Étienne Daho au sommet de son art avec “Tirer la nuit sur les étoiles”

“Je serai ton ami et ton boyfriend aussi/Celui qui guidera ta main pour voir ton chemin s’éclaircir”, chantait pour la 1ère fois Étienne Daho le 14 février dernier avec ce velouté de voix qui le caractérise depuis toujours. Difficile de faire...

Étienne Daho au sommet de son art avec “Tirer la nuit sur les étoiles”

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“Je serai ton ami et ton boyfriend aussi/Celui qui guidera ta main pour voir ton chemin s’éclaircir”, chantait pour la 1ère fois Étienne Daho le 14 février dernier avec ce velouté de voix qui le caractérise depuis toujours. Difficile de faire plus explicit lyrics pour annoncer le retour discographique le jour de la Saint-Valentin d’un homme amoureux, qui a choisi Boyfriend comme 1er single de Tirer la nuit sur les étoiles – beau programme noctambule pour l’auteur de Sortir ce soir –, titre né d’un documentaire sur Ava Gardner en pleine passion amoureuse avec Frank Sinatra.

Ou comment déclarer sa flamme, en jouant sur l’ambiguïté sexuelle (“Je jouerai à tous les hommes de ta vie/Que j’incarnerai à l’envi”), sur une splendide ballade orchestrale à la Burt Bacharach qui nous fait revenir exactement dix ans en arrière, époque Les Chansons de l’innocence retrouvée, l’album d’une nouvelle escapade londonienne avec le fidèle Jean-Louis Piérot et porté par l’immense L’Homme qui marche, dont Boyfriend serait l’heureux prolongement.

Dans le parcours du chanteur, Londres est ce phare récurrent, cette inspiration magnétique, cette respiration naturelle qui jalonne les albums-clés de sa discographie – des tubes de Pop satori (1986) au chef-d’œuvre Eden (1996), à dix ans d’écart dans un miroir londonien. De quoi annoncer Un nouveau printemps dahoïste.

Éclats londoniens

En 2017, en plein Blitz, sur la pochette duquel il apparaissait en cuir clouté façon Scorpio Rising, Étienne Daho nous quittait sur l’air de Nocturne, évoquant “ces étoiles envenimées, archangéliques et dérangées”. Comme quoi l’homme a de la suite dans les idées, d’une thématique en forme de fil rouge dans son répertoire à l’appétence de Tirer la nuit sur les étoiles, qui est à la fois le titre de ce douzième album et le morceau d’ouverture interprété avec Vanessa Paradis, avec laquelle il n’avait plus duettisé en studio depuis des lustres (période Des heures hindoues, à la fin des années 1980).

Sur Blitz, Daho avait trouvé un nouveau compagnon de route avec le trio américain formé par David Holmes et le couple Jade Vincent/Keefus Ciancia qui, comme lui, partage l’inclination malouine au point de quitter Los Angeles pour y élire domicile. “Quand j’ai découvert l’album d’Unloved, Guilty of Love (2016), j’ai trouvé que ça synthétisait tout ce que j’aime, mais dans une démarche contemporaine. Phil Spector, les girl groups, toute la musique des années 1960, mais sans être figé dans le passé, avec un son d’aujourd’hui”, racontait-il alors dans ces colonnes.

Mélomaniaque éternel, Étienne Daho a toujours aimé s’abreuver au son anglo-saxon – William Orbit, Comateens, Bill Pritchard, Saint Etienne, Vanessa Daou, Unloved jalonnent ainsi sa carrière exemplaire, en réévolution permanente. Sans oublier les projets inachevés avec The Jesus & Mary Chain, Pet Shop Boys ou encore Mazzy Star.

© Studio L’Étiquette

Le grand large

Enregistré entre l’été 2021 et l’automne 2022 entre Paris, Londres (pour les cordes à Abbey Road – sous la direction de Sally Herbert, déjà présente sur Les Chansons de l’innocence retrouvée – et des parties enregistrées par Jean-Louis Piérot sur le piano légendaire de John Lennon dans ces mêmes studios) et Saint-Malo, ce douzième album d’Étienne Daho a permis à son auteur de renouer avec cette “ambiance iodée”, réminiscente de l’époque La Notte, la notte.

“C’était très vivifiant d’être à Saint-Malo en studio avec Unloved en étant à la fois confronté à la force des éléments marins et reconnecté avec mon deuxième disque, entièrement écrit entre Saint-Malo, Dinard et Saint-Lunaire, nous dévoile-t-il. J’avais envie de me retrouver à nouveau dans ce contexte pour absorber des sensations.” Rarement un album de Daho aura autant évoqué la mer, les vagues, la plage, le ressac, les rochers, les phares, les vents, les tempêtes. Certains titres ont d’ailleurs des airs de carte postale bretonne : Les Derniers Jours de pluies, Le Phare…

“La vie nous fait parfois des petits cadeaux inspirants”, sourit Étienne Daho

Musicalement, Tirer la nuit sur les étoiles croise Eden et Corps et Ârmes avec une évidence mélodique partagée, un relief orchestral commun et une même profondeur proverbiale. Ainsi, l’ouverture époustouflante du disque ressemble à une trilogie romantique idoine : la cavalcade effrénée Tirer la nuit sur les étoiles en duo complice avec Vanessa Paradis (joué par deux batteurs en synchro), le single ouaté Boyfriend (cousin bacharachien de la ballade Soudain) et le magnétique Comme deux aimants, immense pièce maîtresse du disque suggérant quelque chabadabada…

Trois chansons qui font superbement entendre l’élan amoureux, aussi indicible qu’irrépressible. “La vie nous fait parfois des petits cadeaux inspirants”, sourit Étienne Daho, avec sa pudeur légendaire, pour évoquer l’un des disques les plus autobiographiques de sa carrière.

Carte postale du tendre

Au générique pléthorique de l’album – où l’on retrouve autant d’intervenant·es historiques (Jean-Louis Piérot, Fabien Waltmann, Christian Fradin, Marcello Giuliani, François Poggio) que récent·es (Unloved, Yan Wagner, Italoconnection, Global Network) – correspond l’ambition orchestrale et électronique des douze plages de Tirer la nuit sur les étoiles (le treizième et mystérieux Brise-Larmes figurera en titre caché sur certaines éditions).

Si quelques morceaux font entendre le monde qui bruisse (Virus X, déjà publié après le troisième confinement, Respire sur l’après-Covid, Le Chant des idoles sur la guerre en Ukraine), sans oublier de citer des bars parisiens ou malouins de prédilection (Chez Camille, dans le conclusif Roman inachevé), le disque souffle principalement l’air marin d’un amoureux transi : “C’est comme un tremblement subtil dans l’air pur/Ta lueur d’un lundi d’été, une brûlure/Un délicieux baiser, une morsure/Un pacte secret”, chante-t-il, frissonnant, sur Le Phare, l’un des sommets de Tirer la nuit sur les étoiles.

Entre obsession mentale (I’ve Been Thinking About You avec Jade Vincent) et fêlures nocturnes (30 décembre), Étienne Daho retrouve ses accents chaloupés sur Les Petits Criminels (futur tube irrésistible), avant de tourner la page d’un Roman inachevé : “Où sont tous nos je t’aime, où sont-ils à présent ?” En éternel Daholescent, le chanteur sexagénaire se livre “corps et ârmes” dans un album déjà majeur de sa discographie. Ou comment retomber pour la France.

Tirer la nuit sur les étoiles (Polydor/Universal). Sortie le 12 mai. En tournée française à partir du 4 novembre et à l’Accor Arena, Paris, le 22 décembre.