“Déménagement” de Shinji Sōmai, un grand film d’apprentissage à découvrir impérativement

Même si Déménagement a été présenté au Festival de Cannes, dans la section Un certain regard, en 1993, et que son auteur a fait l’objet d’une rétrospective à la Cinémathèque française vingt ans plus tard, le grand cinéaste japonais Shinji Sōmai,...

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Même si Déménagement a été présenté au Festival de Cannes, dans la section Un certain regard, en 1993, et que son auteur a fait l’objet d’une rétrospective à la Cinémathèque française vingt ans plus tard, le grand cinéaste japonais Shinji Sōmai, disparu prématurément en 2001, demeure, en France, un parfait inconnu. La sortie d’un de ses films majeurs, superbement restauré, est donc un événement à ne pas manquer.

Déménagement, c’est l’histoire très simple de Renko, 11 ans, aux portes de la préadolescence, qui vit très mal la séparation de ses parents. Une séparation actée lors de la séquence d’ouverture, une scène de repas familial qui nous fait comprendre, sans le dire explicitement, le déménagement du père. Scène inaugurale et souterrainement traumatique, cette rupture va engendrer un processus très déstabilisant pour l’enfant.

De Pialat à Tarkovski

Par une mise en scène raffinée, mais jamais voyante, à base de plans-séquences et de mouvements de caméra presque invisibles tant ils sont subtils, Shinji Sōmai nous fait entrer dans le cerveau de sa jeune héroïne, que l’on va suivre dans ses embardées multiples. L’image persistante de la 1ère partie de Déménagement, ce sont les courses à répétition de Renko, comme autant de lignes de fuite qui ne vont nulle part mais qui tracent, malgré tout, un chemin vers un ailleurs.

Le récit fonctionne ainsi par une série de scènes de plus en plus anxiogènes où se dévoilent, sans explication inutile et sans jugement moral, le désarroi de Renko et le comportement infantile des adultes. On pourrait être chez Pialat, n’était-ce un sens aigu du cadre qui met volontairement les spectateur·rices à distance, sans jamais étouffer l’émotion.La dernière partie du film de Shinji Sōmai prend la forme d’une échappée familiale au bord de mer. Par une série de décalages, Déménagement bascule peu à peu dans un autre registre, comme si de Pialat on passait à Tarkovski. Ce changement de cap a quelque chose de vraiment stupéfiant. S’ensuit alors un ensemble de séquences plus splendides les unes que les autres, qui nous font pénétrer dans un espace magique et onirique.

Sōmai filme magnifiquement l’opacité de l’enfance

La fugue nocturne de Renko dans la nature nous embarque, à hauteur d’enfant, dans un monde de visions mi-réalistes, mi-fantastiques. Elle prend la forme d’un cérémonial purificateur qui débouchera sur une libération. Véritable révélation, Déménagement, à la fois cruel et mystérieux, s’inscrit, sans forcer, dans la cohorte des grands films d’enfance. Un peu à la manière d’Ōshima dans Le Petit Garçon, Sōmai filme magnifiquement l’opacité de l’enfance, tout en nous projetant de plain-pied dans l’intimité psychique d’une petite fille, superbement incarnée par Tomoko Tabata, qui poursuivra d’ailleurs sa carrière à l’âge d’adulte. Après avoir vibré à Déménagement, on brûle de découvrir les autres films du Japonais dans les salles françaises. Ce n’est pas un souhait, c’est un impératif.

Déménagement de Shinji Sōmai, avec Tomoko Tabata, Junko Sakurada, Kiichi Nakai (Jap., 1993, 2h04). En salle le 25 octobre.