Covid-19: des courbes et cartes pour comprendre le flou sur la situation épidémique en France

SCIENCE - Dans le brouillard. C’est certainement ce qui définit le mieux la situation sanitaire en France ce jeudi 7 janvier, à quelques heures de l’intervention de Jean Castex. Le Premier ministre doit faire le point sur la stratégie vaccinale,...

Covid-19: des courbes et cartes pour comprendre le flou sur la situation épidémique en France

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SCIENCE - Dans le brouillard. C’est certainement ce qui définit le mieux la situation sanitaire en France ce jeudi 7 janvier, à quelques heures de l’intervention de Jean Castex. Le Premier ministre doit faire le point sur la stratégie vaccinale, dont la lenteur est décriée alors même que la campagne vient à peine de commencer. Il doit également se prononcer sur l’allègement ou l’amplification des mesures visant à endiguer l’épidémie de Covid-19.

Les lieux de culture et les restaurants pourront-ils rouvrir en janvier? Le couvre-feu à 18 heures va-t-il s’étendre? Faut-il même imaginer un reconfinement total et strict comme au Royaume-Uni? Les questions sanitaires liées au coronavirus ne sont jamais faciles à trancher, mais la situation particulière de ce début d’année 2021 rend l’exercice encore plus périlleux.

L’hiver et la chute des températures font évidemment craindre un regain épidémique. L’émergence de nouveaux variants qui pourraient être plus transmissibles fait de son côté redouter une hausse des contaminations malgré des mesures plus strictes. Et le pire, c’est que notre vue est temporairement brouillée.

Nous sommes en partie aveugles face à ces variants par manque de moyens dans le séquençage des génomes du Sars-Cov2, et nous voyons flous concernant la trajectoire de l’épidémie. Car les indicateurs permettant de suivre l’évolution du coronavirus en France, si utiles pour tenter d’anticiper une hausse ou une baisse, sont à prendre avec des pincettes en ce début janvier. Pour mieux comprendre, Le HuffPost vous propose de commenter l’évolution récente de l’épidémie avec plusieurs cartes et graphiques interactifs.

Les courbes globales de l’épidémie en France

Plusieurs indicateurs sont suivis par le gouvernement, les chercheurs et les autorités sanitaires pour suivre l’évolution du coronavirus en France. Les courbes ci-dessous, mises à jour en temps réel grâce aux chiffres de la Direction générale de la santé, permettent d’y voir plus clair.

Voici une description des principaux indicateurs suivis:

  • Taux d’incidence: c’est le nombre de cas détectés pour 100.000 habitants. Il est très utile, car il donne un état des lieux de l’épidémie en quasi-temps réel (quelques jours de décalage pour l’apparition des symptômes, voire avant leur apparition pour les cas contacts). Mais il est dépendant des capacités de dépistage.
  • Taux de positivité: c’est le nombre de tests positifs par rapport aux tests totaux effectués. Il permet de “contrôler” le taux d’incidence. S’il y a beaucoup de cas dans un territoire (taux d’incidence), mais que cela est uniquement dû à un dépistage très développé, le taux de positivité sera faible. À l’inverse, s’il augmente, cela veut dire qu’une part plus importante des gens testés sont positifs, mais surtout que les personnes contaminées qui ne sont pas testées, qui passent entre les mailles du filet, sont potentiellement plus nombreuses.
  • Taux d’occupation des lits de réanimation par des patients Covid-19: C’est un chiffre scruté, car il permet de savoir si les hôpitaux sont capables de gérer l’afflux de patients. Il est très utile, car il y a peu de risque de biais: il ne dépend pas du dépistage et les occupations de lits sont bien remontées aux autorités. Son désavantage: il y a un délai important entre la contamination et le passage en réanimation, d’environ deux à trois semaines. 
  • Décès à l’hôpital: Comme les réanimations, c’est un indicateur plutôt fiable, mais avec un délai important.

On remarque sur ces divers graphiques qu’un pic a été atteint en novembre, et ce pour tous les indicateurs. L’effet combiné des diverses mesures prises (confinement, couvre-feu, etc), mais aussi des changements de comportements des Français. 

