Comment la Covid-19 a affecté le choix d’orientation des élèves - BLOG
ÉDUCATION - La dernière année du lycée marque la fin de l’enseignement secondaire et les résultats du baccalauréat s’inscrivent aujourd’hui encore comme un rituel de passage vers la vie d’adulte. C’est pour beaucoup de jeunes, le moment où...
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ÉDUCATION - La dernière année du lycée marque la fin de l’enseignement secondaire et les résultats du baccalauréat s’inscrivent aujourd’hui encore comme un rituel de passage vers la vie d’adulte. C’est pour beaucoup de jeunes, le moment où l’on quitte le domicile familial, où l’on rencontre une nouvelle ville et où l’on tisse de nouvelles amitiés. Mais, cette année, les incertitudes liées à la crise sanitaire sont venues s’ajouter à l’inquiétude toujours plus grande de disposer du bon diplôme, de faire LE bon choix pour s’insérer au mieux sur le marché du travail et l’étape de l’orientation est devenue plus délicate.
“Cette année, on va pas arrêter de vous causer de Parcoursup”
Alors que l’orientation est travaillée tout au long du parcours scolaire, l’année de terminale est une année décisive. Dès la rentrée, présentations à peine faites, les élèves sont assaillis par les dates de la procédure sur Parcoursup qui rythmera leur année: recherche des formations disponibles; inscription; formulation des vœux; constitution des projets motivés — l’équivalent des lettres de motivation —; confirmation des vœux; phase d’admission principale puis complémentaire. Si c’est une étape autant attendue que redoutée pour les élèves, ce charabia est pour beaucoup incompréhensible. D’autant que la rentrée en présentiel signe pour la plupart d’entre eux la fin de plusieurs mois d’école à distance et d’isolement.
Bien que le calendrier de Parcoursup n’ait pas été modifié, cette année scolaire a largement été marquée par la crise sanitaire et par son lot d’ajustements continuels: demi-jauge dans les établissements, fermeture de certaines classes, conseils de classe en comité restreint, protocoles sanitaires mouvant au gré de l’évolution de la situation épidémique et des décisions du ministre de l’Éducation nationale et enfin, fermeture des établissements durant quatre semaines. Difficile pour ces futurs étudiants de s’engager pleinement dans leurs apprentissages et de poursuivre sereinement leur réflexion sur leur orientation quand des réorganisations successives planent au-dessus d’eux comme une épée de Damoclès.
Des lycéens inquiets face au nouveau bac
À ce stress, viennent s’ajouter les questionnements sur la mise en place du nouveau bac que les élèves de terminale expérimentent pour la 1ère fois. Marquant la fin des filières S-ES-L, le “bac Blanquer” s’organise autour des spécialités choisies par les élèves, dont les épreuves prévues initialement mi-mars comptent pour un tiers de la note finale et qui pèsent lourd dans le dossier de Parcoursup. Les élèves le savent: la procédure de sélection s’appuie d’abord sur l’examen du dossier scolaire, autrement dit sur les notes qu’ils amassent au cours de l’année. Qu’importe l’évolution de la crise, il faut tenir le rythme soutenu, avaler les connaissances, avancer dans le brouillard, se préparer aux épreuves, et ce malgré les écarts de niveaux qui se sont creusés à la suite de la période de confinement.
L’orientation au milieu de tout cela
Dans un contexte sanitaire et économique en crise, quelle voie professionnelle choisir? Quels métiers recruteront demain? Vaut-il mieux s’engager dans un BTS où les cours sont dispensés en présentiel qu’à la fac? Quelles sont les formations gratuites? Ce sont autant de questions que les élèves posent alors que la situation invite difficilement à se projeter dans le futur qui semble embué par le covid-19 et qui a plongé de nombreux étudiants dans la pauvreté et la précarité. Selon une enquête de l’Observatoire de la Vie Etudiante réalisée au printemps 2019, la 1ère source d’information des jeunes était internet (31%), suivie des journées portes ouvertes (14%), les enseignants (9%) puis les parents (7%) et les conseillers d’orientation (6%). Plus d’un étudiant sur deux s’est rendu dans une université avec son entrée dans le supérieur. Cette année, impossible de les inviter à s’y déplacer.
