Alors que ses films sont diponibles sur Amazon Prime, quel est l'héritage laissé par Maurice Pialat ?
Défaire le film tout en le tournant. Qu’est-ce que ça veut dire ? Pas tout à fait le foutre en l’air, mais partir d’un scénario écrit et empêcher que le film, au tournage, ne devienne un scénario filmé. Du ronron, du train-train, la messe du...
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Défaire le film tout en le tournant. Qu’est-ce que ça veut dire ? Pas tout à fait le foutre en l’air, mais partir d’un scénario écrit et empêcher que le film, au tournage, ne devienne un scénario filmé. Du ronron, du train-train, la messe du cinéma.
Maurice Pialat cherche – y parvient-il réellement ? Au fond, peu importe, c’est le geste, la volonté qui compte – une vérité, une vérité qui échappe aux clichés, et les scénarios ne dessinent que des personnages trop nets, trop figés. Alors il faut brusquer tout cela, y compris ou surtout les acteurs. Faut que ça bouge, que ça tremble, que “la peinture n’ait pas séché”, comme le disait Jacques Dutronc après avoir joué dans Van Gogh – Pialat a d’abord été peintre.
Desplechin a dit un jour qu’un plan ne devait jamais être trop “propre”. Idée qui s’inscrit dans une tradition française, qui naît sans doute chez Jean Renoir et passe d’évidence par Pialat. Il lui fallait recourir pour cela à un art du déséquilibre, ou à l’irruption d’un événement, d’un personnage, d’une réplique dans la scène ou même hors de la scène, entre les prises, dont il invisibilisait volontiers les contours, par exemple en ne disant pas “action !” en début de plan ou “coupez” à la fin. Le flottement entre le jeu et le réel, c’est peut-être ce qui fait la beauté immarcescible de son cinéma, des dix films qu’il a tournés en moins de trente ans, de L’Enfance nue au Garçu. Ce n’est pas purement de l’improvisation, mais plutôt de la provocation au sens de provoquer quelque chose pour que le film sorte de ses gonds, des rails. C’est un peu documentaire et pas tout à fait. On y trouve des acteurs, d’autres interprètes qui ne le sont pas.
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Se rapprocher le plus possible d’une certaine vérité
A nos amours est peut-être son plus beau film, celui compte le plus d’admirateurs - dont Ira Sachs et Damien Chazelle font partie. Pialat y “aide” (mot qu’il préférait à celui de “diriger”) ses acteurs de l’intérieur, puisqu’il joue un rôle important, celui du père de l’héroïne, Suzanne - Sandrine Bonnaire, 15 ans, craquante, avec sa fossette sur la joue gauche et toutes ses “ratiches”… Et c’est assez vertigineux. Parce que l’on voit bien à l’écran que le cinéaste et le personnage se confondent.
Chez les cinéastes français actuels, dont une frange tend pourtant à se détacher de ce “naturalisme” français, on peut placer dans la descendance de Pialat des cinéastes comme Patricia Mazuy et Catherine Corsini. Et puis Abdellatif Kechiche et Maïwenn. Kechiche cherche un déséquilibre, parfois jusqu’à l’abstraction, comme dans Mektoub, my love. Maïwenn aime se placer au milieu de ses acteurs, comme dans Polisse ou ADN, même si elle semble plutôt pousser ses acteurs à s’épanouir dans leur “zone de confort” - ce qui est le contraire absolu du travail de Pialat. Enfin il y a Sophie Letourneur, qui fait improviser ses futurs interprètes (en majorité des non-professionnels) et tire d’eux les dialogues, les gestes, les attitudes, les réactions qu’elle écrit ensuite et leur fait rejouer au moment du tournage. Là aussi, il s’agit de se rapprocher le plus possible d’une certaine vérité. Comme dans la vie, les êtres ne sont pas des clichés figés.
L'Enfance nue, Nous ne vieillirons pas ensemble, La Gueule ouverte, Passe ton bac d'abord, Loulou, A nos amours, Police, Sous le soleil de Satan, Van Gogh, Le Garçu sur Amazon Prime vidéo.
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