Dans "Underground railroad", le chemin de fer n'a pas existé mais c'est tout un symbole
SÉRIES - “Il y a des images dures dans cette production, des images qui causent sans fard des injustices infligées à mes ancêtres pendant la grande construction de ce pays.” Ces mots prévoyants, ce sont ceux de Barry Jenkins à l’égard de sa...
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SÉRIES - “Il y a des images dures dans cette production, des images qui causent sans fard des injustices infligées à mes ancêtres pendant la grande construction de ce pays.” Ces mots prévoyants, ce sont ceux de Barry Jenkins à l’égard de sa série “Underground Railroad”, disponible depuis ce vendredi 14 mai sur Amazon Prime.
Adaptée du best-seller éponyme de Colson Whitehead, l’histoire suit l’épopée sombre d’une jeune femme du nom de Cora Randall, jouée ici par l’actrice sud-africaine Thuso Mbedu, poursuivie par un chasseur d’esclaves après s’être enfuie de la plantation de Géorgie où elle était prisonnière depuis sa naissance.
Le récit violent et glaçant du livre, auquel le réalisateur de “Moonlight” est resté fidèle, offre une lecture documentée de l’histoire de l’esclavage aux États-Unis, mais s’éloigne de la réalité grâce à la pièce maîtresse de l’oeuvre: un chemin de fer clandestin souterrain. Rien des tunnels secrets qu’emprunte Cora pour sillonner en cachette, des conducteurs qu’elle rencontre ou des locomotives dans lesquelles elle monte n’a vraiment existé.
Découvrez ci-dessous la bande-annonce de “Underground railroad”:
L’allégorie
Ledit chemin de fer est une allégorie. C’est en réalité “un réseau de personnes qui ont agi pour aider les esclaves à se cacher, à s’échapper, en chargeant quelqu’un dans une voiture, par exemple, pour le conduire quelques kilomètres plus au Nord, ou aider à traverser un fleuve”, explique l’auteur afro-américain, récompensé du Pulitzer en 2015 pour son roman, chez Franceinfo.
Ce réseau de routes et de points de rencontre, qui aurait permis à 30.000 personnes de s’échapper des plantations entre 1820 et 1860, nourrit la culture américaine, comme peuvent en témoigner la série télévisée “Underground” de Misha Green et Joe Pokaski ou le célèbre roman de Toni Morrison Beloved.
La tournure fantastique qu’il prend dans “Underground Railroad” est différente. “J’ai grandi à New York, explique Colson Whitehead. Quand j’ai entendu pour la 1ère fois causer du ‘chemin de fer clandestin’, j’ai pensé qu’il s’agissait d’un vrai métro.” Plus tard, ses professeurs lui expliquent que ce n’est pas le cas. Il est déçu, mais décide au tournant des années 2000 “de transformer cette métaphore en quelque chose de réel”. Une manière pour lui “d’avoir plusieurs mondes alternatifs, qui étaient autant de visions et de réflexions transversales: les races, l’eugénisme, les expérimentations médicales”, concède-t-il dans les colonnes de L’Express.
Enfant, Barry Jenkins a eu la même vision. “J’ai vu des personnes noires construisant, travaillant et prospérant sur des vaisseaux créés par leurs soins, loin sous terre”, révèle-t-il dans une note adressée aux journalistes. ”À ce moment-là, tout m’a semblé possible. Malgré les conditions peu reluisantes de ma vie de l’époque et ce qui ressemblait à un vase clos, le monde entier s’est ouvert à moi.”
Les dessous du chemin de fer
La symbolique du livre de Colson Whitehead l’a beaucoup marqué. “Quand je l’ai lu pour la 1ère fois, poursuit-il au cours d’une conférence de presse, j’ai retrouvé cette même émotion. Là aussi, les trains ne volaient pas dans le ciel. C’est juste que des personnes noires les avaient construits sous terre. Je me suis dit: ‘Oh, ça c’est plutôt cool’.”
Il poursuit: “Cette série est un retour à ce sentiment, avec les yeux d’un adulte à la place de l’innocence d’un enfant, le souvenir d’avoir fait apparaître des images douces là où les images dures étaient rayées du dossier, cachées.”
Barry Jenkins n’a pas fait les choses à moitié. Pas question d’utiliser des décors en images de synthèse, tout devait être “vrai”, explique-t-il. Lui et ses équipes ont alors mis la main sur un réseau ferroviaire privé. Ils ont ensuite construit des tunnels au-dessus de celui-ci. Au cours du processus créatif, le réalisateur prend conscience de tout ce que recouvre, pour lui, cette symbolique surréaliste.
“Je me suis souvenu du penny que ma grand-mère gardait dans un bocal sous son lit, se rappelle-t-il lors de cette même conférence de presse. Si ce genre de rituels, qui nous sont transmis, peuvent inspirer une vraie croyance, ils ont un pouvoir.” Le chemin de fer dans “Underground Railroad” est pour lui une manière de expliquer le voyage de son héroïne, mais surtout de donner un nouveau sens à l’histoire de ses ancêtres. “L’une des expériences les plus créatives de ma vie”, conclut le cinéaste.
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