Depuis la conférence de Pékin, la longue lutte des femmes et de l'Europe pour la parité

Il y a 26 ans, la IVème Conférence mondiale des femmes s’est tenue à Pékin sous l’égide de l’ONU. Elle avait réuni 189 pays et s’était achevée le 13 septembre 1995 par l’adoption d’une Déclaration et d’une plate-forme d’action.  Au cours de...

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Le 19 juin 2021, des milliers de femmes turques de différentes villes se sont rassemblées à Istanbul pour soutenir la Convention d'Istanbul, un traité européen de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes, dont le gouvernement turc s'est retiré en 2021. (Photo by Diego Cupolo/NurPhoto via Getty Images)

Il y a 26 ans, la IVème Conférence mondiale des femmes s’est tenue à Pékin sous l’égide de l’ONU. Elle avait réuni 189 pays et s’était achevée le 13 septembre 1995 par l’adoption d’une Déclaration et d’une plate-forme d’action.  Au cours de cette conférence, l’Europe qui s’était élargie à 15 États membres avec l’adhésion récente de la Suède et de la Finlande, pays en tête du palmarès de la place des femmes au sein de leurs assemblées causementaires, a parlé d’une voix forte et solidaire pour défendre les droits des femmes face à de redoutables adversaires parmi lesquels les extrémistes religieux.

Au cours de cette 1ère quinzaine de septembre 1995 nous sommes plus de 25.000 femmes présentes au forum des ONG, situé à Huairou, à 60 km au nord de Pékin. Je me souviens de nos conditions de travail peu facilitées par les organisateurs. Au manque de navettes pour nous acheminer sur le site dédié aux ONG, au temps perdu à parcourir les longues distances qui séparent les ateliers, s’ajoutent les difficultés pour se faire comprendre. Et un sentiment d’être sous surveillance des autorités chinoises et de talibans infiltrés dans plusieurs débats.

Malgré cet environnement, le Lobby européen des femmes (LEF), principale coalition d’ONG de femmes au sein de l’Union, et les représentants des institutions européennes invitent, lors d’une séance plénière, les associations féministes et les responsables politiques à soutenir une déclaration en faveur d’un contrat entre les femmes et les hommes pour le XXIème siècle, fondé sur les principes de justice, d’égalité et le partenariat.

Si le terme de “parité” n’est pas retenu dans la Déclaration, le principe est maintenu sous l’impulsion européenne: les femmes et les hommes doivent participer de façon égalitaire au sein des instances décisionnelles. 

La parité comme priorité

Dès le début des années 1980, consciente de ce que l’égalité de droit était une condition nécessaire mais non suffisante de l’égalité des chances, la Commission européenne avait adopté plusieurs programmes d’action. Les deux 1ers (1982-1985/1986-1990) avaient pour but de consolider les droits des femmes en matière d’emploi et de formation. Le troisième, qui s’achevait en décembre 1995, s’était focalisé sur une meilleure représentation des femmes au sein de la société, notamment grâce à un changement de leur image dans les médias et une participation accrue dans la prise de décision. Dans le cadre de ce troisième programme, la Commission avait créé un réseau d’expertes “Femmes dans la prise de décision” chargé d’analyser les obstacles entravant la participation des femmes dans les centres de pouvoir et d’encourager des actions pour améliorer cette situation.

 

Pour combattre ces violations de la dignité humaine, la représentation équilibrée des femmes et des hommes dans les instances de décision politiques, économiques, sociales, diplomatiques, culturelles à Bruxelles s’impose plus que jamais.

 

Ce réseau a ainsi organisé plusieurs campagnes comme celle visant à accroître le nombre d’élues au Parlement européen lors des élections de juin 1994. Pour sensibiliser l’opinion publique à la nécessité d’une mixité au sein des décideurs politiques et informer sur le faible pourcentage (19,3%) des femmes élues au Parlement européen, les slogans de la campagne, traduits en neuf langues, interpellaient les électeurs et électrices européen(nes): “Votez l’équilibre femmes-hommes”, ou encore “Pouvez-vous imaginer un monde avec 81% de pères et 19% de mères?”

Le résultat fut positif puisque 27,5% des sièges à l’issue de ces élections de 1994 revinrent à des femmes. Cette progression s’est poursuivie au cours des mandats: aujourd’hui 40,4% des eurodéputés sont des femmes.

La Présidente et le Sultan

Cet engagement européen à promouvoir la participation des femmes à la prise de décision a été illustré par la désignation d’Ursula von der Leyen à la tête de la Commission européenne en 2019. Elle est la 1ère femme à présider cette institution. Celle-ci compte 40% de femmes à des postes clés. L’objectif de la Présidente est d’atteindre la parité en 2024.

Plus de 25 ans après la Conférence mondiale de Pékin, l’Europe doit continuer à combattre les dirigeants extrémistes déterminés à ne pas reconnaître les droits des femmes comme des droits humains, universels et indivisibles. Ainsi le président turc Recep Tayyip Erdogan a pris la décision, le 19 mars dernier, de retirer son pays de la Convention d’Istanbul, traité du Conseil de l’Europe signé en 2011 qui créé un cadre juridique pan-européen inédit pour protéger les femmes contre toutes les formes de violence et prévenir, réprimer et éliminer la violence contre les femmes et la violence domestique.

C’est dans ce contexte qu’Ursula von der Leyen, a demandé, le 26 avril, aux responsables  de l’Union européenne d’exiger de la Turquie le respect des droits des femmes comme “préalable à la reprise des relations” avec Ankara.

Cette prise de position de la Présidente de la Commission européenne en faveur des droits humains a été vigoureusement réaffirmée, le 25 juin dernier, à l’issue du Conseil européen. Dénonçant la honteuse loi hongroise portant atteinte aux droits des personnes LGBT, Ursula von der Leyen a rappelé les engagements des 27 États membres ayant adhéré aux valeurs de l’Union, énoncées à l’article 2 du Traité de l’Union et dans la Charte des droits fondamentaux.

Puisse l’Europe contribuer résolument à consolider le maillage international des droits des femmes, des droits humains, malheureusement soumis à de fortes tensions et exposé à de si douloureuses ruptures. Pour combattre ces violations de la dignité humaine, la représentation équilibrée des femmes et des hommes dans les instances de décision politiques, économiques, sociales, diplomatiques, culturelles, défendue à Bruxelles, s’impose plus que jamais comme une nécessité.

Le besoin de parité sur tous les continents, pour les droits des femmes et un futur égalitaire, doit être réaffirmé lors de la conclusion, à Paris du Forum Génération Égalité, organisé par ONU-Femmes et coprésidé par le Mexique et la France.

 

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