“Augure” : une fable féministe qui superpose réel et surnaturel avec superbe

Au milieu d’un désert surgit un cavalier. Il est vêtu de noir, porte un épais couvre‑chef. Quand il arrive devant des dizaines d’épouvantails plantés au soleil, il ralentit sa course, descend de cheval et marche vers ce qui ressemble à une...

“Augure” : une fable féministe qui superpose réel et surnaturel avec superbe

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Au milieu d’un désert surgit un cavalier. Il est vêtu de noir, porte un épais couvre‑chef. Quand il arrive devant des dizaines d’épouvantails plantés au soleil, il ralentit sa course, descend de cheval et marche vers ce qui ressemble à une oasis. Il ouvre alors le haut de son habit et dévoile un sein, qui épanche un lait rosé de sang dans la petite étendue d’eau.

C’est ainsi que commence Augure, fascinant 1er film du musicien belgo-congolais Baloji, pour lequel il s’est vu remettre le prix de la Nouvelle voix au dernier Festival de Cannes. Une ouverture qui convoque à la fois le western, l’esthétique médiévale fantasy et le postapocalyptique désespéré à la Mad Max, des univers traditionnellement masculins donc, mais que cette issue déplace sur le terrain de la féminité et a fortiori de la maternité.

Faire surgir l’étrange de presque nulle part

Ce délitement du récit fabuleux et le glissement de sa matière vers le féminin sont ce qui passionne en 1er lieu dans Augure, œuvre foisonnante, insaisissable, sur le mystique comme mode de vie et de contrôle – du corps des femmes notamment.

S’y déploie un Congo fantasmagorique, écrasé sous le poids des traditions occultes et du patriarcat qui les entretient, où doivent évoluer plusieurs personnages considérés par les leurs comme zabolos, des “attaches” du diable.

Un vertige esthétique aux motifs oniriques

Réel et surnaturel ne faisant qu’un aux yeux des protagonistes, Baloji les superpose dans sa mise en scène et entretient ainsi un vertige sublimé par la direction artistique (les décors et les costumes mêlent magnifiquement les iconographies de l’Afrique subsaharienne ancienne et contemporaine).

Le film ne sidère d’ailleurs jamais autant que lorsqu’il fait surgir l’étrange de presque nulle part, un geste, un motif onirique soudain ; une seconde d’irrationnel qui ne devrait pas être là, mais qui, à aucun moment, ne nous semble absurde.

Augure de Baloji, avec Marc Zinga, Lucie Debay (Bel., P.-B., RDC, All., Afr. du S., 2023, 1 h 30). En salle le 15 novembre.