Au-delà du Covid, ces dix ans qui vont bouleverser la filière automobile

Depuis quelques mois, les constructeurs automobiles nous incitent à acquérir un véhicule au moins hybride, au mieux 100% électrique. À chaque coin de rue, les publicités fleurissent pour valoriser ces nouvelles motorisations plus vertueuses...

Au-delà du Covid, ces dix ans qui vont bouleverser la filière automobile

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Le président Emmanuel Macron étudie un moteur lors d'une visite du site de la future usine du fabricant de batteries japonais Envision AESC, où Renault SA développe un centre de fabrication de véhicules électriques, à Douai, dans le nord de la France, le 28 juin 2021. Il devrait être annoncé lors de l'événement

Depuis quelques mois, les constructeurs automobiles nous incitent à acquérir un véhicule au moins hybride, au mieux 100% électrique. À chaque coin de rue, les publicités fleurissent pour valoriser ces nouvelles motorisations plus vertueuses pour le climat. Les constructeurs n’ont guère le choix: entre les exigences européennes en faveur de la lutte contre le changement climatique, qui les contraignent à réduire significativement leurs émissions de CO2 et l’entrée fracassante de nouveaux entrants comme la Model 3 de Tesla, nettement plus accessible que les modèles luxueux du trublion entrepreneur, les constructeurs historiques ne peuvent qu’accélérer drastiquement leur transition. 

 

Du côté de la demande, sur les 5 1ers mois de l’année, les immatriculations françaises totales restent en retrait de 20% par rapport à 2019.

 

Ainsi chacun se positionne avec des annonces conséquentes sur leurs orientations technologiques: VW vient d’annoncer la fin des ventes de véhicules thermiques du Groupe entre 2033 et 2035, PSA projette des ventes à 90% électrifiés d’ici 2030, et Stellantis vise 70% d’électrification sur l’ensemble de ses immatriculations au niveau mondial. Les offres se multiplient et les ventes décollent, stimulées par les aides à l’achat. Au 1er trimestre 2021, selon l’ACEA, les immatriculations européennes des véhicules 100% électriques ont augmenté de 60% par rapport au 1er trimestre 2020, celles des véhicules rechargeables de 175%, et celles des véhicules hybrides non rechargeables de 102%. La France n’est pas en reste, stimulée par les aides à l’achat: les ventes de véhicules électrifiés représentent 31% des immatriculations sur les 5 1ers mois de l’année 2021.

Pourtant ces chiffres très positifs ne doivent pas masquer une réalité particulièrement contraignante pour la filière. Car les constructeurs et les équipementiers subissent de plein fouet la situation épidémique qui se traduit par une double crise, de l’offre et de la demande. Du côté de la demande, sur les 5 1ers mois de l’année, les immatriculations françaises totales restent en retrait de 20% par rapport à 2019: les acquéreurs ne se précipitent pas dans les concessions, inquiets de la situation économique et perplexes devant des motorisations encore émergentes. Du côté de l’offre, les ralentissements voire les arrêts de production observés pendant les confinements successifs viennent hanter à nouveau les constructeurs comme les équipementiers. En faute: des approvisionnements sous tension sur la plupart des matières 1ères, comme le plastique ou l’acier, et surtout sur les puces électroniques, et qui perturbent lourdement la complexe chaîne logistique de la filière. Dans un tel contexte, il parait concevable que les immatriculations ne retrouvent pas leur niveau de 2019 avant fin 2022. 

Au-delà de la crise Covid, la décennie qui s’annonce va profondément bouleverser les acteurs de la filière automobile. En toile de fond, le Parlement Européen, qui va annoncer mi-juillet les 13 directives de déploiement du Green Deal, qui porteront probablement sur la fin du véhicule 100% essence ou diesel. On sait déjà que les émissions de l’ensemble du parc roulant en Europe devront être réduites de 55% d’ici 2030, ce qui implique un minimum de 20% du parc en véhicules légers 100% électriques. Pour respecter cette cible, selon les chiffres du Bipe, les ventes de véhicules zéro-émissions doivent très fortement progresser jusqu’à atteindre 61% des ventes européennes en 2030, quand ils représentent à peine 6% au 1er trimestre 2021. L’Europe planche aussi sur un ajustement des normes Euro 7, afin d’aligner la vision long terme du Green deal avec les seuils d’émissions de véhicules neufs à moyen terme. 

 

On sait déjà que les émissions de l’ensemble du parc roulant en Europe devront être réduites de 55% d’ici 2030.

 

Les États se mobilisent aussi sur la question de la pollution de l’air, et certains pays fixent déjà un objectif sévère en vue d’interdire la vente de véhicule thermique, notamment dans le Nord. La Norvège envisage l’arrêt du thermique dès 2025. En Angleterre, seuls les véhicules 100% électriques et à hydrogène seront autorisés à la vente en 2035. La France paraît aujourd’hui presque en retrait avec une Loi Lom qui projette la fin du thermique à 2040. Cependant, des discussions houleuses sont en cours au gouvernement qui pourrait annoncer son anticipation avant l’été. 

Avec tout ceci, on en oublierait presque l’automobiliste. Car toutes ces négociations sollicitent des acteurs de tous horizons, de la filière automobile comme des syndicats ou des politiques. Reste que le véhicule électrique, malgré toutes les innovations et les effets d’échelle dont il va bénéficier, présentera un défi certain pour l’utilisateur. Le moteur thermique autorise une souplesse sans précédent dans les usages, alignant les kilomètres sur les longues distances, impassible face aux embouteillages des villes. Comment concilier les usages des conducteurs avec les contraintes des nouvelles motorisations? Certes le véhicule à hydrogène émergera un jour, mais pas avant la prochaine décennie. D’ici là, il s’agira pour chacun de faire le tri entre les différentes offres et technologies au regard de ses besoins quotidiens. Peut-être au détriment des voyages moyennes ou longues distances en voiture, pour lesquels d’autres modalités de transport seront à envisager.

 

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