Covid-19 à l'école: ces enseignants du 93 pris en étau face à la difficulté de faire cours

ÉDUCATION - Entre sentiment d’abandon, colère et angoisses, trois professeurs issus des syndicats Sud éducation 93, CGT Action 93 et SNUIPP 93 ont décrit au HuffPost ce que c’est d’enseigner dans le département le plus pauvre et le plus touché...

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ÉDUCATION - Entre sentiment d’abandon, colère et angoisses, trois professeurs issus des syndicats Sud éducation 93, CGT Action 93 et SNUIPP 93 ont décrit au HuffPost ce que c’est d’enseigner dans le département le plus pauvre et le plus touché par l’épidémie de Covid-19. 

Malgré les difficultés à faire respecter le protocole sanitaire instauré par le ministère de l’Éducation nationale en collaboration avec l’ARS (Agence régionale de santé), la multiplication de cas contacts et de contaminations dans les écoles, collèges et lycées de la Seine-Saint-Denis, ces professeurs veulent continuer à faire cours... mais pas à tout prix, comme vous pouvez le constater dans notre vidéo en tête d’article

Le primaire se transforme en garderie 

Si le cas du lycée Eugène Delacroix à Drancy, qui a beaucoup fait causer de lui avec 35 cas positifs enregistrés en une semaine et la fermeture de 22 classes, est un cas extrême, il n’est pas isolé. Professeure des écoles à Pierrefitte-sur-Seine, Caroline Marchand a vu son école se transformer “en garderie”.

“Les écoles restent ouvertes mais elles le restent pour faire de l’accueil, de la garderie.(...) Quand on arrive à une situation extrême comme celle qu’on a connue il y a une semaine, où tous les enseignants étaient en éviction, donc plus d’enseignants dans l’école... Sur six enseignants, on en a remplacé deux.” 

Caroline Marchand dénonce le manque de moyens humains et techniques dans un département où l’éducation était déjà en souffrance avant la crise sanitaire, un protocole qui n’est pas adapté aux différentes réalités de la Seine-Saint-Denis et qui compliquent le respect de ces règles. La co-secrétaire départementale du SNUIPP 93 décrit en effet des salles que l’on ne peut pas aérer parce qu’elles n’ont pas de fenêtres et des professeurs contraints de venir avec leur propre stock de gel hydroalcoolique. 

Priorité à la santé

À Aulnay-sous-Bois, Basile Ackermann, également professeur des écoles, s’inquiète, lui, pour la santé de ses collègues, des élèves et de leurs parents. Continuer à enseigner n’est plus une priorité. “Nous ce qu’on demande au niveau de la CGT éducation 93, c’est la fermeture des établissements où il y a des cas reconnus de Covid-19, que ce soit chez les personnels, les enseignants et les élèves”, explique-t-il. “La santé des élèves, de leur famille et des personnels est indispensable parce qu’on ne pourra pas assurer une continuité pédagogique si on a des enseignants malades. Les élèves ne seront pas en condition de suivre s’ils sont malades ou s’il y a des malades au sein de leur foyer”, défend l’enseignant joint par visioconférence. 

Du côté de la FCPE (fédération des parents d’élèves), il s’agit plutôt d’organiser la fermeture des classes en assurant un passage efficace au cours en distanciel. Denis Le Meur, secrétaire général de la FCPE 93 préfère qu’on multiplie les tests de dépistages tant que les plateformes dédiées aux devoirs et aux cours ne fonctionneront pas correctement. Parent d’élève au Lycée Eugène Delacroix à Drancy, il a participé à la mise en place d’un dépistage massif au sein du lycée le lundi 29 mars. Il déplore que ce type d’évènement n’ait pas eu lieu plus tôt dans les établissements du 93 parce qu’ils sont un moyen de garantir la continuité des cours. 

Rester ouvert... en attendant mieux 

“Nous ne sommes pas pour les fermetures des établissements pour la simple et bonne raison que, depuis un an, la continuité pédagogique n’existe pas ou très peu dans les lycées. Le constat est là: tant qu’on n’aura pas un dispositif de cours en distanciel sérieux, il est quand même préférable que les enfants continuent à aller en cours. On n’est pas du tout satisfait par les moyens mis en place par le gouvernement”, déplore Denis Le Meur. 

Pour François Malloux, professeur de mathématiques à Montreuil et permanent du syndicat Sud Éducation, le constat est le même. Le département manque de tout: de matériel pour donner des cours à distance mais aussi de quoi se protéger contre le virus. Malgré cela, il affirme avec son syndicat qu’il faut continuer à enseigner en respectant les protocoles mis en place en novembre dernier, notamment avec la possibilité de tester les élèves, leurs professeurs et le personnel deux fois par semaine. 

“On nous dit qu’on nous a proposé 300.000 tests mais entre ceux proposés et ceux qui sont effectués, on tombe à 200.000. Le gouvernement joue sur les mots. Et par ailleurs cela reste largement insuffisant car il y a 12 millions d’élèves et près d’un million de professeurs et de personnels. Il y a toujours une différence entre les promesses du gouvernement et ce qui est fait. On attend toujours d’être vacciné. Aucune des promesses de protection n’a été mise en oeuvre.” 

Courir derrière le virus 

Critiqué pour sa difficulté à anticiper et le manque de moyens fournis aux professionnels de l’éducation, le ministère de l’Éducation a expliqué être tributaire des progrès de la science sur le coronavirus. “Tout part de la recherche et de ce qu’elle nous dit. Et elle court elle-même après ce virus. À partir de là, nous sommes tributaires de ce qu’ils nous disent et de ce que l’on peut faire ou pas”, explique un porte-parole du ministère joint par téléphone. 

“Par exemple pour les tests salivaires qu’on a déployés dans les écoles, il a fallu tout d’abord les inventer, puis inventer un réactif qui voit le virus et ses variants, le faire valider par la haute autorité de santé qui assure qu’il est suffisamment fiable pour que le test soit enfin déployé, et ensuite il faut que le matériel suive. Les décisions ne sont jamais unilatérales. On espère pouvoir déployer des autotests dans plusieurs semaines”, précise la même source. 

Quant au manque de moyens, le ministère de l’Éducation se défend en évoquant une prime informatique de 150 euros par an alloués aux enseignants. “C’est la 1ère fois qu’on en crée une. Évidemment cela paraît peu mais elle est reconduite tous les ans et concerne plus de 800.000 personnes. Et on a la chance de pouvoir le faire en France, ce qui n’est pas toujours le cas dans les autres pays”, précise le ministère. 

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