Déclaration d’amour à ma petite-fille (qui, il y a un peu plus d’un mois, était encore mon petit-fils) - BLOG
LGBT - En tant que grand-mère d’une jeune transgenre, je suis reconnaissante à Elliot Page, acteur canadien connu pour son interprétation du personnage principal dans Juno, d’avoir récemment annoncé qu’il était transgenre. Ce faisant, il a...
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LGBT - En tant que grand-mère d’une jeune transgenre, je suis reconnaissante à Elliot Page, acteur canadien connu pour son interprétation du personnage principal dans Juno, d’avoir récemment annoncé qu’il était transgenre. Ce faisant, il a aidé ma petite-fille de 22 ans et beaucoup de ses semblables à vivre leur transidentité en toute liberté.
Ma petite-fille a fait son coming-out il y a un peu plus d’un mois. Quand je l’ai appris, je lui ai envoyé le texto suivant: “J’ai parlé à ton père hier soir. Je suis si heureuse que tu aies fait ton coming-out. Tu as tout mon soutien. Je voulais simplement te dire que je t’aime. Si tu as besoin de quelque chose, n’hésite pas.”
Je me disais, ces six derniers mois, qu’elle était peut-être en pleine transition et c’est un vrai soulagement de la voir se révéler comme la jeune femme pleine de vie qu’elle imaginait et qu’elle était destinée à être.
Vous avez envie de raconter votre histoire? Un événement de votre vie vous a fait voir les choses différemment? Vous voulez briser un tabou? Vous pouvez envoyer votre témoignage à temoignage@huffingtonpost.fr et consulter tous lestémoignages que nous avons publiés. Pour savoir comment proposer votre témoignage, suivez ce guide!
J’ai 75 ans, je suis Blanche, cisgenre et hétérosexuelle, et j’ai reçu une éducation autoritaire. J’ai fréquenté pendant 12 ans l’école catholique d’un quartier blanc de classe moyenne du Bronx. J’ai grandi dans les années 1950, où tout semblait plus clair car je connaissais peu de gens dont la vie était différente de la mienne.
J’ai été élevée dans l’idée que j’irais au paradis si je suivais les règles de ma foi, contrairement à ceux qui ne les suivaient pas. Lors de mon arrivée au Texas, où je me suis installée pour élever mes enfants à la fin des années 1970, j’ai été confrontée à des attitudes conservatrices intégristes et une intolérance à l’égard des autres dont je n’avais encore jamais été témoin (il était évident qu’ils n’aimaient même pas les Américains des États du nord du pays). Mais un divorce m’a fait entrer dans le monde du théâtre et, une fois mes enfants devenus grands, mon retour à New York a marqué le début de l’étape suivante: redevenir une New Yorkaise.
Comprendre ceux qui sont différents est important pour moi. Comme beaucoup d’autres, je me suis aperçue que la religion m’avait embrouillée et que je devais revoir mes préjugés sur la sexualité et le genre. Se remettre d’un lavage de cerveau demande du temps et il est souvent nécessaire d’avoir (ou de créer) un cercle d’amis et de proches assez large pour ouvrir les yeux sur notre humanité commune. J’entends encore ma mère m’affirmer d’un ton sans réplique que j’irais en enfer si j’acceptais ce qui était considéré autrefois (et l’est encore, pour certains) comme un “comportement déviant”.
Il est peut-être plus facile de comprendre une personne transgenre quand on n’est pas de sa famille, quand il n’existe pas de liens affectifs ou d’antécédents avec cette personne auxquels repenser. C’est plus compliqué quand il s’agit de ses petits-enfants. J’ai peur de faire ou dire quelque chose de blessant sans le vouloir. Donner un nouveau prénom à quelqu’un que l’on connaît depuis plus de vingt ans n’est pas facile. Le problème n’est pas tant la transformation de ma petite-fille que le fait de ne pas réussir à gérer les souvenirs du petit-fils qu’elle était. Ce qui importe, c’est que je l’aime.
