Féminicides: pour un recensement de tous les policiers et gendarmes violents envers les femmes et enfants

Le 21 juillet, le Canard Enchaîné révélait qu’un élément clé avait été passé sous silence par la Mission interministérielle chargée d’étudier les circonstances du féminicide de Chahinez Daoud. Le policier ayant (mal)traité le dossier de cette...

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Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin s'entretient avec des policiers lors d'une visite à Marseille, le 25 février 2021. (Photo by NICOLAS TUCAT/AFP via Getty Images)

Le 21 juillet, le Canard Enchaîné révélait qu’un élément clé avait été passé sous silence par la Mission interministérielle chargée d’étudier les circonstances du féminicide de Chahinez Daoud. Le policier ayant (mal)traité le dossier de cette femme, brûlée vive par son ex-conjoint dans la rue à Mérignac le 4 mai dernier, est lui-même auteur de “violences habituelles”. Condamné le 10 février à 8 mois avec sursis pour violences conjugales sur son ex-conjointe, il avait été maintenu à son poste et placé au bureau des plaintes en attendant la tenue d’un éventuel conseil de discipline qui n’a pas eu lieu.

Alors que la hiérarchie dudit policier se contentait d’admettre une situation “discutable”, les révélations du Canard enchaîné ont suscité une vague d’indignations aussi vives que légitimes.

Car comment admettre qu’un homme violent puisse être officiellement chargé par les autorités de notre pays d’évaluer la dangerosité d’un autre homme violent? Comment ne pas faire de lien entre les violences commises “dans le privé” et le fait qu’il n’ait, après avoir entendu Chahinez Daoud, transmis au parquet qu’un document illisible et incomplet?

 

Comment admettre qu’un homme violent puisse être officiellement chargé par les autorités de notre pays d’évaluer la dangerosité d’un autre homme violent?

 

Gérald Darmanin a indiqué qu’un deuxième rapport d’inspection sur le féminicide de Mérignac a été transmis au Premier ministre la semaine dernière, mais que ce rapport ne sera pas rendu public. On ne saura donc jamais si les “fonctionnaires de police ont menti ou n’ont pas tout dit à l’inspection générale”. Dans une entrevue donné au Parisien, il a également estimé le nombre d’auteurs de violences conjugales au sein des forces de sécurité intérieure à 20 cas. Sur un effectif de 250.000.

Cette réponse est non seulement insuffisante, mais elle est une parfaite démonstration de l’omerta qui est entretenue au sujet des policiers et gendarmes qui sont auteurs de violences faites aux femmes. Omerta qui met nos vies de femmes en danger.

Le ministère de l’Intérieur feint de croire le cas de Chahinez Daoud isolé. Il sait pourtant le phénomène d’ampleur. Il a largement été documenté par la journaliste Sophie Boutboul, co-autrice avec Alizé Bernard, ex-conjointe d’un gendarme violent, d’un livre enquête sidérant, Silence on cogne*. Sorti en 2019, ce livre avait été remis au président Macron, qui en avait attesté bonne réception, ainsi qu’au ministre de l’Intérieur de l’époque, Christophe Castaner. M. Philippe, alors Premier ministre, l’avait d’ailleurs mentionné à l’occasion de son discours de clôture du Grenelle contre les violences conjugales, en novembre de cette année.

Depuis, et alors qu’il s’agit d’une question de vie ou de mort, rien n’a été fait pour en finir avec l’omerta qui règne au sein de la hiérarchie de la police et de la gendarmerie au sujet des policiers et gendarmes auteurs de violences à l’égard des femmes. 

 

L’omerta règne au sein de la hiérarchie de la police et de la gendarmerie au sujet des policiers et gendarmes auteurs de violences à l’égard des femmes.

 

On ne le répétera jamais assez, les violences faites aux femmes (et enfants) touchent toutes les catégories socio-professionnelles. Il n’empêche que celles commises par des policiers et gendarmes revêtent une vraie spécificité:

1. Comme tous les auteurs, ils se servent des outils de proximité pour exercer pressions et violences envers des femmes (et enfants). Mais, pour les auteurs qui sont policiers ou gendarmes, ces outils ont été fournis par l’État pour maintenir l’ordre, et sont détournés pour cibler leurs victimes (arme de service, équipement de surveillance, dépendance logement de fonction, etc).

2. Comme tous les auteurs, ils se servent de leur réseau pour assurer leur impunité. Mais, pour les auteurs qui sont policiers ou gendarmes, ces réseaux comprennent l’ensemble des acteurs de la chaîne police-justice. Ce qui a pour conséquence de ralentir et compliquer le dépôt de plainte par la victime, d’assurer de peines réduites en cas de condamnation et une non-inscription dans le casier judiciaire au prétexte de “les maintenir dans leur fonction”. Avec le risque d’exposer encore d’autres femmes à ces auteurs de violences, et ce, au moment où elles sont le plus vulnérables.

3. Comme tous les auteurs, ils minimisent la gravité de leurs actes. Mais, pour les policiers et gendarmes violents envers les femmes (ex/conjointes, collègues, plaignantes) ceci conduit à une appréciation biaisée de la dangerosité d’autres hommes violents. De ce fait, ils n’assurent plus correctement la sécurité de l’ensemble des citoyens. 

Pour faire toute la lumière sur l’ampleur des violences masculines commises à l’encontre des femmes et enfants par des policiers et gendarmes agresseurs, nous demandons au ministère de l’Intérieur une enquête exhaustive et indépendante. Elle devra nous permettre de connaître le nombre de policiers et gendarmes mis en cause dans des affaires de violences** faites aux femmes et/ou enfants, et à quel poste ces auteurs sont actuellement affectés. 

 

Lire et signer la pétition sur Change.org : Pour un recensement des policiers et gendarmes violents envers les femmes et/ou enfants.

 

Les associations et collectifs signataires de cette tribune sont:

Abandon de Famille - Tolérance Zéro!

Pourvoir Féministe

Collectif Féminicides par compagnons ou ex

Osez le Féminisme

Enfants Devenus Grands

Citoy’Elles

Protéger l’Enfant

Mémoire Traumatique et Victimologie

ECVF Association d’élu·es engagé·es dans la lutte contre les violences faites aux femmes

Union Nationale des Familles de Féminicide

Stop Harcèlement de Rue

Association EFiGiES

 

* Dans “‘Silence On Cogne’ Enquête sur les violences conjugales subies par des femmes de gendarmes et de policiers” (Grasset, 2019), les autrices A. Bernard et S. Boutboul relatent comment les auteurs membres des forces de l’ordre adoptent une posture de “protecteurs à l’extérieur, agresseurs à l’intérieur”, ainsi que l’emploi des tactiques professionnelles pour exercer un contrôle sur leurs (ex)-conjointes. Elles précisent qu’ils s’appuient sur les réflexes corporatistes de leurs collègues et de leur hiérarchie pour maintenir ce contrôle.

** Violences physiques, psychologiques, économiques, administratives et sexuelles. 

 

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