François Mitterrand: la nouvelle gauche peut-elle "cancel" l'ancien président?

POLITIQUE - “Une partie de la gauche n’est pas toujours à l’aise avec l’image de Mitterrand”. Cette observation faite par un conseiller élyséen en amont du déplacement d’Emmanuel Macron à Jarnac au mois de janvier tombe assez juste en ce lundi...

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François Mitterrand photographié lors d'un meeting organisé en avril 1981, juste avant l'élection présidentielle.

POLITIQUE - “Une partie de la gauche n’est pas toujours à l’aise avec l’image de Mitterrand”. Cette observation faite par un conseiller élyséen en amont du déplacement d’Emmanuel Macron à Jarnac au mois de janvier tombe assez juste en ce lundi 10 mai, jour du 40e anniversaire de l’élection de François Mitterrand, célébré en grande pompe par les responsables socialistes, non sans quelques frictions. 

Le 1er secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure, a en effet renoncé à se rendre dimanche 9 mai au Creusot, où les huiles du parti à la rose, François Hollande en tête, ont rendu hommage à cette figure tutélaire de la gauche française. Ou du moins d’une certaine génération, qui défend bec et oncle le legs politique du 1er président socialiste de la Ve République, y compris ses aspects les plus controversés.

Car selon Le Figaro, l’absence du patron du PS s’explique en partie par les reproches que lui font plusieurs éléphants du parti, qui l’accusent de ne pas condamner les propos de Raphaël Glucksmann après le rapport de la Commission Duclert, pointant la responsabilité de François Mitterrand dans le génocide des Tutsis au Rwanda en 1994.  

Le “point noir absolu”

“Oui, ce Président, encore une icône pour tant de gens de gauche, porte une ‘responsabilité accablante’”, avait tweeté, entre autres, le fondateur de Place Publique à la sortie de ce rapport. De quoi provoquer la colère d’une vingtaine de ses anciens ministres, qui ont personnellement écrit à Olivier Faure pour se plaindre de ce crime de lèse-Mitterrand. Auprès du HuffPost, l’eurodéputé se défend de vouloir tirer un trait sur l’ensemble de l’héritage de “Tonton”, mais souligne le “paradoxe” que représente à gauche le successeur de Valéry Giscard d’Estaing. 

“Il y a cette nostalgie, liée à l’espoir incroyable provoqué par son élection, qui marquait une rupture, une révolution pacifique et démocratique. Une véritable respiration dont la société avait besoin. Mais cette nostalgie ne doit pas nous conduire à refuser de voir la déliquescence de sa présidence: le cynisme, la corruption, le début de la désindustrialisation, le renoncement... Avec comme point noir absolu, la responsabilité de François Mitterrand dans le génocide au Rwanda”, explique Raphaël Glucksmann, pour qui la gauche manque ”à son devoir de vérité et de courage”.

“On a un ancien président de droite (Nicolas Sarkozy, NDLR) qui réagit avec des mots justes et nous, rien. On cause quand même d’un génocide, un crime concernant toute l’humanité”, déplore encore l’ex-tête de liste aux élections européennes, décelant une dimension “générationnelle” pouvant expliquer le silence des principaux responsables de gauche sur les dossiers noirs de François Mitterrand. 

“C’était aussi l’homme d’une époque”

De quoi éloigner ce dernier des référentiels de la gauche? Pour la porte-parole du PS Gabrielle Siry-Houari, “la jeune génération a un rapport plus distancié, plus historique et parfois plus critique”, à l’égard de l’ancien président, qui reste toutefois un marqueur pour les jeunes militants. “Pour nous socialistes, et pour beaucoup de Français, c’est une époque perçue positivement, grâce notamment aux acquis sociaux (cinquième semaine de congés payés, retraite à 60 ans, abolition de la peine de mort, suppression du dernier texte pénal stigmatisant les relations homosexuelles, etc.)”, détaille l’économiste, par ailleurs élue PS dans le 18e arrondissement de Paris.

Pour ce qui concerne les aspects moins reluisants de la présidence Mitterrand, celle qui a justement consacré une partie de ses études au “tournant de la rigueur” préfère observer les écueils d’une époque plutôt que les seules responsabilités imputables à l’ancien chef de l’État. “C’était aussi l’homme d’une époque. Une époque marquée par l’avènement du néolibéralisme, qui n’a pas épargné la France, avec la décision prise de libéraliser les marchés de capitaux, dont on subit encore les conséquences aujourd’hui. C’est facile 40 ans plus tard de dire qu’il aurait fallu mieux faire. Mais c’est la France de l’époque. Même chose sur le Rwanda, nous devons, au-delà de l’homme, avoir un regard critique sur ce qu’a été la politique française dans ces années-là”, note Gabrielle Siry-Houari.    

Avoir un regard un “regard critique” sur la France des années 1990, c’est justement ce que propose Raphaël Glucksmann, sans pour autant vouloir épargner celui qui en était à la tête, afin de n’en retenir que le meilleur. “Le problème qu’on a, c’est que la gauche est tellement faible, qu’elle est obligée de se raccrocher à ce mythe. On ne fait pas de projet politique sur la nostalgie”, observe l’eurodéputé, avant d’ajouter: “Oui, il faut célébrer l’espérance suscitée par son élection. Mais il faut aussi dire la vérité quand elle éclate”. Même si, comme dit l’adage, toutes les vérités ne sont pas bonnes à entendre. 

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