[Cannes 2020] Dans “Lingui”, Mahamat-Saleh Haroun s’attaque au patriarcat religieux
S’il avait coutume d’embrasser les trajectoires des laissés pour compte de la société tchadienne ou celles et ceux qui s’en sont exilés, Mahamat-Saleh Haroun n’avait jamais placé un personnage féminin au centre de ses films. Il s’y attèle enfin...
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S’il avait coutume d’embrasser les trajectoires des laissés pour compte de la société tchadienne ou celles et ceux qui s’en sont exilés, Mahamat-Saleh Haroun n’avait jamais placé un personnage féminin au centre de ses films. Il s’y attèle enfin dans Lingui, les liens sacrés pour évoquer la condition des femmes dans son pays de naissance et ce par le prisme de la question de l’avortement, interdit au Tchad, à la fois, par la loi et les pratiques religieuses. Le film suit le parcours du combattant que mènent Amina et sa fille de 15 ans, Maria, pour que cette dernière puisse avorter illégalement et ainsi éviter la vie d’opprobre, de misère et de solitude que sa mère, tombée enceinte au même âge qu’elle, a mené.
Entre réalisme et artifice assuméOn retrouve dans ce film les deux versants du cinéma du cinéaste franco-tchadien. Une 1ère pente réaliste, avec une mise en scène épurée, des acteur·ice·s pour la plupart non-professionnel·le·s, des décors naturels et la description d’une âpre réalité sociale, et une seconde pente, à l’inverse, où brillent les qualités de conteur de Mahamat-Saleh Haroun, lauréat du prix du jury en 2010 pour Un homme qui crie. Lingui est une fable tragique obéissant à une forme de fatalité car, entre la mère et la fille, la malédiction se répète. L’enjeu est ainsi de faire déjouer le destin.
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Cette dimension fabuleuse est renforcée par des dialogues écrits et joués avec une volonté affichée de tordre le cou au réalisme pour flirter avec l’artifice. Ce savant mélange aboutit à un conte social qui ne cesse de repousser l’émotion et le pathos pour privilégier la justesse et la pudeur. Malgré son sujet, Lingui évite les ornières du film-dossier ou du film choc.
Lorsque l’émotion finit par advenir dans le dernier tiers du film, sans prévenir, la sourde violence du patriarcat religieux est mise à jour sans fard. Pour la contrecarrer, Lingui, les liens sacrés explore la façon dont se met en place une chaîne de solidarité féminine, qui témoigne d’un impétueux désir d’émancipation.
Lingui, le lien sacré de Mahamat-Saleh Haroun. Avec Achouackh Abakar, Rihane Khalil Alio, Youssouf Djaoro… En salle le 8 décembre 2021.