Et la nuance bordel?

MÉDIAS —“Il n’y a pas un confinement, mais cinquante nuances de mesures”, a lâché Olivier Véran il y a quelques jours concernant les motivations au retour aux nouvelles formes de confinement. Au-delà du simple jeu de mots, la formule n’est...

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Oui au consensus, si l’on considère ce dernier non pas comme un objectif mais comme une conséquence que l’on tire d’un débat, d’un dialogue sur laquelle nous tomberions tous d’accord. Et non à la mollesse, bien au contraire ! Nous pouvons tout à fait trouver une voie en ayant des certitudes sans pour autant prôner l’affirmation si franche qu’elle refuserait le débat. Sans concevoir l’autre comme un ennemi potentiel mais comme un contradicteur dont on peut se nourrir des idées, une voie semble être possible pour bâtir une zone de non-agression.

MÉDIAS —“Il n’y a pas un confinement, mais cinquante nuances de mesures”, a lâché Olivier Véran il y a quelques jours concernant les motivations au retour aux nouvelles formes de confinement. Au-delà du simple jeu de mots, la formule n’est pas anodine puisqu’elle met en exergue la notion essentielle de nuance.

Rien de plus facile aujourd’hui que d’allumer la mèche sur les réseaux sociaux. Caricature, séparatisme, vaccination, fermeture des écoles… Nombreux sont les sujets à éviter en société sous peine de réactions épidermiques voire de ruptures familiales.

Dictature de l’émotion: la nuance en péril

Dans ce monde du slogan, de la dictature de l’émotion, difficile d’engager la discussion. Les avis sont de plus en plus tranchés. Il faut aller vite et marquer les esprits. Au diable la nuance, celle qui nous permet de conserver une forme de précaution, un pas vers la politesse. Non, aujourd’hui il faut taper vite et fort, la diplomatie n’existe plus. Les interactions sociales semblent nous imposer, sous la pression des réseaux sociaux, de plus en plus de rapports de force. Paradoxalement, nous n’avons jamais autant manqué de courage que pour défendre les valeurs auxquelles nous sommes attachés au risque d’incompréhension voire même de représailles.

Or, ce qui s’apparente ici à une forme de relativisme n’est pas la nuance, c’est simplement la volonté de ne froisser personne au risque d’en arriver à un manque flagrant de courage. Si l’on prône la nuance, est-ce pour autant que nous privilégions le consensus au risque d’être mou? Oui au consensus, si l’on considère ce dernier non pas comme un objectif, mais comme une conséquence que l’on tire d’un débat, d’un dialogue sur laquelle nous tomberions tous d’accord. Et non à la mollesse, bien au contraire! Nous pouvons tout à fait trouver une voie en ayant des certitudes sans pour autant prôner l’affirmation si franche qu’elle refuserait le débat. Sans concevoir l’autre comme un ennemi potentiel, mais comme un contradicteur dont on peut se nourrir des idées, une voie semble être possible pour bâtir une zone de non-agression. Car le conflit peut faire naître de nouvelles idées, de nouveaux chemins à dessiner. Il n’y a pas d’innovation sans contrainte, il en est de même pour le débat d’idées.

Le poids de la nuance dans un monde digital

Mais est-ce qu’aujourd’hui la nuance est rendue impossible par notre nouvelle grille de lecture favorisée par les réseaux sociaux? Est-ce possible d’émettre une opinion mesurée en 280 caractères? Le compte twitter de Donald Trump semble nous démontrer le contraire. En ligne, caché derrière un pseudo, on peut tout s’autoriser, retirer le filtre de la bienséance qui prédomine en société pour laisser place au pire de nous-mêmes. Indignations et invectives, plus le contenu est chargé émotionnellement, plus il aura des chances d’être partagé. Or, que vaut un tweet, s’il n’est pas partagé? Pas grand-chose, puisque sa valeur marchande réside dans sa viralité. Les réseaux sont sans visage, aucune expression physique de la peine, de la colère ou de la tristesse. Sans altérité, pas de prise de conscience de l’émotion face à un tweet. Nous pouvons donc nous en donner à cœur joie!

Face à l’usure de la situation actuelle, dans ce contexte complexe où prédominent l’attente, l’inquiétude et le manque de perspective, faisons collectivement ce dernier effort de la nuance. Nous nous éviterons ainsi la banalité du mal pour reprendre les propos d’Hannah Arendt ou tout simplement l’indécence devenue tristement ordinaire.

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