Avec le retour au présentiel, les salariés espèrent retrouver du sens à leur travail - BLOG
TÉLÉTRAVAIL - À la veille de la fin du télétravail, comment aborder sereinement le retour au bureau? Comment retrouver ses marques après une si longue absence? Et en réalité, faut-il véritablement retrouver ses anciens repères?Un chamboulement...
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TÉLÉTRAVAIL - À la veille de la fin du télétravail, comment aborder sereinement le retour au bureau? Comment retrouver ses marques après une si longue absence?
Et en réalité, faut-il véritablement retrouver ses anciens repères?
Un chamboulement de l’organisation du travail
Rarement une organisation du travail aura autant fait débat que le télétravail, avec ses farouches opposants et ses partisans convaincus.
Jusqu’alors réservé à une minorité de travailleurs, le dispositif s’est imposé aux employeurs pour se déployer sur tout le territoire.
Avec un succès mitigé.
Témoin depuis des années des inégalités au travail, j’espérais que le télétravail viendrait réduire la discrimination que subissent les femmes, et en particulier les mères, pénalisées par la dictature du présentéisme.
La déception a été à la hauteur des attentes.
D’abord sur les conditions de mise en œuvre du télétravail.
De nombreux travailleurs ont dénoncé avoir subi des incivilités numériques, d’une gravité variable.
Ça peut aller du manque d’attention pendant les réunions, constaté par 7 personnes en télétravail sur 10 au sentiment d’être espionné par les outils numériques pour 6 télétravailleurs sur 10.
Enfin, plus de la moitié de ces télétravailleurs constatent une augmentation des courriels envoyés avec copie à la hiérarchie pour mettre la pression. Et un tiers de ceux interrogés remarquent recevoir plus de courriels rédigés en lettres majuscules, en gras ou avec des points d’exclamation.
À ces vexations professionnelles s’est ajoutée la pression familiale avec l’école à la maison et l’entretien du foyer, fréquenté et utilisé plus qu’à l’accoutumée.
Avec la confusion des temps de vie, personnels et professionnels, en un lieu unique, le travail a constitué un continuum de contraintes et de charges.
En effet, le partenaire sur lequel reposait habituellement la charge mentale du foyer, généralement la femme, a vu son temps de travail exploser.
Ainsi, on est passé d’une double journée à une triple journée.
Pendant la crise, dans un couple moyen actif, la femme travaillait 21 heures par semaine de plus que l’homme pour s’occuper des enfants et des tâches ménagères.
21 heures!
C’est la moitié d’un temps plein!
Rien d’étonnant alors à ce que certains sombrent.
Le télétravail facteur de nouveaux risques psychosociaux
Le télétravail est un facteur de nouveaux risques psychosociaux: isolement, surcharge, sentiment d’être surveillé en permanence.
Comme cela était à craindre, 41% des télétravailleurs déclarent se sentir isolés.
Près d’un salarié sur deux déclare être en état de détresse psychologique. Un phénomène qui touche également la hiérarchie puisque 58% des managers affirment être en détresse et 25% en état de détresse élevée.
Un tiers des salariés se trouve même en état d’épuisement émotionnel sévère et 5% en burn-out, une maladie qui touche d’ailleurs deux fois plus les managers.
La montée des risques psychosociaux est devenue le deuxième motif d’arrêts maladie en mai, après le Covid.
La situation est telle que le gouvernement a dû mettre en place une plateforme d’écoute téléphonique baptisée ”écoute, soutien et conseil aux télétravailleurs”
Pour autant difficile de quitter son emploi dans un contexte de crise mondiale.
En effet, la moitié des salariés interrogés affirment rester dans leur entreprise faute de trouver mieux, le taux s’élève à 60% pour ceux en télétravail complet.
Dans ces conditions, il n’est pas surprenant que le rapport au travail et l’engagement des salariés apparaisse en nette baisse.
Surtout quand les télétravailleurs réalisent que leur travail leur semble inutile, comme l’affirment 35% des sondés.
Or, la perte de sens est justement l’un des facteurs majeurs conduisant au burn-out.