Pour autant, on voit également que la baisse s’est transformée en stagnation, voire en début de hausse. C’est tout le problème. Sur les deux graphiques ci-dessous, on voit que si le nombre de lits de réanimations occupés est descendu sous le seuil permettant le déconfinement (3000), il stagne depuis. Le taux d’incidence, lui, évolue bizarrement. Après une stagnation début décembre, il a commencé à grimper doucement, avant de s’écrouler fin décembre, puis de remonter.

Ces perturbations sont dues aux fêtes de fin d’année, qui ont totalement brouillé les indicateurs, comme au Canada et aux États-Unis au moment de Thanksgiving un mois plus tôt. Logique: les Français se sont faits tester massivement (voire le taux de positivité sur le graphique global ci-dessus, qui a chuté lors des fêtes) en prévision de Noël et du Nouvel an.

Une fois cette vision globale comprise, comment savoir où l’on en est? Ce qui est certain, c’est que la période actuelle est très compliquée à analyser. Mais une hausse de l’incidence sera, quoi qu’il arrive, une mauvaise nouvelle, rappelle à L’Express le président du Conseil scientifique: “Si à la fin de la semaine, nous constatons une augmentation du nombre des contaminations alors qu’en théorie les gens se font moins tester maintenant que la période des fêtes est terminée, ce sera significatif”.

Il peut également être utile d’aller plus dans le détail, au niveau local, pour comprendre ce qu’il se passe. 

Carte du taux d’incidence et de positivité par département

Ces deux indicateurs sont intéressants pour suivre l’épidémie. Surtout le taux d’incidence. Logique: il permet, si le dépistage est massif, rapide et bien effectué, de voir l’impact de mesures de restrictions sur l’évolution de l’épidémie presque en temps réel. Car théoriquement, on se fait tester soit après quelques jours de symptômes, et même avant si l’on est cas contact.

Mais seul, ce baromètre peut être trompeur. Le taux de positivité permet de limiter les biais. C’est pour cela que nous avons choisi de créer une carte de France basée sur le taux d’incidence et de positivité. Chaque département est coloré en fonction de l’évolution de ces indicateurs. La première carte (bouton “tendances”) permet de voir l’évolution dans le temps du taux d’incidence et de positivité. En clair, de savoir si la situation s’améliore ou se détériore dans chaque département.

Comme ces taux dépendent des remontées du dépistage, nous avons choisi de mettre en avant uniquement les baisses et hausses des deux taux pendant plus d’une semaine. 

On voit que la circulation du virus est encore très importante. Surtout, dans la quasi totalité des départements, les indicateurs sont à la hausse, alors qu’ils étaient en baisse pendant tout le mois de novembre. Ce qui pourrait être logique pour le taux de positivité, qui a fortement chuté lors des fêtes. Le problème, c’est que l’incidence continue de monter doucement également.

La seconde carte (bouton “indice global”) montre l’état d’un département par rapport aux seuils de vigilance et d’alerte mis au point par le gouvernement lors du déconfinement en mai dernier. Par rapport à la seconde vague, une grande partie des départements ne sont plus au-delà des deux seuils d’alerte. Mais on voit que la situation reste compliquée dans une majorité de départements.

Pour des raisons techniques, les territoires ultramarins ne sont pas visibles, mais sont accessibles dans le moteur de recherche en haut à gauche. Cette carte se met à jour automatiquement dès que Santé publique France actualise les données mises en ligne sur data.gouv.fr (de manière quasi quotidienne).

Courbes du taux d’incidence et de positivité par département

Si la carte ci-dessus est utile pour voir la situation actuelle et la tendance globale par département, il peut être également utile de regarder plus en détail l’évolution dans un département précis. C’est justement ce type d’évolution qui est scrutée par les autorités pour prendre des mesures locales, comme l’avancée du couvre-feu à 18h.

Nous avons donc mis au point un graphique permettant de comparer l’évolution du taux d’incidence et de positivité dans le temps, par départements. On y voit la deuxième vague, la décrue, puis l’apparition d’un plateau se transformant parfois en hausse plus ou moins prononcée. Depuis la fin décembre, deux départements notamment voient leur taux d’incidence et de positivité augmenter fortement, les Alpes-de-Haute-Provence et les Deux-Sèvres.

