C'est à "Loft Story" que l'on doit ces détails dans nos émissions préférées

TÉLÉVISION - “Koh Lanta”, “The Voice”, “Top Chef”... Vous regardez peut-être ces grands divertissements incontournables de la télévision française. Mais aviez-vous remarqué qu’ils reprennent certains codes issus de la télé-réalité? Alors que...

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Le confessionnal de

TÉLÉVISION - “Koh Lanta”, “The Voice”, “Top Chef”... Vous regardez peut-être ces grands divertissements incontournables de la télévision française. Mais aviez-vous remarqué qu’ils reprennent certains codes issus de la télé-réalité? Alors que “Loft Story” fête ses 20 ans le 26 avril, Le HuffPost s’est intéressé à son riche héritage dans le monde du petit écran. 

1./ Le confessionnal 

C’est sans aucun doute le code de la télé-réalité le plus courant. Celui qui consiste à enfermer des candidats dans une pièce insonorisée. Seule face à la caméra, il peut alors livrer des confidences les plus sincères possibles ou attaquer ses concurrents. C’est d’ailleurs dans le confessionnal des “Anges 5” que Nabilla a prononcé son expression devenue culte : “non mais allo quoi”.

“Le confessionnal a amené ce qu’on qualifie d’entrevues narratives, où on voit le personnage expliquer comment il a vécu une situation, ce qu’il a ressenti,” explique au HuffPost Nathalie Nadaud-Albertini, docteure en sociologie de l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS). “Le CSA a décrit cela comme une nouvelle façon d’écrire à la télévision qui s’est immiscée dans d’autres genres.”

Ce huis clos permet d’être cash et d’avoir une parole authentique. Ce format a d’ailleurs été plébiscité par M6 pour son programme culinaire “Un dîner presque parfait”. À l’issue du repas, les candidats se rendent dans la salle de bain pour noter à l’aide de pancartes le repas qu’ils viennent de déguster et (souvent) dire tout le mal qu’ils pensent de leur hôte. 

La forme de l’entrevue narrative s’est aussi imposée dans les plus grands programmes de divertissement comme “The Voice” (TF1). Elle est insérée au montage de telle sorte que la ou le candidat(e) puisse analyser sa prestation et donner son ressenti. On exploite complètement le registre de l’émotion. Exit les voix off, ici le personnage fait le récit de sa propre histoire, comme dans cet extrait de la saison 12 de “Top Chef” (M6) ci-dessous où la préparation des plats est entrecoupée des explications des candidats.

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“Récemment, la série ‘En Thérapie’ sur Arte m’a frappée et je me suis demandé si on aurait aussi bien accroché à cette série si on n’était pas habitué par des programmes dans lesquels des gens nous expliquent une situation qu’ils ont vécu”, s’interroge d’ailleurs Nathalie Nadaud-Albertini. “Il y a dans cette série des codes visuels, sonores et esthétiques complètement différents évidemment, mais j’y vois un lien. Je me suis demandé si ce mode d’écriture qui passe par la parole ne s’était pas renforcé, avec un personnage qui se explique et par lequel on suit l’histoire.”

2./ Le “personnage-personne”

“Loft Story” a aussi eu cette capacité à faire émerger des anonymes comme Loana ou Steevy Boulay notamment. “Ce qui est très nouveau, c’est le marketing télévisuel: on prend des personnes inconnues du grand public et on va les mettre en avant et suivre leur évolution”, souligne à l’AFP Virginie Spies, universitaire et spécialiste de la télé-réalité.

Depuis, les exemples ne manquent pas dans ce registre télévisuel. On pense à la chanteuse Jenifer qui a brillé en remportant la télé-réalité musicale “Star Academy” (TF1), à Nabilla révélée par “Les Anges de la télé-réalité” (NRJ 12), ou encore Caroline Receveur découverte dans “Secret Story” (TF1)...

Mais alors pourquoi sont-ils devenus des célébrités et pas les candidats de “Questions pour un Champion” ou de “Qui veut gagner des millions”? Pour Nathalie Nadaud-Albertini, le mode de narration particulier fait toute la différence.

“Dans la télé-réalité, il y a cette intrigue qui se construit et s’appuie sur un ‘personnage-personne’. C’est l’opposé d’une fiction classique, pour laquelle on écrit d’abord le scénario, puis on choisit un acteur pour l’incarner. Là on choisit des candidats parce qu’on pense qu’ils correspondent à tel ou tel type de personnages, on les met dans un espace de potentialité et on voit comment ils interagissent les uns avec les autres. Sur une journée de tournage, ça fait donc un gros magma d’événements dont on soustrait un certain nombre, les monte ensemble pour créer un récit. Et ce faisant, on crée aussi les personnages qui sont indexés sur le comportement, les paroles et le physique d’une personne”. 

