Covid-19: Le gouvernement peine à trouver la solution à l'érosion du télétravail

POLITIQUE - Un tour de vis dans le vide? Depuis que le Premier ministre a annoncé, le vendredi 29 janvier, le choix du gouvernement de ne pas reconfiner les Français pour l’instant, Élisabeth Borne pousse entreprises et partenaires sociaux...

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Le gouvernement peine à trouver la solution à l'érosion du télétravail (photo d'illustration prise le 14 mai)

POLITIQUE - Un tour de vis dans le vide? Depuis que le Premier ministre a annoncé, le vendredi 29 janvier, le choix du gouvernement de ne pas reconfiner les Français pour l’instant, Élisabeth Borne pousse entreprises et partenaires sociaux à renforcer le recours au télétravail. Car les derniers chiffres en la matière ne sont pas bons.

Une étude réalisée par Harris Interactive pour le gouvernement montre une érosion du travail à domicile. Concrètement, selon cette enquête, parmi les actifs pouvant le faire facilement, 36% n’ont pas télétravaillé la semaine du 18 au 24 janvier, contre 30% la semaine du 2 au 8 novembre. Et la part de ceux télétravaillant à 100% est passée de 45% en novembre à 30% en janvier.

Une forme d’”érosion” contre laquelle “il faut absolument se remobiliser”, selon les mots de la ministre du Travail. En marge d’un déplacement à Béthune dans le Pas-de-Calais, ce mardi 2 février, Élisabeth Borne a indiqué que ses services allaient “conseiller les entreprises” et “le cas échéant sanctionner” si elles ne respectent pas le protocole sanitaire en vigueur.

Un appel à la mobilisation lancé dès lundi soir, au cours d’une visioconférence hebdomadaire entre la ministre et les partenaires sociaux. Mais pour quels résultats?

Retour à l’automne

Élisabeth Borne agitait déjà ces menaces à l’automne dernier, lors du deuxième confinement, lorsque se multipliaient les témoignages de salariés désabusés de devoir se rendre sur leurs lieux de travail malgré les règles gouvernementales en vigueur.

Directeurs des ressources humaines de grandes entreprises, responsables de grandes fédérations d’employeurs, syndicalistes, représentants du patronat... la ministre avait alors multiplié les réunions pour rappeler l’importance du travail à la maison dans la lutte contre la propagation du coronavirus.

Elle avait même évoqué, dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale, la responsabilité pénale des employeurs en la matière. “Pour ceux qui l’ignorent, le Code du travail impose à l’employeur de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé des salariés. À ce titre, et sur la base du protocole, la responsabilité des employeurs pourrait être engagée”, faisait-elle valoir le 3 novembre dernier.

Pour des résultats finalement mitigés. Selon Le Monde, une trentaine d’employeurs ont été mis en demeure pour non-respect des règles en matière de travail à la maison sur un total de 8000 inspections liées à la crise sanitaire l’année dernière.

Le protocole sanitaire en questions

Et si Élisabeth Borne s’était finalement félicitée, une semaine après ses menaces, de voir employeurs et salariés “jouer le jeu”, la part des télétravailleurs lors du deuxième confinement est toujours restée inférieure à celle du premier. Ils étaient 15% à travailler à la maison à la fin du mois d’octobre, 23% à la fin du mois de novembre, contre 25% au printemps 2020.

De quoi pousser le gouvernement à établir des règles plus strictes, alors que la question de remettre les Français sous cloche se pose à nouveau au plus haut sommet de l’État? Pas forcément. L’exécutif choisit de s’en remettre à nouveau à “la responsabilité collective des employeurs et des salariés”, selon les mots de Gabriel Attal, lundi sur Franceinfo. Et ce, malgré “l’érosion” évoquée par Élisabeth Borne.

Car si les déclarations de la ministre et sa volonté ré-affichée de sanctionner les entreprises récalcitrantes s’inscrivent dans la lignée du tour de vis annoncé par Jean Castex vendredi, le protocole ne sera pas durci.

Le Premier ministre avait affirmé que “dans toutes les entreprises où c’est possible, le recours au télétravail sera(it) renforcé”... mais le ministère du Travail a immédiatement précisé que les dispositions en la matière -allégées il y a quelques jours- restaient inchangées dans le protocole sanitaire régissant la vie dans les entreprises.

Le gouvernement marche sur des œufs

Concrètement, le texte prévoit que le télétravail soit “la règle pour l’ensemble des activités qui le permettent” avec, pour les “salariés en télétravail à 100%, un retour en présentiel (...) possible un jour par semaine au maximum lorsqu’ils en expriment le besoin”. 

Un protocole allégé à minima, décidé au mois de décembre, et entré en vigueur le 7 janvier dernier, qui vise à répondre à la détresse d’une partie de ces Français. “Nos études montrent que plus de 6 salariés sur 10 en télétravail à 100% depuis novembre souhaitent revenir dans l’entreprise au moins une journée par semaine”, expliquait Élisabeth Borne au début du mois de janvier, assurant que “plus de la moitié disent souffrir d’isolement”.

Pas question, dès lors, de revenir sur ces nouvelles règles -qui devaient pourtant être conditionnées à l’amélioration de la situation sanitaire- malgré l’inquiétude d’une partie de la communauté scientifique. “La situation est tendue partout en Europe, ce n’est pas du tout le moment. (...) Le danger c’est aussi que certains employeurs fassent pression sur leurs salariés pour qu’ils reviennent sur site”, nous expliquait Antoine Flahaut, médecin épidémiologistes et professeur à l’Université de Genève, au moment de la mise en application de ce protocole allégé. 

Mais pour la ministre, il s’agit ni plus ni moins d’un “enjeu de santé publique.” Une nouvelle démonstration que le gouvernement marche sur des œufs à l’orée de cette troisième vague épidémique, écartelé entre les indicateurs hospitaliers et la santé psychologique des Français.

À voir également sur Le HuffPostLes patrons ont-ils confiance en leurs employés en télétravail?