Avec “Standing in the Doorway”, Chrissie Hynde signe un album nostalgique de reprises de Bob Dylan
Son album solo précédent s’achevait sur une version du Que reste-t-il de nos amours ? de Charles Trenet, chantée en français, enrichie d’un dialogue tiré des Enfants du paradis. Au sortir du confinement, Chrissie Hynde étoffe le sujet des amours...
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Son album solo précédent s’achevait sur une version du Que reste-t-il de nos amours ? de Charles Trenet, chantée en français, enrichie d’un dialogue tiré des Enfants du paradis. Au sortir du confinement, Chrissie Hynde étoffe le sujet des amours défuntes avec Standing in the Doorway, songbook intimiste de dylaneries élaboré via SMS avec le guitariste des Pretenders, James Walbourne.
Le 1er cover album était pavé d’emprunts (Nick Drake, The Beach Boys, The Kinks…) comme la cour d’un palais des souvenirs dont elle serait la reine recluse. Le second ressemble à une galerie des glaces où chaque morceau lui renvoie un reflet qui, selon l’angle ou la lumière, la rajeunit ou la prépare à affronter l’inéluctable.
Cœurs brisésDans Reckless, sa passionnante autobiographie (non traduite) de 2015, celle qui désormais porte allégrement sept décennies sans rien céder, en esprit ou silhouette, à la rockeuse qu’elle fut et demeure en donne l’une des clefs. “Je suis la fille qui pense que Bob Dylan a composé la chanson Standing in the Doorway pour elle”, écrit l’Américaine sur le ton de l’autodérision.
Plus qu’au syndrome de l’appropriation, c’est à un fantasme presque adolescent que s’abandonne Chrissie Hynde en choisissant cette chanson comme proue d’une étrange chaloupe de reprises obscures sur la dérive des sentiments, miscellanées de torch songs méconnues pour cœurs brisés. De quoi cause donc ce non-tube exhumé d’un des albums (Time Out of Mind) les moins huppés de Dylan ? De rupture, d’un amour dont le “fantôme n’a pas disparu”, de ce goût amer d’inachevé qui résiste au temps, à l’oubli, et domine l’ensemble. C’est à l’alliage intraitable de sentiments ennemis qu’elle se frotte ici, avec des punchlines poignardées telles que “J’ai eu le cœur, tu as eu le sang” (In the Summertime), “Je ne sais pas, si je te voyais, si je t’embrasserais ou te tuerais” (Standing in the Doorway) ou, pire, “Combien d’humiliations pourrais-tu supporter ? Difficile à dire d’après ce 1er baiser ?” (Sweetheart like You).
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Puissance poétiqueHormis la délicatesse mystique de Love Minus Zero/No Limit, perle de jouvence du Dylan sixties, ou la sombre rumination historique de Blind Willie McTell rappelant que ce disque fut pensé sous l’ère Trump, tout le reste s’ébat dans un lit aux ressorts nostalgiques d’étreintes lointaines et aux draps imprégnés de sueur rance. C’est une femme aux trois divorces et multiples aventures qui assume ici sa solitude, consciente que si l’amour est le ciment de toute identité (magnifique Tomorrow Is a Long Time), c’est au prix d’une reddition sans condition. Si le cœur est un chasseur solitaire, celui de Chrissie Hynde semble bel et bien avoir rendu les armes. Tourné désormais vers la spiritualité, elle égraine Every Grain of Sand, psaume dylanien ultime, en conclusion d’un recueil qui aurait pu être âpre et maussade, mais que la matière mélodique, la puissance poétique et la voix majestueuse de la chanteuse rend étonnamment chaleureux.
Standing in the Doorway: Chrissie Hynde sings Bob Dylan (BMG). Sortie le 20 août.