La boucle est bouclée!
Le télétravail a été le refuge de certains télétravailleurs
Pourtant, en parallèle, de nombreux autres télétravailleurs ont savouré leur période de confinement qu’ils ont vécue comme un cocon et dont ils craignent aujourd’hui de se séparer avec le retour au bureau.
Pour ceux-là, confinement a rimé avec calme, grâce à l’absence de transport et à la protection d’un environnement sain, sans risque de contagion.
Ils ont pu organiser leur temps de travail et se découvrir de nouveaux plaisirs ou pratiquer des loisirs qu’ils n’avaient plus le temps de faire, tels que la cuisine, la lecture ou le jardinage.
Et surtout, ils ont pu se départir de leur masque social et de la comédie humaine qui se joue quand ils sont au bureau, lieu de représentation permanente.
Le couvre-feu et le confinement ont ramené tous les membres de la famille au foyer et donc de facto à partager plus de moments ensemble. Si quelques tensions ont pu naître d’une fréquentation forcée, globalement la période a conduit à davantage d’échanges familiaux.
Finalement, un point commun émerge chez tous…
Détracteurs ou partisans sont unis par une même démarche: la quête de sens.
Une prise de conscience?
Et si le confinement avait agi comme une prise de conscience?
Collective et individuelle.
La période de repli sur soi, d’isolement a marqué une introspection forcée.
Les individus, comme les organisations, publiques et privées, ont dû s’adapter sans cesse.
Ces changements renouvelés modifient le système de référence des personnes.
Or, cette altération entraîne à son tour une remise en question assez existentielle, créant des facteurs d’instabilité psychologiques très profonds.
Tout ce contexte se révèle extrêmement anxiogène, à plus forte raison avec l’incertitude qui a régné pendant des mois.
Là où le gouvernement a adopté un langage martial et sacrificiel avec le fameux “quoi qu’il en coûte”, les Français ont oscillé entre résignation/fatalisme et résilience.
Aujourd’hui, entre l’arrivée des vaccins pour tous et des beaux jours, les portes s’ouvrent: celles des commerces non essentiels et aussi des bureaux.
Pouvons-nous pour autant fermer la porte derrière nous et oublier les mois passés?
Il serait dommage de se priver des nombreux apprentissages tirés de cette période.
Un éveil vers une quête de sens?
La crise que nous traversons -encore aujourd’hui- est polymorphe: sanitaire, économique, politique.
Elle révèle un besoin renouvelé de sens.
D’une certaine façon, elle a représenté un éveil et une empreinte.
Un éveil, car les individus et les organisations, après des décennies de course à la croissance, sont davantage en quête de sens.
Et une empreinte, car justement cette période, et les traumatismes (micro ou majeurs) vécus, ont durablement marqué les personnes, les conduisant à modifier leur échelle de valeurs.
On peut raisonnablement prédire que les salariés vont demander à réorganiser leurs vies, dans le sens d’un équilibre plus marqué entre vie professionnelle et vie privée. Ils attendront aussi de leur entreprise davantage de bienveillance.
Une étude menée récemment par le Boston Consulting Group a révélé que les salariés exigent de leur entreprise et de leur management des qualités humaines, bien plus que stratégiques et économiques.
Aujourd’hui, la stratégie et la vision ne suffisent plus à faire adhérer et à créer de la valeur. Ce sont les qualités de cœur qui se révèlent essentielles, telles que la considération (37%), l’empathie (33%), l’écoute (31%), l’attention portée au développement des équipes (29%) et la capacité à se remettre en question.
À l’inverse, les qualités stratégiques telles que la capacité à donner du sens (17%), à établir des priorités (14%) et la prise en compte des besoins des clients (14%) arrivent à la fin du classement.
Pour 36% des sondés, renforcer la cohésion des équipes serait l’enjeu majeur des dirigeants pour les années à venir, loin devant des sujets de long terme comme l’innovation ou le numérique.
