Au Festival de Cannes, l'aberrant ballet de voitures pour arriver sur le tapis rouge

CINÉMA - C’est une “tradition” qui a encore la vie dure au Festival de Cannes. Sur la Croisette, à l’heure de l’incontournable montée des marches, on assiste à un impressionnant ballet de véhicules.Des dizaines de berlines noires aux vitres...

Au Festival de Cannes, l'aberrant ballet de voitures pour arriver sur le tapis rouge

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CINÉMA - C’est une “tradition” qui a encore la vie dure au Festival de Cannes. Sur la Croisette, à l’heure de l’incontournable montée des marches, on assiste à un impressionnant ballet de véhicules.

Des dizaines de berlines noires aux vitres teintées, déposent les stars au pied du tapis rouge. Un trajet de quelques secondes seulement puisque la plupart des vedettes cannoises sont logées dans les grands palaces (Martinez, Majestic et Carlton), tous situés à proximité immédiate du Palais des festivals.

“C’est absurde: on est à 300 mètres!”

Une aberration écologique contre laquelle tente de lutter à son échelle Cyril Dion, activiste pour le climat et réalisateur. ”Cette année, toute notre énergie est passée à dire :‘On peut y aller à pied!’”, martèle celui qui est venu présenter son documentaire “Animal”, en compétition dans la catégorie éphémère “le Cinéma pour le climat”. “Tout le monde nous dit que c’est plus difficile d’y aller à pied que d’y aller en voiture. Il y a un côté un peu absurde: on est à 300 mètres, mon hôtel est à 7 minutes à pied du Palais, donc il n’y a aucune raison”, ajoute celui qui s’était déjà rendu à pied lors de sa précédente montée des marches en 2019.

Les organisateurs sont bien conscients que ce ballet de véhicules est problématique pour l’image de l’événement, au même moment où le Canada est étouffé par un “dôme de chaleur”. D’autant que cette année, Cannes a décidé de se mettre au vert avec une batterie de mesures pour limiter l’empreinte écologique du festival. Parmi lesquelles, l’instauration d’une taxe carbone payée par l’ensemble des festivaliers.

Dans ce contexte, la grand-messe du cinéma a très officiellement demandé à ses stars de faire un effort cette année. Dans un communiqué dévoilé avant la tenue de l’événement, il a été demandé de privilégier les “trajets pédestres” aux équipes des films.

“À l’image des accrédités qui se déplacent massivement à pied grâce à la proximité des multiples espaces du Festival, les équipes artistiques venues présenter leurs films seront également incitées à privilégier dans la mesure du possible les trajets pédestres.”

Brad Pitt en Renault ZOE?

Le sujet pose plusieurs questions. Déjà d’un point de vue pratique: comment faire remonter la Croisette à des stars perchées sur des talons aiguilles et vêtues de robes -certes très glamour- mais pas toujours très pratiques pour se déplacer? Quid également des questions de sécurité qui semblent pour l’heure empêcher les stars d’abandonner leur carrosse? 

“Il y a beaucoup d’artistes qui sont sensibilisés sur ces sujets et sont prêts à changer de méthode et à marcher, mais il y a des contraintes de logistique ou de sécurité”, explique François Desrousseaux, secrétaire général du Festival. “On peut en discuter et trouver des solutions dans les années à venir”, promet-il, précisant au passage que le Festival a renouvelé son parc automobile cette année et compte désormais “60% de véhicules hybrides ou électriques”. Un moindre mal. 

Mais verra-t-on un jour Brad Pitt ou Jessica Chastain en Renault ZOE? Et Matt Damon remonter la Croisette à pied, saluant toute la foule sur son passage? L’image serait belle, et Cyril Dion est persuadé que cela arrivera rapidement. “La société change et avec les réseaux sociaux il y a des réactions de plus en plus virulentes quand on voit des choses qui paraissent absurdes ou obscènes et cela pousse un tas de personnes exposées à faire attention. Elles se disent que l’image qu’elles donnent sur quelques minutes a un impact symbolique.”

Le cinéma engagé contre le réchauffement climatique

Au-delà de ce sujet avant tout très symbolique, Cyril Dion est convaincu que le monde du cinéma a un rôle à jouer pour sensibiliser le public aux enjeux du réchauffement climatique. Le 11 juillet, il a co-signé la tribune “Le cinéma pour le climat” dans les colonnes du Monde avec le collectif “On est prêt”. Un texte qui appelle les réalisateurs à inventer de nouvelles histoires en prenant davantage en compte la crise environnementale.

“Nous avons besoin d’histoires qui mettent en scène d’autres façons de se déplacer, d’habiter, d’autres relations avec les animaux, les arbres et les océans. Des histoires qui expliquent de quelle façon nous pourrions sortir de ce pétrin. D’autres qui imaginent comment nous pourrions vivre demain, en sortant des éternelles dystopies apocalyptiques ou des fantasmes ultra-technologiques. Car comment construire un autre monde si nous ne pouvons pas d’abord l’imaginer?”, peut-on lire dans cette tribune signée par Aïssa Maïga, Flore Vasseur, Marie Amiguet et Marion Cotillard.

Celui qui a réalisé avec Mélanie Laurent le documentaire “Demain” en 2015 souligne l’importance de revenir à des productions plus “légères”, avec moins de personnel et de camions mobilisés pour limiter le bilan carbone.

“Je pense que nous pourrions arriver à une forme de sobriété sur un certain nombre de films en allégeant la logistique considérable mobilisée sur les tournages. Je me souviens avoir eu cette conversation avec Jean-Luc Godard il y a deux ans et demi qui me demandait le budget de mes films. Je lui avais dit: ‘Pour des documentaires c’est assez important, pour ‘Demain’ c’était 1,8 million d’euros, pour ‘Animal’ c’est 2,4 millions d’euros. Il me disait :‘Mais pourquoi tu as besoin de tout cet argent? Avec 300.000 euros tu fais un film.’ C’est très ‘Nouvelle vague’, mais il y a peut-être quelque chose à aller chercher de ça.”  

À voir également sur Le HuffPost: On a vécu une montée des marches au milieu des photographes à Cannes (et c’était du sport)