Avec les régionales, la déstructuration de la vie politique continue

POLITIQUE - Un “enfer”, un “imbroglio”, une “salade niçoise” ou une “bouillabaisse”. Sur le plateau de BFMTV dimanche 16 mai, Renaud Muselier, président sortant de la région PACA, débordait d’imagination pour qualifier les deux semaines de...

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Le Président du Sénat, Gérard Larcher, Emmanuel Macron, l'ancien Premier ministre Jean-Marc Ayrault et Richard Ferrand, président de l'Assemblée nationale, le 10 mai 2021.

POLITIQUE - Un “enfer”, un “imbroglio”, une “salade niçoise” ou une “bouillabaisse”. Sur le plateau de BFMTV dimanche 16 mai, Renaud Muselier, président sortant de la région PACA, débordait d’imagination pour qualifier les deux semaines de psychodrames autour de la composition de sa liste qui viennent de se dérouler. Ce sera finalement un mélange de LR, de LREM et de société civile, sans aucun ministre ni causementaire, mais avec des rebondissements nationaux qui resteront dans les annales.

L’épisode n’a rien d’anodin. À l’image des régionales qui vont se dérouler les 20 et 27 juin prochains et dont la clôture des listes intervient ce lundi 17 mai, il peut donner à voir par anticipation ce qui pourrait se dérouler en 2022: une implosion de LR entre LREM et le RN. “C’est l’existence même de LR qui est questionnée”, expliquait le 16 mai Brice Teinturier à la lumière d’un sondage Ipsos dévoilé pour Le Parisien. “64 % de nos concitoyens pensent que la plupart des idées et des dirigeants LR sont proches soit de LREM, soit du RN au point qu’ils devraient les rallier, et 35 % seulement que c’est un parti politique utile et spécifique par rapport à LREM et au RN”, détaillait le directeur général de l’institut de sondages. 

C'est l'existence même de LR qui est questionnéeBrice Teinturier, directeur général d'Ispos dans "Le Parisien"

Le maire socialiste de Dijon, François Rebsamen, ne disait pas autre chose dans le JDD le même jour. “Les partis de gouvernement, y compris le Parti socialiste, sont à la peine. On se demande même s’ils existent encore... On ne voit pas de projet”, fustigeait sans détour ce proche de François Hollande.

Alors que se passe-t-il dans la vie politique française? Assiste-t-on encore à la recomposition souhaitée par Emmanuel Macron en 2017 et qu’il continue d’organiser depuis l’Élysée? Ou les partis sont-ils en voie de décomposition à cause d’accords inédits? Le même François Rebsamen incite dans cet entretien sa famille politique à s’allier avec toutes les forces de “l’arc républicain” au second tour pour faire barrage au RN dans certaines régions. Mais peut-on imaginer la seule liste d’union de la gauche dans les Hauts-de-France qui comporte des Insoumis fusionner avec celle d’Éric Dupond-Moretti?

″Avec les régionales, la déstructuration de la vie politique continue avec de nouvelles alliances et des alliances différentes selon les régions″, analyse le professeur émérite à Sciences Po, Pascal Perrineau. “Les écologistes, par exemple, ont des stratégies différentes dans chaque région et l’union de la gauche ne se fait nulle part, à part dans les Hauts-de-France, ce qui laisse entendre qu’elle aura un mal fou à s’inviter dans un second tour d’élection présidentielle”, présage le politologue.  

La gauche aura un mal fou à s'inviter au second tour de la présidentiellePascal Perrineau, politologue

“On est toujours dans cette phase de recomposition dont on ne connaît pas l’issue et qui pourrait très bien faire renaître des moments qu’on a déjà connus par le passé”, poursuit Bruno Cautrès, chercheur au Cevipof, le centre de recherches politiques de Sciences Po.

“Si, par exemple, Emmanuel Macron venait à gagner la présidentielle et à gouverner avec LR, on se retrouverait dans la situation des années 1970 avec le RPR et l’UDF qui pourrait très bien faire ressusciter l’union de la gauche”, suggère le politologue qui voit ce mouvement comme une longue bascule plus qu’un coup nouveau en politique. “Cela fait depuis les années 1990 qu’on observe des clivages internes aux formations politiques, dans tous les pays européens, ce n’est pas Emmanuel Macron qui les a inventés”, poursuit le chercheur. 

On note dans les enquêtes que l'image de Marine Le Pen pour devenir présidente, si elle reste un handicap, progresseBruno Cautrès, chercheur au Cevipof

Pendant que les partis de gouvernement s’effondrent, le Rassemblement national, lui, a changé de stratégie et accueille des candidats d’autres familles politiques pour tenter d’asseoir sa crédibilité. “On note dans les enquêtes que l’image de Marine Le Pen pour devenir présidente, si elle reste un handicap, progresse”, relève Bruno Cautrès. “Si elle venait à gagner une ou deux régions, ce serait un symbole fort et bénéfique pour elle, surtout dans les Hauts-de-France où elle détruirait un candidat LR, (Xavier Bertrand, NDLR), mais aussi en PACA puisque ça accréditerait l’idée que les électeurs ont finalement choisi un ancien LR, Thierry Mariani”, poursuit le spécialiste. 

En Marche aussi a changé de stratégie. À l’origine de cet accord alambiqué en PACA: Thierry Solère. Un ancien LR, conseiller direct d’Emmanuel Macron. “Alors que le message d’Emmanuel Macron était de renouveler les pratiques, LREM revient à des histoires de boutiques traditionnelles et donne le sentiment que le personnel politique joue aux dames et pousse des pions, sans jamais causer de projet”, regrette Bruno Cautrès pour qui le fait que des ministres soient prêts à cumuler leur poste avec celui de conseiller régional ou départemental est un retour à l’“ancien monde” dont le président cherchait pourtant à se débarrasser. 

Une tectonique des plaques qui sera scrutée de très près tout au long de la campagne, mais surtout dans l’entre-deux-tours où de nouvelles alliances pourraient se jouer. Aux résultats, chacun essaiera de se compter, pour tenter d’être le ou la mieux placé dans ce nouveau chamboule-toutqui se prépare, à un an de la présidentielle.

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