Comment Valérie Pécresse se met en scène pour renaître grâce à l'international
POLITIQUE - La guerre d’images ne se joue pas qu’entre la Russie et l’Ukraine. En France, Valérie Pécresse tente de se mettre en scène en s’appuyant sur ce conflit européen pour se donner une stature présidentiable. Le temps presse: à un mois...
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POLITIQUE - La guerre d’images ne se joue pas qu’entre la Russie et l’Ukraine. En France, Valérie Pécresse tente de se mettre en scène en s’appuyant sur ce conflit européen pour se donner une stature présidentiable. Le temps presse: à un mois du 1er tour, la candidate LR baisse de manière régulière dans les sondages.
Ce jeudi 10 mars, Valérie Pécresse doit recevoir à déjeuner au siège de son parti une flopée de responsables européens. La plupart sont membres du Parti populaire européen (PPE), qui regroupe les différentes sensibilités de droite au causement. Selon les confidences de LR à franceinfo, huit dirigeants ou chefs d’État sont attendus, ainsi que les présidentes de la Commission et du Parlement européen Ursula von Der Leyen et Roberta Metsola. L’évènement, organisé par le parti Les Républicains, n’apparait cependant pas dans l’agenda de la candidate.
Ce “sommet du PPE” se déroulera quelques heures avant celui prévu à Versailles dans le cadre de la présidence française de l’UE. Les deux évènements ont été organisés avant le début de l’invasion russe de l’Ukraine. Mais dans le prisme de l’actualité internationale, Valérie Pécresse pourrait aussi essayer de s’en servir pour renforcer son image rêvée de cheffe d’État.
Pécresse, la candidate “raisonnable”
Au début de sa campagne en décembre, Valérie Pécresse était donnée proche du second tour de la présidentielle. Quatre mois plus tard, la voilà 5e dans un sondage Elabe pour BFMTV paru le 8 mars. La représentante de la droite, à 10,5%, est devancée de 2,5 points par le chef de la France Insoumise Jean-Luc Mélenchon, troisième homme du match selon cette enquête.
Sur BFMTV mercredi 9 mars, la championne de la droite a relativisé ces mauvais chiffres. “Les thématiques qui sont les miennes (...) sont en train de passer au second plan”, explique-t-elle. “Un certain nombre d’électeurs de droite veulent essentiellement que cette guerre soit stoppée et c’est leur déterminant aujourd’hui. Mais on a encore 4 semaines de campagne.” Pas question de remiser le programme au placard donc, mais puisque l’actualité rebat les cartes, autant s’en servir.
À la faveur de la guerre en Ukraine, la candidate LR à la présidentielle est présentée par son camp comme la seule “raisonnable” sur les questions internationales. À l’opposé d’Éric Zemmour, Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon, ses principaux adversaires, “discrédités” par leurs propos antérieurs sur la Russie et Vladimir Poutine. “Il n’y a de la place que pour deux candidats, Macron et Pécresse”, résume Jean-François Copé dans Le Monde.
“Je suis évidemment en responsabilité parce qu’il y a plusieurs attitudes face à cette guerre: une attitude gaulliste qui consiste à défendre la liberté des peuples et la démocratie (...) et puis il y a une autre attitude (...) qui consiste à être en soutien de Vladimir Poutine et à avoir une autre stratégie que celle d’Emmanuel Macron”, déclare Valérie Pécresse. Tradition de la droite, qui assume une “opposition digne” en temps de guerre.
pic.twitter.com/imosg6hbPH
— Gérard Longuet (@gerardlonguet55) March 7, 2022
Conseil de défense au QG de campagne
Valérie Pécresse s’est permis quelques critiques (minimes) sur la gestion de crise du président de la République. Mais ce n’est pas sa stratégie. Pour elle, il ne s’agit pas tant de donner l’impression qu’Emmanuel Macron agit mal sur l’Ukraine (d’ailleurs, l’opinion publique lui est favorable), que de montrer qu’elle aussi peut le faire.
Ainsi, puisque le président de la République a son Conseil stratégique de défense, qu’à cela ne tienne, elle aussi peut convoquer le sien. C’est chose faite le 28 février, quatre jours après l’invasion russe. Devant une table recouverte d’une nappe blanche, Valérie Pécresse est entourée d’Hervé Morin (ancien ministre de la Défense), Michèle Alliot-Marie (Affaires étrangères et Défense), Gérard Longuet (Défense) ainsi que plusieurs causementaires spécialistes de ces questions. Les journalistes, bienvenus au début, ont ensuite été priés de partir: un conseil de défense se tient à huis clos à l’Élysée, il en sera de même dans un QG de campagne. Ce n’est qu’ensuite que Valérie Pécresse prendra la parole, à peu près comme Gabriel Attal à la sortie du Conseil des ministres.
Le shadow conseil de défense de Pécresse c’est quand même Morin et son débarquement en Normandie, Longuet ancien d’Occident et ses bras d’honneur racistes, Alliot-Marie qui volait au secours du dictateur tunisien Ben Ali.
— Guillaume Blardone (@gblardone) February 28, 2022
La Grande Vadrouille a coté ce sont les Avengers pic.twitter.com/dj9wmijIoW
Dans Le Figaro avant la rencontre, son entourage espérait que la mise en scène “permettrait à la candidate de prouver qu’elle est entourée et crédible”. C’est raté: l’image est sévèrement jugée. Dans Le Monde, un proche de la campagne évoque sans pitié une“réunion d’autonomistes bretons ou corses”.
Le sommet du PPE pourrait être l’occasion de rattraper ce 1er échec. “La photo peut être belle”, anticipe l’un de ses soutiens auprès de franceinfo. Valérie Pécresse pourra aussi en profiter pour montrer l’image d’une droite européenne qui la soutient, comme l’assure un ténor du parti à franceinfo, dans un moment où Emmanuel Macron endosse pleinement son costume de président du Conseil de l’UE, tout en étant candidat à sa réélection.
La “dame de faire” veut exister
À l’opposé de la “diplomatie de coup de fil” d’Emmanuel Macron, Valérie Pécresse mise sur son image de “dame de faire”. “Je suis une faiseuse”, martelait-elle lors de son meeting au Zénith. Et pour “faire”, il faut les moyens. Le 4 mars, lors d’un discours moins fastueux que prévu, elle a décliné son programme pour la défense dont la principale mesure vise à porter le budget au-delà de 2% du PIB à 65 milliards d’euros en 2030, davantage que la loi de programmation militaire actuelle.
La stratégie de Valérie Pécresse n’est pas sans risque. Son Conseil de défense a été plutôt mal reçu et ni la candidate ni les ténors n’ont partagé sur leurs réseaux de photos de l’évènement. Le 7 mars, Michèle Alliot-Marie, pourtant présente au Conseil, a refusé de confirmer qu’elle voterait Pécresse au 1er tour.
Se pose aussi la question de l’utilité d’une telle mise en scène, alors que la candidate à la présidentielle n’a pas accès aux évolutions en temps réel et à toutes les informations. Tandis qu’Emmanuel Macron échange au téléphone avec Vladimir Poutine et reçoit à Versailles, elle doit se contenter des réseaux sociaux pour faire entendre sa vision. Le sommet du PPE annoncé pour jeudi n’est pas non plus gagné d’avance: selon franceinfo, deux jours avant l’évènement, la question se posait encore de savoir si Valérie Pécresse serait oui on non intégrée à la photo de famille.
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