Covid: le variant Delta va s'imposer en France, mais la 4e vague n'est pas inéluctable
SCIENCE - Jour après jour, la France voit les indicateurs de suivi de l’épidémie de Covid-19 décroître avec régularité. Malheureusement, le variant delta (indien) semble progresser avec la même minutie.Ce mercredi 23 juin à la sortie du Conseil...
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SCIENCE - Jour après jour, la France voit les indicateurs de suivi de l’épidémie de Covid-19 décroître avec régularité. Malheureusement, le variant delta (indien) semble progresser avec la même minutie.
Ce mercredi 23 juin à la sortie du Conseil des ministres, le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal a expliqué que le variant Delta “représente aujourd’hui entre 9 et 10% des contaminations, un niveau comparable à ce que nous observons aux Etats-Unis et en Allemagne”. Il est notamment très présent dans les Landes, où cette souche, bien plus contagieuse, représente 70% des cas positifs détectés, ou encore en Île-de-France (12 à 13%) et dans le Bas-Rhin.
Un cas sur dix, cela peut sembler peu, mais le problème, c’est que la semaine dernière, le variant Delta ne représentait que 4,6% des tests positifs “criblés” afin de vérifier la présence des variants les plus dangereux, selon Santé publique France. “Au vu des données, ce variant est plus transmissible et finira par s’imposer, c’est inéluctable”, explique au HuffPost Florence Debarre, chercheuse au CNRS, spécialiste de biologie évolutive.
Reste à savoir quand. Car si l’évolution de Delta est inquiétante, la France est atteinte de myopie dans sa surveillance des variants. Reste aussi à savoir si la domination du variant Delta impliquera, comme au Royaume-Uni, une nouvelle vague. Reste, enfin, à savoir quelle sera l’ampleur d’une hypothétique vague dans un pays déjà partiellement vacciné.
La France dans le noir depuis un mois
Ce chiffre de 9 à 10% est certes inquiétant, mais il ne faut pas le prendre pour une certitude absolue. Il vient de nouveaux tests de criblages, qui permettent de vérifier sur un test PCR ou antigénique positif si le coronavirus qui a contaminé la personne dispose de certaines mutations clés, présentes sur les principaux variants inquiétants.
Ces nouveaux tests sont très récents et remplacent d’anciens tests, qui permettaient surtout de voir la progression des variants Alpha (anglais), Beta et Gamma (brésilien et sud-africain). Pour mieux cerner Delta, les autorités de santé ont choisi de changer totalement la politique de criblage. Le problème, c’est que depuis début juin, aucune donnée n’était disponible. Les 4,6% de variant Delta annoncés par Santé publique France le 18 juin étaient les 1ères.
De plus, elles peuvent être biaisées. “Nous n’avons pas, en France, le suivi de l’épidémie des Britanniques avec une excellence surveillance”, déplore Samuel Alizon, directeur de Recherche au CNRS, spécialiste de la modélisation des maladies infectieuses. Effectivement, le Royaume-Uni séquence le génome de 80% des cas recensés, réalise un criblage bien plus exhaustif et, surtout, fait des “sondages” aléatoires et représentatifs de la population.
En France, nous en sommes bien loin. “S’il y a un suivi des cas contacts plus renforcé, ou encore des campagnes de dépistages dans les lieux où le variant Delta a été détecté, on aura mécaniquement une proportion plus importante de cas de variant Delta, alors qu’il pourrait, en réalité, ne pas être si présent que ça”, explique le chercheur. Quant au séquençage, qui pourrait être plus précis, il reste lui aussi soumis aux biais et, surtout, est très, très en retard. La dernière enquête de Santé publique France date du 25 mai. À l’époque, le variant Delta représentait 1% des génomes de coronavirus séquencés.
Le variant Delta s’imposera, c’est une question de temps
Quoi qu’il en soit, si la semaine prochaine le variant Delta représente 20% des cas, difficile d’imaginer que celui-ci va brusquement disparaître. Les autorités de santé britanniques, où Delta représente plus de 90% des cas, estiment que celui-ci est 40 à 60% plus contaminant qu’alpha, lui-même plus infectieux que la souche classique du coronavirus.
C’est aussi le résultat de récents travaux prépubliés par l’équipe de Samuel Alizon, qui estime même que son avantage pourrait dépasser les 90%. “Ce chiffre peut être surévalué à cause des biais cités plus haut. Mais cette différence pourrait être due au fait que les Français sont moins vaccinés que les Britanniques”, précise le chercheur.
S’il reste donc de nombreuses inconnues, la certitude, c’est que Delta devrait, tôt ou tard, devenir majoritaire. Le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC) estime d’ailleurs qu’il représentera 90% des cas d’ici à la fin du mois d’août. En attendant, le but du gouvernement est de retarder au maximum ce moment, notamment en contrôlant les frontières et en “mobilisant pour identifier les cas de variant Delta et briser les chaînes de contamination”, a expliqué Gabriel Attal. Avec un succès relatif pour le moment.
Vague d’incertitude
Et une fois Delta majoritaire en France, que se passera-t-il? Le risque, c’est de voir ce variant plus contagieux entraîner une nouvelle hausse des cas de Covid-19. C’est ce qu’il s’est passé cet hiver avec l’arrivée du variant Alpha. C’est ce qu’il se passe au Royaume-Uni actuellement avec Delta, où l’épidémie croît de 30% chaque semaine alors que l’incidence était aussi basse qu’aujourd’hui en France il y a deux mois. Mais cette nouvelle vague n’est pas inéluctable. “Si l’avantage de Delta fait que le taux de reproduction du virus [le R effectif, NDLR] est inférieur à 1, l’épidémie va continuer de décroître”, explique Samuel Alizon.
“Si on ne fait rien, ça va mal se passer, mais si on se donne les moyens de contrôler les chaînes de transmission du variant Delta, on peut espérer empêcher l’épidémie de réaugmenter”, abonde Florence Debarre. “La vaccination est également un élément important. Quand elle est complète, elle semble efficace même face au variant Delta. Il y a donc toujours une course entre vaccination et propagation du variant. Contrôler les chaînes de Delta donne du temps pour vacciner et plus on vaccine, plus les conditions de la propagation sont compliquées.”
Enfin, même si l’épidémie repart pendant l’été ou à la rentrée, il faut bien comprendre que la vague n’aura rien à voir avec les précédentes. Certes, Delta est plus contagieux. Il pourrait même être plus virulent. Mais la vaccination change la donne.
Comme le rappelle l’épidémiologiste Meaghan Kall, une seule dose de vaccin diminue le risque d’infection de 30% seulement contre Delta, contre 50% pour le variant alpha. Par contre, pour deux doses, la protection est supérieure à 80%, ce qui est une bonne nouvelle. Encore mieux: les récentes données anglaises montrent que le risque d’hospitalisation est diminué de plus 75% quelque soit le variant dès la 1ère dose. Même avec AstraZeneca. Et une fois les deux doses administrées, le risque est diminué de 90%.
Plus que jamais, la vaccination est la clé, à la fois pour empêcher une nouvelle vague due au variant Delta, mais aussi pour diminuer les conséquences de cette vague. Mais même si les objectifs vaccinaux sont atteints et une nouvelle vague évitée, la pandémie ne sera pas finie pour autant. “Des épidémies font rage dans de nombreux pays et permettront à de nouveaux variants d’émerger. Il faut continuer à surveiller activement, notamment les voyageurs”, prévient Florence Debarre.
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