[Cannes 2021] “Julie (en 12 chapitres)”ou l’art de ne pas choisir

Après Thelma (2017), Joachim Trier réalise un nouveau portrait féminin découpé en 12 chapitres. Douze instants de vie pour essayer de dire qui est Julie (la révélation Renate Reinsve), bientôt la trentaine. La réponse n’a rien d’évident et...

[Cannes 2021] “Julie (en 12 chapitres)”ou l’art de ne pas choisir

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Après Thelma (2017), Joachim Trier réalise un nouveau portrait féminin découpé en 12 chapitres. Douze instants de vie pour essayer de dire qui est Julie (la révélation Renate Reinsve), bientôt la trentaine. La réponse n’a rien d’évident et il faudra passer deux heures à ses côtés pour réussir à approcher la jeune femme.

Les fragments d’un vie

Dans Julie (en 12 chapitres), l’art du portrait s’envisage comme un art du dispersement, de l’éclatement. Si Julie nous échappe, c’est justement parce qu’elle nous arrive par fragments, traversée d’aspirations et de désirs contraires, à tel point qu’elle ne semble jamais vraiment trouver sa place même après des mois d’amour avec un garçon, un auteur de BD en vogue (incarné par l’acteur fétiche du cinéaste Anders Danielsen Lie), qu’elle finira par quitter. “Je t’aime et je ne t’aime pas”, dira-t-elle dans un aveu qui s’écouterait presque comme un éloge du non-choix. Car Julie, tour à tour étudiante en chirurgie puis en psychologie, photographe, amoureuse de l’un puis de l’autre, n’est pas incapable de choisir, elle se refuse simplement à fixer ce qui est changeant : les envies professionnelles, les sentiments amoureux, le désir d’enfants, la question de la fidélité… la vie. 

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Dans la 1ère partie, Joachim Trier fait exister cette histoire de dérive existentielle étalée sur plusieurs années comme s’il s’agissait d’une série télé. On a alors le sentiment de voir défiler sous nos yeux, et à vive allure, les épisodes rétrécis de la vie de Julie, soutenus par une armada d’artifices (montage vif, voix off, musique…) séduisants mais qui se révèlent aussi par endroits assez clinquants, voire kitsch. On craint, dans ce début de film haletant, de n’assister qu’à la mise en scène d’une coquetterie trop sophistiquée autour de la jeunesse urbaine et de notre contemporain. Le film s’essaye par exemple à aborder des questions de féminisme (notamment sur la différence d’âge des couples hétérosexuels, la sexualité des femmes, les règles…) mais il botte en touche. Comme si le regard du réalisateur faisait écran et réduisait ces interrogations, là encore, à des afféteries utilisées plus comme des marqueurs temporels que comme matière à de véritables pistes de réflexion. 

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Et puis, survient une merveilleuse séquence d’arrêt sur image dans laquelle la jeune femme, à la manière d’une Peau d’âne retrouvant son prince charmant, vit ses 1ères minutes avec son nouvel amant dans une ville complètement endormie où elle et lui seulement ont le droit d’exister et de s’aimer. Le film commence alors sa mue, se déleste de la cadence de ses débuts et de son effet vignette pour s’abandonner aux couleurs d’un profond et bouleversant mélodrame tissé autour d’une triangulation amoureuse et d’un deuil à venir. Là, Joachim Trier retrouve tout ce qui faisait la beauté et l’intensité émotionnelle de ses 1ers films, cette faculté à faire exister dans chaque plan, sur chaque visage, cette très prégnante sensation de mélancolie.

Julie (en 12 chapitres) de Joachim Trier. Avec Renate Reinsve, Anders Danielsen Lie, Herbert Nordrum… En salle le 13 octobre 2021.