C’est quoi le bordel avec Turnstile, le groupe qui bouscule le hardcore américain ?

​À l’heure où les deux volets de la saga de jeu vidéo Tony Hawk’s Pro Skater viennent d’être réédités et que les sœurs Wachowski s’apprêtent à rebooter la matrice, est-ce que le bug de l’an 2000 ne viendrait pas parasiter à nouveau notre réalité...

C’est quoi le bordel avec Turnstile, le groupe qui bouscule le hardcore américain ?

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​À l’heure où les deux volets de la saga de jeu vidéo Tony Hawk’s Pro Skater viennent d’être réédités et que les sœurs Wachowski s’apprêtent à rebooter la matrice, est-ce que le bug de l’an 2000 ne viendrait pas parasiter à nouveau notre réalité pour recréer les conditions d’existence du punk hardcore américain sur le devant de la scène ? Bien aidé par quelques éclaireurs comme Code Orange (qui s’est hissé jusqu’aux prestigieux Grammy Awards), Have Heart ou Fucked Up (qui a collaboré avec le rappeur floridien Denzel Curry), le hardcore semble, enfin, être en passe de se refaire une place sur le devant de la scène – comme à la grande époque des années 70-80. Après une décennie passée à retourner les salles de Baltimore, de Washington, D.C., et du monde, et avec la sortie de leur formidable quatrième album GLOW ON, le quintet américain Turnstile semble tout à fait prêt à incarner ce renouveau du genre. De quoi abattre les dernières barrières entre le hardcore et le monde de la pop ?

Alignement des planètes

À la faveur d’une coïncidence qui ne semble désormais plus tout à fait fortuite, la cover de Time & Space, le troisième album de Turnstile paru en 2018, partageait avec celle de l’acclamé Die Lit de Playboi Carti la même esthétique : une photo de concert en noir et blanc qui capture un frontflip sur le vif. Un parallèle d’autant plus évident que le nouveau héros du rap américain rendait un hommage non-dissimulé à une iconique photo du groupe de punk hardcore – et inspiration de Turnstile – Bad Brains. 

Derrière cet alignement des planètes qui contenait en germe l’explosion à venir, le punk hardcore pourrait retrouver ses lettres de noblesses et glaner une place, aux côtés d’un rap ultra-dominant, sur la mappemonde de la pop contemporaine.

Formé à Baltimore en 2010 par des membres de groupes de la scène hardcore émergente de Baltimore – à quelques encablures de sa voisine de D.C. – comme Angel Du$t, Mindset ou Trapped Under Ice, Turnstile cristallise à la fois la vitalité du genre dans la ville du Maryland et son désir d’ouverture. Dirigées par leur frontman Brendan Yates et leur bassiste Franz Lyons, la trajectoire et l’explosion presque programmée de Turnstile traduit cette fuite vers l’avant.

Ouverture d’esprit

Auteur d’un départ canon avec son second album, Nonstop Feeling, qui fondait la réputation de bêtes de scène que se traîne le quintet, Turnstile a, sans jamais transiger avec leur éthique hardcore, pris la tangente avec son troisième album en partie bossé avec le producteur star de Major Lazer, Diplo (M.I.A., The Weeknd, Beyoncé…). Quitte à brouiller les pistes avant leur quatrième album… La bande s’est même fendue d’un EP partagé avec le musicien électro Mall Grab, Share A View, entièrement dirigé vers les dancefloors.

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Malgré cette inclinaison pour une approche syncrétique du punk hardcore, c’est bel et bien ce genre, et pas un autre, que la formation de Baltimore entend porter jusqu’au mainstream. Contrairement à l’esthétique grunge qui semble avoir emprunté quelques chemins de traverse pour se réinventer loin du rock – exit le sympathique mais ringardisé Dave Grohl, welcome Billie Eilish et Lil Uzi Vert -, le hardcore de 2021 existe par et pour lui-même. L’heure est à conquérir les cœurs de kids, trop jeunes pour avoir connu Bad Brains, Minor Threat, Dag Nasty ou Fugazi.

Hardcore jusqu’à la mort

Avec ses deux featurings de Dev Hynes alias Blood Orange, ses sons spatialisés qui n’auraient pas dépareillés sur Random Access Memories des Daft, GLOW ON pourrait être le pas de côté de trop pour briser le plafond de verre, il n’en est rien : “Nous sommes un groupe de hardcore”, explique Brendan Yates dans une entrevue accordée à The Guardian, “la chose qui m’a attiré en 1er dans le hardcore et le punk, la chose que je pense être fondamentale, c’est que c’est un endroit pour les gens ouverts d’esprit et qui veulent défier les normes.” Dans une enquête de Billboard, l’artiste trans Connie Sgarbossa du groupe SeeYouSpaceCowboy consacrait cet ethos du hardcore : “C’est l’un des genres les plus inclusifs que vous pouvez trouver maintenant. Des genres comme le metal sont beaucoup moins progressiste que le hardcore. ça ne fait partie de leur mantra de l’être. C’est pourquoi le hardcore est si important, car c’est notre ethos d’être inclusif et progressiste.”

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Face à une jeunesse en quête de modèles plus inclusifs et de safe places pour le monde de la culture, l’avènement de Turnstile et le renouveau hardcore semble advenir de manière tout à fait organique. Derrière les réminiscences de Rage Against The Machine (riffs imparables et rythmiques latines à l’appui), la bande de Brendan Yates reconfigure aussi les idéaux politiques de celle de Morello pour entrer en écho avec l’époque.

“J’ai juré d’être hardcore/jusqu’à ma mort”, éructait Kaaris dans son classique Or Noir. Dans cette punchline plutôt convenue, c’est toute la force de frappe d’un groupe, qui entend faire de Baltimore l’épicentre du monde de demain et mettre l’ethos du punk hardcore sur le devant de la scène, qui s’incarne. Entre le groove de Franz Lyons, l’OVNI Alien Love Call avec Blood Orange, les textes cathartiques de Yates, et tous les hymnes qui le compose, GLOW ON apparaît comme un disque générationnel à même de faire ployer les frontières entre les genres, dans une euphorie qu’on espérait pour cette année 2021.

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