[Cannes] “Broker”, un Kore-Eda mélo mais efficace

Busan, en Corée du Sud. Il pleut beaucoup. Deux policières sont en planque dans leur voiture. Dans la nuit, une jeune femme abandonne son bébé à l’entrée d’une église. Deux hommes, qui tiennent un pressing mais trafiquent aussi des enfants,...

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Busan, en Corée du Sud. Il pleut beaucoup. Deux policières sont en planque dans leur voiture. Dans la nuit, une jeune femme abandonne son bébé à l’entrée d’une église. Deux hommes, qui tiennent un pressing mais trafiquent aussi des enfants, s’en emparent et commencent à chercher d’éventuels acquéreurs. La mère de l’enfant réapparaît et découvre que les deux trafiquants donnent une partie de l’argent à un orphelinat, où l’un d’entre eux a été élevé. Les voilà tous trois partis pour une autre ville, suivis de près par les deux policières.

Après une palme d’or en 2018 pour Une affaire de famille, le cinéaste japonais Kore-Eda avait tourné en France un film plaisant mais un petit peu décevant, qui avait fait l’ouverture de la Mostra de Venise en 2019, avec notamment Juliette Binoche, Ludivine Sagnier et Catherine Deneuve. Cette fois-ci, il est en Corée du Sud, pour y tourner, une fois de plus – c’est une véritable obsession – un film sur la famille.

Après les voleurs d’enfants maltraités d’Une affaire de famille, inspiré d’une histoire vraie, il invente une nouvelle forme d’utopie familiale, constituée de deux trafiquants (rien que ça), une travailleuse du sexe, un jeune garçon de l’orphelinat obsédé par le foot et très drôle, qui ne les lâche pas, et un bébé.

Le temps de vivre et de laisser vivre

Ce qui frappe ici, c’est combien, avec un départ en fanfare, Kore-Eda prend son temps, nous entraîne dans un faux-rythme d’habitude déconseillé dans toutes les écoles de cinéma et guère vu cette année à Cannes. Le film ralentit de plus en plus, prend des chemins buissonniers, totalement inutiles sinon qu’ils sont, pour le cinéaste, le meilleur moyen de nous prendre dans ses filets.

Oui, voilà un cinéaste qui donne plus d’importance à ses personnages qu’aux situations, qu’au scénario. C’est par la lenteur, le temps qu’il consacre à les décrire, un par un, deux par deux, trois par trois, etc.?, que le cinéaste nous prépare à accepter le quasi inacceptable pour nous : les bons sentiments.

Alors oui, il en fait trop parfois, le cinéma japonais étant très souvent friand de pathos, mais il nous hypnotise aussi totalement et fait de nous ce qu’il veut. Et ça, c’est du grand art.

Broker de Hirozaku Kore-Eda. Avec Song Kang-Ho, Dong-won Gang, Doona Bae. En salles le 7 décembre 2022.