Dans “A Bigger Splash”, Jack Hazan fait entrer Hockney dans la fiction
En 1974, la sortie en France de A Bigger Splash de Jack Hazan fut une sensation forte à plusieurs entrées. Par sa porte principale, on pénétrait dans l’univers mental et pictural de David Hockney, le titre étant emprunté à la toile peinte par...
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En 1974, la sortie en France de A Bigger Splash de Jack Hazan fut une sensation forte à plusieurs entrées. Par sa porte principale, on pénétrait dans l’univers mental et pictural de David Hockney, le titre étant emprunté à la toile peinte par le Britannique en 1967.
Par la baie vitrée du film, qui baguenaude des intérieurs aux extérieurs, on visitait le Londres trendy du début des années 1970 (tournage entre 1971 et 1973), de défilés de mode de l’alors célèbre Ossie Clark en performance outrageous (l’élection de Miss Travelo).
Par un soupirail encore plus underground, on se faufilait aussi dans l’une des toutes 1ères affirmations dédramatisées de l’homosexualité masculine, non pas tant au nom du droit à la différence mais plutôt d’un droit à l’indifférence. Même à l’époque, plus grise que rose, rien ne paraissait soudain plus banal, bien qu’excitant et paradisiaque, que tous ces jeunes gens qui traversent le champ à poil ou font longuement l’amour face caméra (scène homo-bandante qui en France valut au film une interdiction aux moins de 18 ans).
Mais toutes ces entrées convergent vers une seule sortie en forme d’échappée belle : la perspective d’un au-delà du documentaire ou, ce qui revient au même, d’un en deçà de la fiction.
A Bigger Splash serait au Londres des années 1970 ce que Blow Up fut au swinging London des années 1960On a beaucoup évoqué l’influence sur Jack Hazan d’Andy Warhol et de ses films made in Factory (une toile de Warhol est visible au 1er plan d’une des scènes). Mais, à la revoyure, c’est un autre fantôme qui rode. Un artiste excentrique et peroxydé en pleine crise de créativité doublée d’une crise sentimentale (sa rupture avec le jeune Peter Schlesinger) ; ses errances dans Londres au volant d’une Mini BMW ; sa façon de fixer photographiquement son modèle-amant dans le décor d’un parc désert…
À coup sûr, on songe au photographe incarné par David Hemmings dans le Blow Up d’Antonioni, tout aussi bouleversé et mouvant. Ce qui ne veut pas dire que, manière de le naphtaliner, A Bigger Splash serait au Londres des années 1970 ce que Blow Up fut au swinging London des années 1960 : un document d’époque, précieux mais daté.
Le mystère reste un bonheur irrésolu
Comme chez Antonioni, la modernité toujours actuelle de A Bigger Splash tient à son travail du documentaire par la fiction. Le son souvent postsynchronisé, le choix du cadre qui insiste sur les gros plans de visages, des voix off qui deviennent in, une bande musicale qui emprunte plus à l’opéra classique qu’à la musique pop, l’écriture des dialogues faussement improvisés et surtout le montage : un enchaînement qui juxtapose jusqu’au trouble optique le filmage en plan fixe d’un tableau d’Hockney (portrait d’ami·e ou d’amant) et sa soudaine animation par l’irruption des personnes ayant servi de modèles.
Comme ces visiteur·euses confronté·es à leur reproduction, on s’approche du Bigger Splash, on le scrute au plus près, mais même à la lueur d’un briquet, comme le fait Hockney lui-même au risque d’incendier l’une de ses œuvres, le mystère reste un bonheur irrésolu : la munificence abstraite d’une éclaboussure argentée dans le bleu d’une piscine californienne.
A Bigger Splash de Jack Hazan (reprise). En salle le 6 octobre.