"Benedetta" n'est pas juste un film violent, c'est aussi très drôle
CINÉMA - C’est l’un des films les plus attendus de la Croisette. Ce vendredi 9 juillet, parallèlement à sa sortie sur les écrans en France, est présenté au Festival de Cannes le nouveau long-métrage du réalisateur néerlandais Paul Verhoeven,...
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CINÉMA - C’est l’un des films les plus attendus de la Croisette. Ce vendredi 9 juillet, parallèlement à sa sortie sur les écrans en France, est présenté au Festival de Cannes le nouveau long-métrage du réalisateur néerlandais Paul Verhoeven, Benedetta, avec en tête d’affiche Virginie Efira.
Son histoire, adaptée du récit historique qu’a reconstitué la chercheuse Judith C. Brown dans Sœur Benedetta, entre sainte et lesbienne, c’est celle d’une nonne italienne qui, dans le courant du XVIIe siècle, rejoint le couvent de Pescia en Toscane persuadée d’être en contact avec Jésus Christ. Plus le temps passe, plus elle est certaine de ses visions, s’attirant par là même la jalousie de certaines des sœurs, mais aussi l’affection toute particulière de l’une d’entre elles, Bartolomea.
Benedetta ne résiste pas longtemps à son charme, ni à ses avances. À ses côtés, la religieuse s’abandonne aux plaisirs du sexe, jusqu’au jour où leur relation éclate au vu et au su de tous, donnant lieu à un procès et à la condamnation de l’héroïne pour “lesbianisme”.
Découvrez ci-dessous la bande-annonce de Benedetta:
Le propos du film n’a rien d’amusant. Pourtant, on se surprend à rire. Le ton est cynique. Le trait, parfois exagéré. “Je ne dirais pas qu’on vient voir une grosse comédie, mais il y avait des choses très drôles à jouer”, nous révèle Virginie Efira. La comédienne se souvient d’une scène, au cours de laquelle la fille de Felicita, envieuse de l’accession au pouvoir de Benedetta, lui demande si Jesus lui a donné des indications sur la conduite qu’elle devait adopter. “Non, il ne m’a rien dit”, lui répond-elle sèchement, d’un revers de main.
Un sextoy atypique
Benedetta ne fait preuve d’aucune douceur, elle n’est pas caractérisée par les valeurs chrétiennes attendues. Au contraire, elle n’aime pas la contestation. Une autorité nuancée par le caractère risible de certaines scènes, comme “quand je suis avec mes petites sandalettes en train de courir après Jésus pour qu’il m’attende”, commente Virginie Efira.
L’actrice ne tarit pas d’éloges à l’égard de Paul Verhoeven, ni de son humour. “Il n’y a jamais de prise au sérieux dans son cinéma, souffle la comédienne. Ce que j’adore, c’est qu’il exagère, un peu comme un impressionniste. Il peut y avoir un côté ‘farce’, notamment au regard de l’imagerie religieuse, mais il travaille toujours avec un sérieux inouï. Comme le regard qu’avait Jamel Debbouze à ses débuts, il ne fait jamais de pensum.”
Le sextoy en bois que Bartolomea taille dans une statuette de la Vierge Marie peut en témoigner. La réaction de Benedetta à la découverte de celui-ci, aussi. “Oh, c’est un peu rugueux à cet endroit”, lui fait-elle remarquer. “C’est tellement improbable et en même temps très concret”, constate Virginie Efira. Elle aime le cynisme du cinéaste, cette manière qu’il a de montrer les mensonges du jeu social et l’hypocrisie des personnes “qui pensent être proches de Dieu”.
L’humour, ici, désarçonne. “C’est aussi une manière de expliquer des choses avec une forme de distance, poursuit l’interprète. Il se passe tellement de choses absurdes dans le monde qu’on pourrait en rire. Quand on les met au-devant, ça perd de son sérieux. Le rire, ce n’est pas juste la décontraction du cerveau.”
Un film non consensuel
Ceci n’épargne en rien la violence des images, comme celles des corps de femmes mutilés ou du suicide d’une des soeurs. ”Le corps sous toutes ses formes intéresse Paul Verhoeven. C’est aussi le corps qui chie, le corps qui suinte, le corps qui a des bubons ou des excroissances. En bref, tout”, commente Virginie Efira, selon qui le travail du réalisateur sur ce film s’apparente à celui des peintres flamands. Comme dans les peintures de Bruegel, les scènes de Benedetta regorgent de monde. Elles sont belles, mais “n’oublient pas ce mec qui pisse dans un coin”, commente l’actrice.
“La violence, ajoute-t-elle, on n’a pas besoin de regarder à droite ou à gauche pour voir qu’elle est là. Elle est comprise en l’homme. Tout ce qu’il s’agirait d’enfermer, de faire comme si ça n’avait pas lieu d’être, comme si nous n’étions pas des animaux, Paul Verhoeven va le mettre en avant. Le contexte de ce film a une résonne toute particulière. Même si on trouve que notre époque actuelle est de plus en plus violente, il faudrait peut-être faire un tour au Moyen-Âge [pour relativiser]. C’est la très grande violence. Ce n’est pas le coronavirus.”
Comme son héroïne, le long-métrage ne répond pas à une seule logique. “On ne peut pas dire que le film est totalement consensuel. On ne peut pas dire non plus que le film ne heurtera la sensibilité d’absolument personne, admet Virginie Efira. C’est tant mieux. Je préfère ça que les algorithmes qui nous font avaler à toutes et tous la même chose. Dans la construction de soi, c’est intéressant. Adolescente, c’est ce qui me faisait sentir plus vivante.” Le public de Cannes réagira-t-il de la même manière? Les dés sont jetés.
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