Ce que Donald Trump risque avec son 2e procès en destitution

ÉTATS-UNIS - Il a déménagé de la Maison Blanche il y a trois semaines, mais ses actions en tant que président restent bien ancrées dans l’actualité: Donald Trump revient sur le devant de la scène politique et médiatique ce mardi 9 février avec...

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Ce que Donald Trump risque avec son 2e procès en destitution (illustration Maxime Bourdeau/Le HuffPost avec Reuters/Getty)

ÉTATS-UNIS - Il a déménagé de la Maison Blanche il y a trois semaines, mais ses actions en tant que président restent bien ancrées dans l’actualité: Donald Trump revient sur le devant de la scène politique et médiatique ce mardi 9 février avec son procès en destitution qui s’ouvre au Sénat.

Après l’assaut meurtrier de ses partisans sur le Congrès le 6 janvier dernier, l’ex-chef d’État républicain a été accusé par la Chambre des représentants d’avoir nourri l’attaque avec ses discours incendiaires et va désormais être jugé par les 100 membres de la chambre haute. 

Cette “trahison d’une ampleur historique” mérite largement que Trump soit destitué, selon les démocrates qui vont jouer le rôle de procureurs dans ce procès. “Si le fait de provoquer des émeutes insurrectionnelles contre une session conjointe au Congrès après avoir perdu une élection n’est pas un crime valant une destitution, il est difficile d’imaginer ce qui pourrait l’être”, estiment les élus dans leur argumentaire de 77 pages. 

Mais pour les sénateurs républicains, qui devront être au moins 17 à voter coupable pour que Trump soit condamné, l’affaire n’a absolument rien d’évident. Et quand bien même cette sentence viendrait à tomber, elle n’interviendrait qu’après la fin de son mandat et ne servirait ainsi pas sa fonction première, à savoir retirer au président en place le pouvoir qu’il détient. Que risque donc vraiment le milliardaire parti en Floride pour ses premières semaines à la retraite? 

Des avantages retraite déjà acquis

En quittant le Bureau ovale, chaque ancien président américain bénéficie à vie de quatre avantages majeurs. Ceux-ci sont formellement listés dans le Former Presidents Act voté en 1958 et financés par le contribuable.

Un ex-chef d’État touche tout d’abord une retraite annuelle: cette dernière a été revalorisée à 219.200 dollars (soit environ 182.000 euros) en 2020. Une somme qui équivaut environ à la moitié du salaire en activité et à laquelle s’ajoutent trois enveloppes séparées.

La première s’élève à 150.000 dollars par an pendant les 30 premiers mois de retraite, puis tombe à 96.000 dollars, pour l’embauche de personnel. La deuxième, non limitée, couvre les coûts liés au financement et à l’ameublement d’un espace de travail. La troisième peut, elle, atteindre le million de dollars par an pour prendre en charge “les dépenses de sécurité et de voyages” de l’ancien président. Son épouse bénéficie d’une enveloppe à part de 500.000 dollars pour ce même poste.

Toutes ces sommes sont conditionnées par trois règles: avoir été président, être désormais à la retraite... et ne pas avoir été contraint de quitter ses fonctions à cause d’une destitution. Sur les réseaux sociaux, certains ont alors rapidement imaginé que Trump ne toucherait rien de ce pactole si le Sénat le jugeait responsable d’une insurrection contre le pays. Problème, ce cadre n’a pas été fixé en ayant en tête le cas, pour le moment unique, d’une destitution post-mandat. 

Interrogés par CBS News, Stephen Vladeck, professeur de droit constitutionnel à la University of Texas School of Law, et Allan Lichtman, historien présidentiel à la American University, arrivent d’ailleurs tous les deux à la même conclusion: les quatre années de Trump ayant été accomplies dans leur intégralité, comme cela est requis sur le papier, il apparaît improbable que ses avantages lui soient retirés. Et si l’on essayait de l’en priver, Trump obtiendrait a priori aisément gain de cause devant les tribunaux, selon Vladeck, même si cela peut sembler contraire à l’esprit de cette loi.

Privé de présidentielle 2024?

Autre avantage dont bénéficient les anciens présidents: la protection du Secret Service. Une garantie qui date de 1962 et qui a été modifiée plusieurs fois depuis. Au départ, la protection s’appliquait “pendant une période raisonnable après la fin de mandat”, puis une loi de 1994 a voulu la limiter à 10 ans avant qu’un amendement de 2013 vienne l’étendre à vie pour l’ancien président, son épouse et leurs enfants de moins de 16 ans. 

Donald, Melania et Barron Trump seront-ils alors toujours protégés s’il est destitué? Cela ne semble pas faire de doute pour Paul Campos, professeur de droit constitutionnel à la University of Colorado Law School. Contrairement aux avantages financiers, la présence du Secret Service à leurs côtés ne dépend aucunement du Former Presidents Act et de son écriture qui peut soulever des doutes. Ce dispositif n’a ainsi que peu de chances de changer qu’un président soit destitué pendant ou après son mandat.  

S’il ne perd aucun de ses avantages après condamnation, quel est donc l’intérêt de lancer ce procès? Essayer au moins de garder Trump, qui a dit envisager de revenir dans la course à la Maison Blanche en 2024, à distance de Washington. La procédure n’est pas automatique, mais s’il est destitué, les sénateurs pourront en effet organiser s’ils le souhaitent un second vote en invoquant le 14e amendement. Ce dernier, né de la Guerre de Sécession, interdit à quiconque ayant “participer à une insurrection ou rébellion” contre les États-Unis de se présenter à une élection. 

Et cette fois, pas besoin de l’accord des deux tiers du Sénat, une simple majorité suffirait. Les démocrates y occupant 50 des 100 sièges, avec l’aide supplémentaire de la vice-présidente Kamala Harris pour départager toute égalité parfaite, l’issue de ce vote serait quasiment garantie. Une opportunité qui pourrait peut-être pousser quelques républicains -qui ne veulent plus voir Trump dans le parti ou qui envisagent de se présenter à la présidentielle- à le juger coupable lors de son procès.

La piste de la censure

Une autre piste a été mise sur la table par les démocrates: la motion de censure. Car rien ne dit que 17 sénateurs républicains, le chiffre minimal à atteindre pour que le vote bascule, seront prêts à condamner Donald Trump.

Cette option, qui requerrait le vote de seulement dix sénateurs conservateurs pour être adoptée, est bien moins sévère, pour ne pas dire purement symbolique, car la personne visée n’est ici pas membre du Sénat. Au final, la motion de censure -votée une seule fois contre un président dans l’histoire du pays- se résumerait en effet à une trace écrite dans laquelle le Congrès condamne les actions de Trump, sans pour autant vouloir le marquer du sceau de l’infamie qu’est la destitution. Un compromis qui a déjà séduit quelques sénateurs républicains.

L’élu démocrate qui planche sur le sujet a cependant avancé que la procédure pourrait bien servir de base pour ensuite déclencher un vote invoquant le fameux 14e amendement. Ce qui semble dans les faits compliqué, selon plusieurs experts juridiques, car cela demanderait d’éclaircir le langage employé dans cet amendement qui, dans ce cas précis, ne mentionne pas expressément le président.

Et quand bien même une inéligibilité pourrait être obtenue de la sorte, elle ne serait pas des plus solides. Cette configuration offrirait simplement l’opportunité à un État d’empêcher Trump de figurer sur ses bulletins de vote, détaille NBC News, ce que le milliardaire pourrait ensuite contester en justice et qui entraînerait une longue bataille devant les tribunaux. Si son objectif est réellement de revenir en politique un jour, après cette première expérience chaotique.  

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