Colchicine contre le Covid-19: un traitement qui suscite espoirs et doutes
SCIENCE - Alors que le monde entier a les yeux rivés depuis quelques semaines sur les vaccins pour endiguer l’épidémie de Covid-19, et si un traitement bon marché se révélait être une meilleure arme pour lutter contre le coronavirus?L’Institut...
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SCIENCE - Alors que le monde entier a les yeux rivés depuis quelques semaines sur les vaccins pour endiguer l’épidémie de Covid-19, et si un traitement bon marché se révélait être une meilleure arme pour lutter contre le coronavirus?
L’Institut de cardiologie de Montréal a affirmé vendredi 22 janvier que la colchicine, un traitement de la goutte issu du colchique, réduisait les risques de forme grave de Covid-19. Dans un communiqué, les chercheurs affirment que ce médicament réduit de 21% le risque d’hospitalisation, de 50% celui de ventilation mécanique et de 44% celui de décès.
Des résultats très alléchants, surtout qu’on parle ici d’un traitement dispensable avant l’hospitalisation, mais à prendre avec de multiples pincettes. En effet, le détail des travaux n’est pas connu et ce médicament peut avoir des effets indésirables graves (notamment en cas de surdosage) et ne doit surtout pas être pris en automédication.
Un essai clinique obscur
En théorie, les résultats de l’Institut de cardiologie de Montréal sont encourageants. Ils proviennent d’un essai clinique lancé en mars. 4488 personnes atteintes du Covid-19 y ont participé. Une partie a pris de la colchicine en traitement, l’autre un placebo, un faux médicament sans aucun effet. Cet essai a été réalisé en double-aveugle (ni les médecins ni les patients ne savent qui a pris quoi), le meilleur standard pour vérifier l’efficacité d’un médicament ou un vaccin vis-à-vis d’une maladie.
Sauf qu’en dehors d’un communiqué de presse, aucune donnée scientifique n’est disponible. C’est un problème, car des affirmations aussi fortes doivent pouvoir être vérifiées en détail par la communauté scientifique. Surtout, certains éléments distillés laissent planer le doute sur l’efficacité réelle de la colchicine, rapportent de nombreux chercheurs.
“Les résultats ne sont pas statistiquement significatifs et le résultat primaire n’a pas été atteint. L’exclusion de 329 participants est préoccupante”, explique sur Twitter, le docteur Gaetan Burgio. En effet, le communiqué précise que les résultats “approchent la signification statistique”.
En clair, pour s’assurer que la colchicine est efficace, on cherche à savoir si en prenant ce médicament, on survit mieux que par simple hasard, notamment en comparant le résultat avec un placebo. Plus la différence est importante, plus il y a de chance que le traitement ait une vraie efficacité. Mais plus l’écart est faible (ou plus l’échantillon de personnes testées est petit), plus l’effet du hasard peut faire illusion.
Dans le communiqué, l’Institut de cardiologie de Montréal précise qu’en ne prenant en compte que “les patients où le diagnostic Covid-19 a été prouvé par un test PCR”, le résultat est alors significatif. Ce qui veut dire que pour que cela marche, il a fallu exclure 329 patients. Le communiqué ne précise pas pourquoi ni comment. Des détails qui mettent la puce à l’oreille des chercheurs, qui préfèrent voir les données détaillées avant de juger.
Un surdosage très dangereux
“Cela pourrait être une véritable découverte, et si c’est le cas, ce serait formidable. Mais ce communiqué de presse ne nous amène pas jusque-là”, explique à Statnews Ashish Jha, doyen de la Brown University School of Public Health.
Nathan Peiffer-Smadja, chef de clinique infectiologie à l’Hôpital Bichat, fait le même constat et rappelle sur Twitter que la colchicine n’est pas sans conséquence: “La fenêtre thérapeutique de cette molécule est très étroite, c’est-à-dire que la différence entre une dose correcte et une dose toxique est extrêmement faible. L’intoxication à la colchicine est fréquemment mortelle”.
Le toxicologue Steve Aks précise que “la colchicine est un super médicament, mais il y a des risques importants”. En 2010, il a publié une étude référente à ce sujet. En clair: le bénéfice-risque doit être mesuré par des médecins et il ne faut surtout jamais tenter de se soigner tout seul avec de la colchicine.
Pour l’instant donc, si ce communiqué est encourageant, il ne faut pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué. D’autres médicaments prometteurs, comme l’hydroxychloroquine, le tocilizumab ou le remdesivir, se sont avérés inefficaces contre le Covid-19. Mais la colchicine pourrait être une bonne surprise, comme le fut la dexamethasone, un des seuls médicaments avec un effet bénéfique face au coronavirus.
Les jours et semaines à venir devraient permettre d’y voir plus clair. D’abord, il est probable que l’Institut de cardiologie de Montréal dévoile le détail de l’étude. De plus, un des plus grands essais cliniques testant les médicaments face au Covid-19, Recovery (université d’Oxford), a également commencé à tester la colchicine depuis le mois de novembre. Début janvier, 2200 patients étaient déjà traités avec de la colchicine dans le cadre de Recovery, qui a déjà démontré l’efficacité de la dexamethasone et l’absence de résultat pour l’azithromycine, l’hydroxychloroquine et le combiné lopinavir-ritonavir.
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