Attentats du 11-Septembre: 20 ans après, le procès très loin de se terminer

ÉTATS-UNIS - Alors que les Américains commémorent ce samedi les 20 ans du 11-Septembre, le procès des cinq hommes accusés d’avoir aidé à planifier les attentats de New York en 2001 est toujours en cours, avançant à une lenteur extrême.L’annonce...

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Les restes du World Trade Center après l'attaque terroriste qui a frappé New York le 11 septembre 2001.

ÉTATS-UNIS - Alors que les Américains commémorent ce samedi les 20 ans du 11-Septembre, le procès des cinq hommes accusés d’avoir aidé à planifier les attentats de New York en 2001 est toujours en cours, avançant à une lenteur extrême.

L’annonce des accusations initiales de terrorisme et du meurtre de 2976 personnes s’était pourtant tenue en février 2008. Mais l’affaire a ensuite été retirée, puis réintroduite, et il a finalement fallu attendre le 5 mai 2012 pour que se tienne la 1ère audience. Depuis, des dizaines d’autres ont eu lieu, toutes préliminaires.

Après une nouvelle interruption de 18 mois due au Covid-19, la procédure a enfin redémarré ce mardi 7 septembre à Guantanamo, la base navale américaine dans le sud-est de Cuba. Une reprise qui n’est en rien synonyme d’une conclusion proche.

Emprisonnés depuis 15 ans 

Le procès, qui relève d’une justice militaire d’exception, se tient sous haute sécurité dans un tribunal qui siège dans la tristement célèbre prison américaine. La salle est entourée de grillages avec barbelés. 

Y sont jugés: Khalid Sheikh Mohammed, le cerveau présumé du 11-Septembre; Walid ben Attash, accusé d’avoir aidé “KSM” à planifier les attentats; Ramzi bin Al-Shibh, accusé d’être membre de la “cellule de Hambourg” réunissant les pirates de l’air; Ammar al Baluchi, neveu de “KSM” qui aurait géré les transferts d’argent pour perpétrer les attentats; et Mustafa al-Hawsawi, qui aurait travaillé avec Ammar al Baluchi. Tous sont emprisonnés depuis 15 ans. 

Dessin du 8 décembre 2008 pendant l'une des 1ères auditions préliminaires de Khalid Sheikh Mohammed à Guantanamo.

Les cinq hommes, accusés de “meurtre” et d’“actes terroristes”, risquent la peine de mort. Ils font face lors de ces auditions aux familles des quelque 3000 victimes et des journalistes, dont ils sont séparés par une épaisse paroi de verre qui retransmet les échanges avec un retard de 40 secondes au cas où des éléments classés secrets soient prononcés.

Le poids des documents “top secret”

Pourquoi, 20 ans après le drame, la procédure en est-elle encore à ce stade? Une longue accumulation de difficultés. Tout d’abord se rendre à Guantanamo est extrêmement complexe, chaque audition est donc un casse-tête. Comme le détaille le New York Times, les allers-retours avec Washington sont souvent annulés ou retardés par la météo, des problèmes de santé, les services de communications en panne ou encore les problèmes de moisissures qui envahissent les locaux.

Les avocats comme les juges changent ensuite régulièrement, ce qui ralentit considérablement les choses. La reprise des procédures le 7 septembre était par exemple présidée par un nouveau magistrat militaire, le colonel Matthew McCall, le huitième officier à diriger ces audiences. Et cette session a été ajournée au bout de 2h30 sur des questions procédurales concernant sa nomination.

Le système de commissions militaires ayant été créé de toutes pièces sous la présidence de Barack Obama pour gérer ce procès, il ouvre en effet la porte a de nombreux points de contestation lors des échanges. Difficile donc d’avancer sur le fond quand la forme coince.

Autre problème majeur et principal frein, tout ce que l’administration américaine cherche à garder secret. La chaîne NBC rappelle que les avocats des accusés ont mis des années avant d’obtenir des documents de preuves, classés top secret, contre leurs clients. Et ils assurent que tout ne leur a pas encore été fourni. Ces derniers ont donc déposé de nombreux recours pour obtenir des documents confidentiels supplémentaires, comme des comptes rendus sur les conditions de détention ou la santé des accusés.

Destruction de preuves

Le programme d’interrogatoires de la CIA est d’ailleurs au cœur des démarches de la défense: les avocats invoquent des actes de tortures, lorsque les accusés étaient aux mains de l’agence de renseignement entre 2002 et 2006, pour faire invalider la plupart des preuves avancées par les autorités américaines. Ils comptent bientôt appeler des dizaines de témoins supplémentaires, en plus des 12 déjà entendus, notamment deux hommes ayant supervisé ces interrogatoires.

Photo de menottes aux pieds dans une salle d'interrogatoire de Guantanamo en 2006, avant que l'utilisation de techniques de torture soit considérablement limitée sous la présidence de Barack Obama en 2009.

 

La reprise du procès intervient justement alors qu’une cour d’appel militaire a confirmé la décision du juge précédent d’approuver la destruction d’un site d’interrogatoire, considéré par la défense comme un élément de preuve essentiel.

“L’une des questions les plus importantes dans cette affaire est la façon dont la torture subie par ces hommes va influencer le procès”, a expliqué l’avocat de Khalid Sheikh Mohammed, James Connell. “La destruction volontaire de preuves prive la défense et le peuple américain d’informations sur ce qui s’est vraiment passé”.

Tout ça pour rien?

Tous ces éléments ne cessent de ralentir les auditions préliminaires et il pourrait s’écouler encore des mois, voire des années, avant que le procès n’entre dans sa phase vraiment décisive. James Connell, qui défend Ammar al-Baluchi, a même assuré qu’il ne “savait pas” si ce procès irait un jour jusqu’à son terme.

“La possibilité qu’il n’y ait pas du tout de procès existe”, a aussi expliqué sur NBC Madeline Morris, professeure de droit à la tête de la Guantanamo Defense Clinic qui aide les avocats de la défense à naviguer les méandres des commissions militaires. “Ce n’est pas établi que tout cela se terminera par un procès”. 

Le nouveau juge militaire qui s’occupe désormais du dossier a affirmé mercredi qu’il ne précipiterait pas la fin de la procédure mais qu’il voulait que la situation avance après neuf ans d’audiences. “Je ne ressens pas de pression pour aller au procès”, a-t-il garanti, mais “j’aimerais voir du mouvement”. Les familles des 2976 victimes aussi.  

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