Discours de Joe Biden: 100 jours de virages à gauche inattendus

ÉTATS-UNIS - Il y a la campagne et puis il y a la présidence. Lors des primaires démocrates en 2020, Joe Biden n’était pas vraiment le candidat du changement ni de l’électrisation des foules. Face à plusieurs femmes, des candidats de couleur,...

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Discours de Joe Biden: 100 jours de virages à gauche inattendus (photo d'illustration)

ÉTATS-UNIS - Il y a la campagne et puis il y a la présidence. Lors des primaires démocrates en 2020, Joe Biden n’était pas vraiment le candidat du changement ni de l’électrisation des foules. 

Face à plusieurs femmes, des candidats de couleur, un trentenaire ouvertement gay et un poids lourd de l’aile gauche promettant une révolution, le démocrate de 77 ans et son étiquette de modéré expert du compromis ne faisaient en effet pas rêver grand monde. 

Alors que beaucoup lui accordaient pour seule qualité d’être le plus à même -par sa longue carrière et familiarité dans le paysage politique- d’extirper Donald Trump de la Maison Blanche, les regards ont pourtant radicalement changé depuis sa prise de fonction le 20 janvier 2021. Alors qu’il prononce son 1er grand discours devant le Congrès ce mercredi 28 avril et fêtera le lendemain ses 100 jours en poste, Joe Biden offre un tout nouveau visage. 

Frapper fort

Si le candidat Biden s’affichait souvent en train de courir à petite foulée, le président Biden est peut-être moins devant les caméras mais donne désormais l’impression de cavaler à toute allure.

Depuis son installation dans le Bureau ovale, le 46e président américain enchaîne en effet les décrets présidentiels à une vitesse record: une cinquantaine ont déjà été signés. Tout d’abord pour détricoter aussi vite que possible une partie des mesures instaurées par son prédécesseur. Immigration, protection des personnes transgenres (vidéo ci-dessous), retour dans l’Accord de Paris et à l’OMS... En quelques semaines, près de 25 mesures fortes de Donald Trump ont été effacées d’un coup de stylo.

 

Biden multiplie aussi ces executive orders pour s’éviter, sur des dossiers qui lui sont chers et quand cela est possible, de longues batailles dans un Sénat parfaitement partagé entre démocrates et républicains. Lui qui avait promis la discussion et le compromis avec les conservateurs au cours de sa campagne vise maintenant l’efficacité et les résultats pour tenter de transformer le pays aussi rapidement que possible.

Afin de marquer l’histoire de son empreinte, sûrement, mais aussi car le temps lui est possiblement compté: la majorité qu’il détient au Congrès est extrêmement précaire et les élections de mi-mandat -les midterms de novembre 2022- pourraient lui faire perdre cet avantage et le paralyser à peine deux ans après son arrivée. Exactement comme Trump en 2018, Obama en 2010, Bush en 2006 ou encore Clinton en 1994.

Plans d’ampleur

Des deux options qui étaient sur la table pour Biden, tenter de séduire un maximum de démocrates et républicains modérés pour espérer garder le Congrès en 2022 ou occulter les midterms et se concentrer sur le présent en passant le maximum de grandes réformes pour avoir un impact tangible, le président a clairement opté pour la seconde au cours de ses 100 1ers jours.

L’un des exemples les plus forts en est le vaste plan de relance qu’il a réussi à faire passer au Sénat et signé le 11 mars. Malgré l’opposition en bloc des républicains, qui dénonçaient des dépenses extravagantes et mal ciblées, ce programme au montant vertigineux de 1900 milliards de dollars a finalement été adopté et va permettre à des millions d’Américains d’obtenir des d’aides directes pour un montant global de 400 milliards de dollars.

Ce plan prolonge aussi jusqu’en septembre des allocations chômage exceptionnelles qui devaient prendre fin le 14 mars et consacre également pas moins de 126 milliards de dollars aux écoles, de la maternelle au lycée, pour soutenir leur réouverture malgré la pandémie, ainsi que 350 milliards de dollars en faveur des États et des collectivités locales.

Dans les bonnes grâces de la gauche

Un départ sur les chapeaux de roues qui a eu l’art de surprendre de tous les côtés de l’échiquier politique. L’aile gauche démocrate, qui n’attendait pas grand-chose de Biden après avoir eu l’espoir de voir le socialiste Bernie Sanders prendre le pays en main, s’est notamment félicitée à plusieurs reprises de ce début de mandat.

