunes en situation de handicap”

À condition que les moyens suffisants soient mis en œuvre pour soutenir la mesure. “Les missions locales sont débordées. Les conseillers ont 60-70 jeunes en suivi, ce n’est pas satisfaisant”, alerte Léo Mathey. Le cabinet d’Adrien Taquet assure que cela va évoluer.

“L’objectif de la “garantie jeune” est passé de 100.000 bénéficiaires à 200.000 en 2021 et fait partie du plan ‘1 jeune, 1 solution’, rappelle-t-il. Le ministère du Travail a débloqué 140 millions d’euros pour les missions locales. Notre objectif, c’est que les conseillers des missions locales soient présents à l’entretien de préparation à 17 ans pour les accompagner.”

Un bémol cependant: la seule réponse par l’insertion professionnelle suffira-t-elle à accompagner ces jeunes dont les besoins dépassent le cadre de l’emploi? Selon un rapport de 2015 publié par le Défenseur des Droits, un tiers des enfants confiés à l’ASE seraient en situation de handicap reconnu, la plupart du temps psychique: “des enfants doublement vulnérables, qui devraient bénéficier d’une double attention et d’une double protection”.

Un autre amendement déposé par la rapporteure du texte vise à “rendre obligatoire un entretien 6 mois après la sortie de l’ASE pour évaluer la situation du jeune et faire le bilan.”

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