Autre empreinte laissée par la crise: l’exigence imposée aux dirigeants de faire preuve d’adaptabilité et de capacité à gérer l’incertitude ainsi que de capacité à faire preuve d’une communication active et transparente sur les décisions prises et la situation financière de l’organisation.
Comment réussir sa sortie du cocon?
À la veille du retour au bureau, et dans ce contexte d’inquiétude et de remise en question, quelles sont les clefs pour réussir ce nouveau changement?
Il s’agit de créer les conditions nécessaires pour rassurer les travailleurs qui vont reprendre leur poste en présentiel:
- Rassurer la crainte de la contagion: les entreprises doivent créer une organisation du travail propice à la sécurité des travailleurs. Et ces derniers doivent recréer leur propre sécurité, notamment en accordant de l’importance aux gestes barrière, sans en faire non plus une obsession;
- Vive la routine: le métro-boulot-dodo peut aussi avoir un aspect positif en ce qu’il offre de retrouver un rythme et ainsi de séparer les différents temps de vie. Le retour au bureau permet aussi de réinvestir son domicile comme un lieu de vie sanctuarisé et non comme un lieu de temps mêlé;
- Retour à une vie sociale: après des mois d’isolement, enfin le come-back de la machine à café! Mais si l’ambiance de travail et les rapports entre collègues n’étaient pas bons, le retour dans l’entreprise peut s’avérer être une source de stress social. Si tel est votre cas, souvenez-vous que si vous avez su faire preuve de résilience pendant les mois passés, vous allez aussi savoir vous adapter et prendre les décisions nécessaires à votre bien-être. Surtout, pensez à remémorer les moments de résilience déjà traversés et à relativiser les enjeux;
- Redonner un nouvel élan aux travailleurs: les dirigeants doivent montrer de l’attention aux équipes et créer un climat propice au rebond. Ils doivent ensuite réfléchir à la raison d’être de leur entreprise, car la crise engendre de nombreux questionnements sur le sens du travail de chacun;
- Retrouver un management: avec le distanciel, on mettait un filtre sur notre hiérarchie, qui va donc disparaître dans les jours à venir. Là encore, il va falloir prévoir un temps d’adaptation pour se réhabituer au management direct. Et les managers ont intérêt à instaurer une culture de la responsabilité et de l’autonomie pour favoriser le développement des équipes;
- Investir sur les soft skills: puisque les travailleurs sont en quête de sens, que les exigences à l’égard des organisations se portent à présent sur les qualités humaines, les entreprises vont devoir investir sur les soft kills pour permettre aux différentes strates de la société d’adopter davantage de bienveillance en interne. Attention toutefois à ne pas mettre toute l’exigence exclusivement sur le management intermédiaire, déjà totalement sous pression. Il existe de nombreux professionnels capables d’accompagner les organisations, au niveau structurel et individuel, afin de s’adapter aux changements et de permettre à chacun d’optimiser son plein potentiel;
- À la recherche du sens: que ce soient les malheureux au travail ou les épanouis, tous sont en quête de sens. Un salarié bien dans son poste sera beaucoup plus investi et donc productif. L’entreprise a ainsi tout intérêt à capitaliser sur la quête de sens, amplifiée par la crise, pour accroître le potentiel de chaque travailleur.
Si malgré ces conseils, vous continuez à ne pas vouloir revenir au bureau, c’est peut-être parce que vous avez envie de changer d’horizon.
Peut-être la crise vous a-t-elle révélé digital nomad exotique ou travailleur à la campagne?
Peut-être les gâteaux cuisinés pendant le confinement ont (r) éveillé chez vous une vocation enfouie?
Si tel est le cas et même si en France nous avons encore une vision très linéaire, voire rétrograde, de la carrière, les jeunes générations forcent le changement de mentalités.
Ainsi, les slasheurs, qui exercent plusieurs fonctions en parallèle, et les multipotentiels, qui cumulent plusieurs centres d’intérêt, sont autant d’exemples qu’il n’existe pas une seule norme de carrière.
Aujourd’hui, plus qu’hier, l’individu et sa singularité vont être au centre de la société, et même de l’économie.
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