Pendant une rencontre virtuelle avec ses électeurs, l’icône progressiste du parti démocrate Alexandria Ocasio Cortez -qui avait activement soutenu Bernie Sanders aux primaires-, a en particulier cité ce plan d’investissement massif et salué le président qui s’est montré “très impressionnant” dans ses négociations avec le Congrès pour faire voter des lois allant dans le bon sens, selon elle.

“L’administration Biden et le président Biden ont définitivement été au-delà des attentes que l’aile progressiste avait”, a-t-elle reconnu volontiers (vidéo ci-dessous). “Je vais être honnête, je pense que beaucoup d’entre nous s’attendaient à une administration bien plus conservatrice”, a expliqué AOC en notant aussi que “Biden avait annoncé qu’il comptait diviser par deux les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030”. “Je ne pense pas exagérer en disant qu’il semblait impossible que Joe Biden annonce une mesure de la sorte il y a encore deux ans”. 

 

Mais la lune de miel surprise entre la gauche et Biden n’a aucune garantie de durer et la vigilance reste de mise: “Il y a des zones de désaccord total”. En ligne de mire, un plan à venir de plus de 2000 milliards dédiés aux infrastructures n’est pas satisfaisant aux yeux d’AOC, par exemple. Même si “sa vision est bonne (...), le montant pour faire ce qui est promis n’est pas suffisant, c’est pourquoi l’on essaie de faire pression sur l’administration, qu’elle se montre un peu plus ambitieuse”, a-t-elle assuré.

Pas plus tard que le 16 avril, Biden a aussi été rattrapé au vol par la même aile gauche quand il a annoncé retarder son projet d’augmenter significativement le nombre de réfugiés admis aux États-Unis et plutôt conserver cette année le plafond historiquement bas de 15.000 personnes fixé par Donald Trump. Face au tollé, sans précédent dans son propre parti, le chef d’État a immédiatement fait marche arrière toute en assurant qu’il ne s’agissait que d’une décision provisoire, appelée à être revue à la hausse d’ici mi-mai.

Au pas de course

Pour le moment, Biden reste donc globalement dans les bonnes grâces de l’aile gauche démocrate, mais aussi de l’ensemble du parti qui est à 95% satisfait de son travail, selon des sondages de la mi-avril. Avec ses plans massifs pour les Américains et l’économie, ses nouveaux objectifs pour le climat, mais aussi en allant au-delà d’autres promesses de campagne.

S’il ne s’était pas prononcé sur le montant du chèque qu’il voulait envoyer aux Américains en difficulté à cause du coronavirus, Biden a finalement décidé qu’il serait de 1400 dollars, soit plus qu’espéré. Il a aussi annoncé réfléchir à annuler 50.000 dollars de dette étudiante, au lieu des 10.000 dollars qu’il avait évoqués dans son programme. Autre dossier de poids: la réforme de la Cour suprême. Alors que le candidat Biden avait assuré qu’il n’était pas favorable à l’idée d’y augmenter le nombre de magistrats, il a annoncé au mois d’avril une commission pour étudier l’idée, poussée une fois de plus par les progressistes.

Sans compter qu’il est largement porté par la vaccination tous azimuts dans le pays qui lui a permis d’exploser son objectif phare de 100 millions de vaccinations pour ses 100 jours. Alors qu’il franchira ce seuil symbolique de son 1er trimestre au pouvoir le 29 avril, près de 235 millions de doses de Pfizer, Moderna et Johnson & Johnson auront été injectées et 30% des Américains seront complètement vaccinés. 

Un début de mandat au pas de course à bien des niveaux qui agace évidemment les républicains, maintenant minoritaires au Congrès, et l’ancien président qui s’est retiré dans sa résidence de Mar-a-Lago en Floride. Toujours privé de ses comptes sur les réseaux sociaux, le milliardaire continue de prononcer des discours ou d’apparaître sur la chaîne ultraconservatrice Fox News pour attaquer Joe Biden qui représente désormais selon lui la “gauche radicale”. 

Trump comme Biden savent cependant que l’engouement des débuts de mandat et les décrets présidentiels ont leurs limites. Des limites qui pourraient très bientôt s’afficher au grand jour: avec sa très faible majorité au Congrès, Biden reste en effet à la merci de quelques sénateurs démocrates plus conservateurs. Avec leur vote clé, ces derniers pourront jouer les arbitres pour faire avancer ou non ses projets les plus ambitieux, comme son plan d’investissement dans les infrastructures ou encore la restriction des armes à feu. Rendez-vous aux midterms du 8 novembre 2022 pour le 1er verdict dans les urnes. 

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