Depuis la loi relative à l’orientation et à la réussite des étudiants (Loi ORE) de 2018, c’est aussi aux professeurs principaux que revient le rôle crucial de l’orientation des élèves, transformant leur pratique professionnelle et venant s’ajouter à leur objectif de transmission des savoirs. Pourtant, d’après un rapport de la Cour des comptes publié en février 2020, 85% des professeurs principaux interrogés déclarent n’avoir reçu aucune formation spécifique pour exercer cette mission d’orientation, 24% estiment que l’orientation ne fait pas partie de leurs prérogatives et un certain nombre d’entre eux considèrent que cette tâche revient aux psychologues de l’éducation nationale jouant le rôle d’“urgentiste”. La multiplication de la fermeture des Centres d’Informations et d’Orientation (CIO), services publics permettant aux jeunes de se documenter sur les formations n’arrange pas la donne. Même si tous les établissements ne sont pas logés à la même enseigne, je fais partie de ceux qui, chanceux.se. s, disposent de 54 heures annuelles dédiées à l’orientation des élèves. Mais, travailler l’orientation des élèves, c’est bien souvent se retrouver devant une trentaine d’élèves au parcours et au projet d’orientation disparate qu’il faut prendre le temps d’écouter, de rassurer et de motiver. Tisser une relation de confiance est une tâche d’autant plus ardue cette année que de nombreux élèves ne sont présents que la moitié du temps dans le lycée.
“Mon père, il pense que c’est pas une bonne idée que je parte en classe prépa”
Devant le flou qui entoure la rentrée prochaine et la pression d’avoir à faire face à un marché du travail en crise, délicat de se repérer dans les méandres des 17. 000 formations que propose la plateforme Parcoursup. Cette projection difficile amène les futurs étudiants à remanier leur perspective d’orientation. Certains d’entre eux se sont détournés de l’université où les cours en lignes restent pour l’instant majoritaires pour s’orienter vers des filières où ils ont été maintenus en présentiel comme les BTS. D’autres, brillants, s’autocensurent et se détournent des classes préparatoires aux grandes écoles pour des filières plus professionnalisantes. Selon une enquête réalisée par l’IFOP au printemps 2020, auprès de 250 lycéens et 752 étudiants, un futur bachelier sur quatre affirme que la crise a eu des conséquences sur ses choix d’orientation. Le critère économique est aussi déterminant puisque 65% d’entre eux déclarent opter pour une formation moins onéreuse.
Face à l’angoisse du mauvais choix et lorsque les liens avec les interlocuteurs traditionnels sont mis à mal, les élèves se tournent alors vers leur famille, une aide largement inégalitaire puisque toutes n’ont pas les mêmes capacités pour aider leurs enfants. La compréhension et la maîtrise des informations dépendent fortement du milieu social d’origine comme le souligne Agnès van Zanten, directrice de recherche au CNRS dans une intervention au journal Le Monde: “Quand ils [les parents] sont issus des catégories professionnelles les plus aisées, ils sont armés pour apporter à leurs enfants des conseils efficaces en matière d’orientation. Non seulement parce qu’ils ont fréquenté eux-mêmes l’enseignement supérieur, mais aussi parce qu’ils savent où trouver l’information: ils arpentent les salons, se renseignent sur internet, épluchent les classements des écoles, interrogent leur entourage…”. L’inverse est vrai pour les parents de milieux moins favorisés qui se repèrent plus difficilement dans les filières notamment les plus exigeantes. Adoptant la carte de la sécurité, ces familles préfèrent que leurs enfants s’insèrent rapidement dans le monde professionnel en s’orientant vers des filières courtes et concrètes. Une stratégie qui semble amplifiée par la crise économique et qui ne facilite pas les perspectives d’embauches pour les jeunes.
Orienter les élèves est un processus complexe, d’autant plus cette année. J’aurai envoyé des e-mails, construit des PowerPoint sur l’orientation, rassuré les moins audacieux, incité les élèves à être acteur et non passif de leur choix. Mais, c’est pour beaucoup celui de la prudence qui s’est imposée.
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