Au-delà de la télé-réalité, ce phénomène de “starification” d’inconnus a pris de l’ampleur ailleurs. On pense aux candidats de “Koh Lanta” (TF1) devenus des vedettes comme Moundir ou plus récemment Claude. Après une sélection méticuleuse au casting, ces ‘personnages-personnes’ sont filmés dans leur quotidien pour des portraits diffusés au cours de l’émission. On y découvre leur vie de famille, leur travaille de telle sorte que le téléspectateur puisse s’identifier au candidat ou développer de l’empathie pour lui. Exemple avec Laetitia, candidate de la 22e saison de “Koh Lanta” qui a évidemment eu droit à son portrait, comme vous pouvez le voir ci-dessous.

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Des portraits qui étaient d’ailleurs proposés lors du 1er prime time de “Loft Story”, quelques minutes avant l’entrée des candidats dans la villa.

“Le personnage-personne a une fonction de personne, qui promet l’authentique, le vrai. Et cela n’existe dans aucun autre type de fiction”, ajoute Nathalie Nadaud-Albertini. Ni non plus dans “Question pour un Champion”, où Samuel Étienne se contente tout au plus de présenter la ville d’origine du candidat sa profession et sa passion.

3./ Le vote du public 

Faire voter les téléspectateurs n’est pas à proprement causer une invention de la télé-réalité. Ce processus existait déjà notamment pour l’élection de Miss France dès décembre 1986. À l’époque, cela avait été un véritable fiasco.

Cependant, la télé-réalité a largement contribué à populariser ce suffrage populaire qui permettait aux productions d’engendrer des recettes confortables tout en donnant le sentiment au téléspectateur d’avoir ce pouvoir de vie ou de mort sur les candidats.

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“Au début le programme a beaucoup inquiété, il a été perçu comme un retour à une société de cour, sous le regard constant des autres et où l’on peut tomber en disgrâce” au moindre faux pas, renchérit Nathalie Nadaud-Albertini. Qu’importe, le système passionne les téléspectateurs, certains étant prêts à faire bondir leur facture mobile pour défendre leur chouchou.

Fait intéressant, le vote par téléphone a été introduit à l’Eurovision en 2002, soit trois ans après la 1ère diffusion de “Big Brother”, programme néerlandais dont est issu le “Loft”. Un symbole de l’influence de ces émissions sur le monde de l’audiovisuel.

En France, la “Star Academy” a évidemment repris ce système de vote du public quelques mois après le “Loft”, à l’automne 2001. Puis d’autres émissions de divertissement s’en sont emparées. On pense à la “Nouvelle Star” ou plus récemment “Danse avec les Stars”.

4./ L’avènement de la “social TV”

Lorsque vous tweetez tout en regardant “Top Chef” sur M6 le mercredi, vous incarnez à merveille ce que représente la “social TV” aujourd’hui. En d’autres termes, la capacité à faire qu’une émission est suivie sur plusieurs écrans.

“Ce côté transmédia est une innovation de la télé-réalité, et est présent dès le début”, insiste Nathalie Nadaud-Albertini. Dès ‘Loft Story’, l’histoire ne se passe pas uniquement sur l’écran du téléviseur: on a des compléments sur d’autres canaux, sur Internet, sur CanalSat, où est diffusée notamment la scène de la piscine. Et même au téléphone puisqu’on pouvait suivre les conversations des candidats en direct si on appelait un certain numéro. On s’est habitué à suivre une histoire sur plusieurs médias, et pas forcément en linéaire. L’histoire rebondit d’un média sur l’autre, l’un apporte des compléments.”

Un tel essor rendu possible grâce aux développements des nouvelles technologies aux débuts des années 2000 et qui continue à s’accentuer aujourd’hui avec le prolongement des émissions sur Instagram ou Facebook dans des live, comme les débriefs de “Koh Lanta” et “Top Chef” par leur présentateur respectif, Denis Brogniart et Stéphane Rotenberg. Des séquences au cours desquels le public est invité à poser ses questions.

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À voir également sur Le HuffPost: À quoi ressemblait la télé en 2001 au lancement de “Loft Story”