“Bac Nord”, une fiction policière “ni pro-flic ni anti-flic” mais caricaturale

On se souvient du retentissement qu’avait provoqué, en 2012, la révélation d’un nid de ripoux à la brigade anticriminalité (BAC) du nord de Marseille, qui avait conduit à l’incarcération de sept policiers et à la dissolution de la brigade par...

“Bac Nord”, une fiction policière “ni pro-flic ni anti-flic” mais caricaturale

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On se souvient du retentissement qu’avait provoqué, en 2012, la révélation d’un nid de ripoux à la brigade anticriminalité (BAC) du nord de Marseille, qui avait conduit à l’incarcération de sept policiers et à la dissolution de la brigade par le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls. On se souvient beaucoup moins, en revanche, que l’affaire était totalement retombée sept ans plus tard, avec des charges revues à la baisse (exit la “bande organisée”) et la suspicion d’une histoire en fait “démesurément grossie” par des “querelles entre chefs” (Le Monde, juin 2019) aux dépens des flics incriminés.

Un emballement que Cédric Jimenez a voulu retracer en s’inspirant librement des témoignages de trois d’entre eux. Il en tire Yass, Greg et Antoine, sentinelles désabusées d’une cité sinistrée, où la notion même de maintien de l’ordre s’est liquéfiée depuis longtemps dans un écosystème de plus ou moins grande criminalité : la police lutte contre le gros trafic en entretenant le petit (les saisies de shit servent à payer les indics), et voit son travail ramené à de la gestion de territoires – à défaut de faire respecter la loi, elle s’épuise à préserver un semblant de présence dans les quartiers où son autorité est presque réduite à néant.

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Ensauvagement

Le résultat est un mélange dangereusement inflammable des genres. Après une année 2020 chargée en films sur la police, de l’humanisme béat d’un Police à l’exposé brutal d’Un pays qui se tient sage, BAC Nord revient à cette police à demi consciente d’être un sujet, bercé par un fantasme de polar américanoïde tout autant que par un autre plutôt lié à la sismographie réaliste façon Les Misérables. Un terrain très friable, car si l’on ne saurait vraiment reprocher à Jimenez d’avoir voulu faire corps avec le récit de ses baqueux, force est de constater que l’exacerbation de leurs expériences subjectives, gonflée par ses propres velléités de thriller musculeux, emmène BAC Nord tout droit sur un terrain caricaturalement conforme à la notion très courue d’“ensauvagement”, avec ses zones de non-droit absolu peuplées d’armées de gangsters encagoulés. Il n’est pas anodin qu’une vidéo amateur du tournage, où une horde de jeunes démolissait un véhicule de la BAC, ait été prise, en août 2019, pour une authentique scène de guérilla urbaine par des internautes influençables.

Nul doute que la façon qu’a le film de jouer avec ces codes de représentation des quartiers, quelque part entre New York 1997 et Banlieue 13, et ce, malgré ses prétentions revendiquées (et probablement sincères) à n’être “ni pro-flic ni anti-flic” et “s’intéresser avant tout aux hommes”, lui vaudra un vibrant accueil chez les amateur·trices de Kärcher.

Bac Nord de Cédric Jimenez avec Gilles Lellouche, Karim Leklou, François Civil (Fr., 2020, 1 h 44). En salle le 18 août

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