Mais il faut se garder de tirer des conclusions hâtives. Pendant le mois de septembre par exemple, plusieurs baisses ont été observées en Gironde, dans les Bouches-du-Rhône ou à Paris avant de voir l’épidémie repartir avec encore plus de force.

Cela incite donc à la prudence quant à la lecture de ces chiffres récents. Tout “pic” ou changement récent doit se prolonger pendant au moins une ou deux semaines pour en conclure avec certitude que la situation évolue réellement dans un sens nouveau. Et, surtout, ces informations provenant du dépistage doivent se corréler avec d’autres éléments.

L’évolution dans 22 grandes villes de l’incidence

Toujours sur ces indicateurs rapides mais pas assez fiables, les grandes villes sont scrutées de près, notamment les 22 métropoles représentées ci-dessous, où, du fait de la densité de la population, le risque de transmission du coronavirus est important.

Voici, ci-dessous, l’évolution de ce taux dans les 22 grandes villes françaises depuis le 26 septembre (limite des données disponibles). Plus la case est rouge, plus l’incidence est élevée et donc plus il y a de cas positifs de Covid-19. 

Il est également possible sur ce graphique de surveiller l’évolution du taux d’incidence chez les personnes âgées de plus de 65 ans, autre indicateur particulièrement surveillé par le gouvernement et le Conseil scientifique. À raison: on sait que l’âge est le principal facteur de risque avec le coronavirus.

Pour aller plus loin ou regarder plus en détail l’évolution d’une des 22 métropoles françaises suivies par Santé publique France, vous pouvez utiliser le graphique ci-dessous en tapant le nom d’une grande ville.

Carte des réanimations par département

L’un des indicateurs les plus stables est le nombre de personnes qui entrent en réanimation. C’est également celui que suit avec attention le gouvernement, car le taux d’occupation de ces lits est primordial: il faut éviter une saturation qui, en plus des morts provoqués par le Covid-19, engendrerait des conséquences en cascade sur le reste du système de santé.

La carte ci-dessous résume la tendance en termes de nombre de lits en réanimation occupés par des patients Covid-19, sur les 7 et 14 derniers jours.

Courbes des réanimations et hospitalisations par départements

Le principal inconvénient de cet indicateur, c’est qu’il y a un gros décalage temporel. “Pour les cas sévères, on a estimé qu’il se passe environ deux semaines entre l’infection et l’admission en réanimation. Donc l’impact d’une mesure contraignante ne sera visible que 14 jours après”, explique au HuffPost Samuel Alizon, directeur de Recherche au CNRS, spécialiste de la modélisation des maladies infectieuses.

Afin de pouvoir suivre cette évolution justement, voici un graphique permettant de voir le nombre de personnes hospitalisées ou en réanimation pour cause de coronavirus, dans chaque département.

On voit ici que ces courbes suivent généralement celle du taux d’incidence avec deux à trois semaines de décalage, notamment dans les départements les plus touchés.

Décès en hôpital liés au Covid-19 par département

Enfin, le dernier indicateur est le plus tragique: l’évolution du nombre de morts causés par le coronavirus. Ici ne sont répertoriés que les décès enregistrés à l’hôpital. Les chiffres plus globaux (excès de mortalité de l’Insee, remontées des Ehpad ou des certifications électroniques, etc.) sont communiqués de manière plus sporadique.

Ce graphique ne permet donc pas de dire le nombre total de décès en France à un instant T, mais plutôt, comme les autres, de voir l’évolution de l’épidémie. Comme pour les réanimations, il existe entre l’évolution actuelle de l’épidémie et l’impact sur la courbe des décès un délai d’environ deux ou trois semaines.

Évidemment, ce que l’on souhaite, c’est que toutes ces courbes soient dirigées vers le bas, et ce de manière durable. Or, après une période de chute vertigineuse (qui a même surpris les épidémiologistes, car le second confinement était moins strict que le précédent), les indicateurs marquent le pas. Et l’hiver couplé aux fêtes de fin d’année et au risque de variants plus contagieux ne présage rien de bon. Reste à espérer que la fermeture des écoles et la hausse massive des tests en fin d’année auront eu un effet positif. Réponse dans quelques jours.

À voir également sur Le HuffPost: Ce graphique commenté rappelle comment le Covid-19 a écrasé toute la planète en 2020