“De l’or pour les chiens”, un teen movie français réussi ?

Comme beaucoup d’autres avant lui, De l’or pour les chiens explique l’initiation, l’apprentissage, puis l’affranchissement d’une jeune fille. Teen movie français, il débute dans les clous du genre, sous le soleil estival des Landes où Esther...

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Comme beaucoup d’autres avant lui, De l’or pour les chiens explique l’initiation, l’apprentissage, puis l’affranchissement d’une jeune fille. Teen movie français, il débute dans les clous du genre, sous le soleil estival des Landes où Esther (la révélation Tallulah Cassavetti) travaille pour la saison et éprouve un amour puissant mais à sens unique pour Jean (Corentin Fila). C’est nu·es, en train de faire l’amour sur le sable, que nous les découvrons, dans un plan fixe, extrêmement frontal, qui place les corps des deux comédien·nes au centre de l’image, comme pour saisir la mécanique d’une jouissance hétéronormée que le mouvement du film semble interroger pour voir au-delà.

Le 1er long métrage d’Anna Cazenave Cambet s’écarte du corpus d’œuvres ayant fait des rites de passage adolescents le terreau de leurs récits. Il choisit un chemin différent, qui se fait à l’envers, dans l’autre sens. Quand nous la rencontrons, Esther a déjà vécu ce qui d’ordinaire constitue l’apogée, le but de ce cheminement : l’acte sexuel, dont elle s’amuse à archiver par écrit les diverses pratiques comme pour valider une existence en partie définie par et pour les hommes. Esther a le visage rond d’une enfant mais son corps de femme, étriqué dans sa minirobe à motifs bonbon, lui vaut d’être considérée par tous ceux, à de rares exceptions, qui croiseront sa route comme un objet, une proie. Elle subira d’ailleurs le pire, un viol volontairement filmé comme un geste totalement anodin dans une salle de bains, un soir de fête.

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Une généalogie de l’assignation au féminin

Le sens du film, son trajet conduiront Esther à Paris, dans l’espoir de retrouver celui qu’elle aime, avant de la déposer au pied d’un monastère de bonnes sœurs, où son âme en peine trouvera bien plus qu’une expiation ou qu’une simple parenthèse métaphysique. C’est que le film semble écrire, sous ses couleurs changeantes qui s’accordent à l’avancée d’Esther, s’éteignent quand elle trébuche, puis s’éclairent à nouveau dans un plan final en mer, une généalogie de l’assignation au féminin tel que le genre a été pensé et défini.

En prêtant à Esther une idylle lesbienne et platonique, le film lui permet d’échapper à ce pourquoi la sœur dont elle est amoureuse a décidé de se retirer de la vie : ne plus avoir à partager sa beauté, son visage, choisir l’enfermement pour “en avoir tout l’orgueil, pour ne plus qu’on essaie de [les lui] prendre, pour ne plus qu’on en jouisse”. C’est cette redéfinition, cette réappropriation d’une identité qui n’est pas que “femme”, qui fait secrètement le mantra politique de ce film. Ici, pas d’éclosion d’une jeune fille en fleur, mais l’apprentissage de soi pour devenir autre.

De l’or pour les chiens d’Anna Cazenave Cambet, avec Tallulah Cassavetti, Ana Neborac, Corentin Fila (Fr., 2020, 1 h 39). En salle le 30 juin