Je me suis renseignée, j’ai lu, regardé des films et des documentaires pour mieux comprendre et appréhender ce que vivent les personnes transgenres. Que ce soit grâce au documentaire Born to Be, qui m’a informée sur les opérations chirurgicales et autres soins médicaux pour les individus transgenres et non binaires qui choisissent la transition médicale, ou au livre Transgender History de Susan Stryker, qui m’a aidée à comprendre l’importance des mouvements ayant permis l’existence d’un espace de justice sociale destiné à la communauté trans, ces nouvelles connaissances m’aident à soutenir ma petite-fille.
Il faut par exemple bien comprendre que, chaque personne transgenre se définissant de façon unique, il est important de savoir quel pronom utiliser. Pour Elliot Page, c’est à la fois “il” et “iel”; pour ma petite-fille, c’est “elle”. Cela peut vous sembler insignifiant mais, pour les transgenres, c’est fondamental.
Il m’arrive malgré tout de me tromper. Parfois, je me remets à utiliser le prénom de naissance de ma petite-fille. La grande majorité des trans ne se définissent jamais par ce “deadname”, mais par celui qu’ils se choisissent pour refléter et révéler qui ils sont vraiment. Si ce concept vous échappe, vous risquez de ne pas comprendre qu’utiliser leur ancien prénom les empêche d’être pleinement reconnus, et de ne pas vous rendre compte à quel point c’est irrespectueux et douloureux pour eux.
Pourtant, il est compliqué de changer ses habitudes, surtout quand me reviennent les souvenirs du gentil petit garçon que j’ai connu. Mais je me suis engagée à faire tout ce que je pouvais pour l’accepter comme la belle jeune femme qu’elle est (et donc à m’excuser quand je me trompe). Je souhaite aussi en apprendre le plus possible pour aider l’ensemble de notre famille à faciliter cette transition. Après tout, je suis la matriarche.
Je ne peux pas me mettre à la place de ma petite-fille, mais je peux continuer à lui venir en aide avec bienveillance, et à prier pour qu’elle soit préservée de la haine et l’intolérance qui s’expriment souvent sans complexe dans l’État où elle vit.
Le rôle de grands-parents est l’un des plus beaux qui soient. Accepter et aimer ses petits-enfants sans réserve est une expérience merveilleuse. Je n’ai connu qu’une grand-mère, mais elle me montrait son amour inconditionnel chaque fois que j’allais la voir et je vois encore les moments privilégiés que nous avons partagés.
Je ne peux pas me mettre à la place de ma petite-fille, mais je peux continuer à lui venir en aide avec bienveillance, et à prier pour qu’elle soit préservée de la haine et l’intolérance qui s’expriment souvent sans complexe dans l’État où elle vit. J’espère qu’elle réussira à avancer de la façon dont elle le souhaite.
Être grand-mère au moment où j’entame le dernier chapitre de ma vie me donne l’espoir que la génération de mes petits-enfants saura perpétuer ma sagesse et nous apprendre non seulement à être en vérité avec nous-mêmes, mais aussi à envisager le monde et notre singularité de façon nouvelle et enthousiaste.
Je remercie donc Eliott Page d’avoir fait son coming-out et mis sa célébrité et sa visibilité au service de ceux qui ont du mal à s’accepter tels qu’ils sont, particulièrement au moment de Noël, où la naissance d’une nouvelle vie est synonyme d’espoir pour nombre d’entre nous.
Et à ma petite-fille, je dirais ceci: merci de m’avoir fait comprendre à quel point il est essentiel de mener une vie authentique. Je suis fière d’être ta grand-mère. Mon esprit et mon cœur ont entamé leur transition vers cette nouvelle toi. Sache qu’il est une chose qui ne changera pas: mon amour pour toi.
Ce blog, publié sur le HuffPost américain, a été traduit par Catherine Biros pour Fast ForWord.
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