[Cannes 2021] Emmanuel Marre et Julie Lecoustre signent avec “Rien à foutre” un 1er film plein d’humanité

  En seulement deux moyens métrages, les lumineux et mélancoliques Film de l’été et D’un Château l’autre, le nom d’Emmanuel Marre est devenu l’un des plus passionnants du jeune cinéma d’auteur. C’est peu dire que son 1er long était attendu....

[Cannes 2021] Emmanuel Marre et Julie Lecoustre signent avec “Rien à foutre” un 1er film plein d’humanité

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En seulement deux moyens métrages, les lumineux et mélancoliques Film de l’été et D’un Château l’autre, le nom d’Emmanuel Marre est devenu l’un des plus passionnants du jeune cinéma d’auteur. C’est peu dire que son 1er long était attendu. Présenté à la Semaine de la Critique, et co-réalisé avec Julie Lecoustre, déjà collaboratrice à l’écriture sur D’un Château l’autre, Rien à foutre prolonge le geste à l’œuvre dans les précédents films d’Emmanuel Marre, celui qui consiste à partir d’un “pas grand-chose” pour l’amener vers des sphères intimes, existentielles et politiques, et changer une “simple” rencontre en une épopée. 

Savoir vendre, c’est savoir jouer

À la source de ce nouveau chapitre de “pas grand-chose”, il existe une image, celle qui retenait l’attention du cinéaste belge un jour dans un avion : une hôtesse de l’air visiblement mal, mais capable en une fraction de seconde de changer de visage et d’arborer un large sourire pour faire une vente de produits proposés par sa compagnie low-cost. Il y avait là matière suffisante à fiction et la possibilité de faire un film, long cette fois-ci, mais obéissant toujours aux mêmes principes : équipe réduite, improvisation, fabrication artisanale pour une approche documentaire. Savoir vendre, c’est savoir jouer. C’est ce qu’on apprend aux hôtesses de l’air quand elles débarquent dans une compagnie.

La belle idée méta de Rien à Foutre est alors d’avoir confié ce rôle de volte-face à une actrice professionnelle, Adèle Exarchopoulos, immergée au milieu de véritables travailleur·euses. Elle est ici partout, à chaque plan et y accomplit le (quasi) impossible : être là et ne pas l’être vraiment, en même temps. Comme une autre héroïne rencontrée il y a quelques jours dans cette sélection cannoise (l’Anaïs du film de Charline Bourgeois-Tacquet), Cassandre, 26 ans, est en mouvement perpétuel, elle ne se fixe nulle part et quand elle pose enfin ses valises chez elle sur l’île de Lanzarote, décor impersonnel et clinquant digne d’un jeu vidéo veine GTA ou façon Sim’s avec piscine et couleur fluo, elle le traverse (à trottinette) sans vraiment l’habiter, et préfère swiper sur son téléphone pour dater des mecs. 

>> À lire aussi : “Les Amours d’Anaïs” : le portrait subtil et précis d’une femme pleine de désirs, obstinée et inconstante

Humain

Le monde qu’encapsulent Emmanuel Marre et Julie Lecoustre est celui du grand capitalisme débridé. Tout s’y achète et se consomme – rien à foutre des mouvements sociaux, “demain je sais même pas si je serai en vie.” En creux, c’est aussi l’esprit et l’humeur d’une génération qui rêve du faste de Dubaï, et de ces villes riches comme îlots paradisiaques, que saisit le film.

Si le constat est amer, l’œil des cinéastes lui est d’une infinie tendresse. Le regard n’est jamais surplombant ou condescendant, au contraire, dans ce bain d’artificialité, les rapports humains, eux, subsistent. Dans ce mouvement d’absence et de présence qui aiguille le corps en fuite de Constance, qui vole peut-être pour ne pas trop penser, c’est aussi l’émouvante histoire d’un deuil qui s’écrit.