“Haute Couture”, le film de Sylvie Ohayon peut aller se rhabiller
“C’eeest sublimeuh, c’eeest magnifiqueuh, la haute couture de Paris”… Difficile de faire plus juste et plus drôle sur les coulisses de la création de mode que le légendaire Signé Chanel d’Arte (2005), dont le chœur générique n’a cessé de résonner...
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“C’eeest sublimeuh, c’eeest magnifiqueuh, la haute couture de Paris”… Difficile de faire plus juste et plus drôle sur les coulisses de la création de mode que le légendaire Signé Chanel d’Arte (2005), dont le chœur générique n’a cessé de résonner dans notre tête durant toute la projection de Haute Couture, film assez improbable mettant en scène une petite banlieusarde (Lyna Khoudri) prise sous l’aile d’une 1ère d’atelier chez Dior en fin de carrière (Nathalie Baye).
De toute évidence, la réalisatrice a dû elle aussi jeter un œil à la série documentaire de Loïc Prigent, dont l’atmosphère chuchotante de femmes travailleuses et leurs personnalités douces et sympathiques orientent plus ou moins discrètement ses choix de casting (Pascale Arbillot) et ses indications de jeu.
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Au 1er plan, Haute Couture a cependant d’autres chats à fouetter que la simple description d’un métier, puisqu’il s’attaque surtout à un genre qu’on ne devine que trop et dont il cochera sagement la plupart des cases : le conte social Paris-banlieue, ses tandems “que tout oppose” et qui tisseront malgré leurs différences une poignante réconciliation des extrêmes. Rien de nouveau sous le soleil de la sociologie de comptoir : la jeune des quartiers aime traîner en ville, manger des kebabs et voler les sacs des vieilles ; la préretraitée embourgeoisée cause à ses fleurs, va au musée et croit aux vertus de la discipline dans le travail.
Alors bien sûr, l’actrice principale explique en entrevue que “jamais de la vie” elle n’aurait fait le film s’il correspondait aux clichés du genre – mais ça aussi, est-ce que ce n’est pas un cliché du genre ? C’est que Haute Couture semble en réalité assez conscient et limite complexé par son propre schématisme sociologique, dont il tente régulièrement de s’excuser notamment par des choix de représentations très discutables à l’endroit de la cité.
Elle est le lieu d’une misère très virtuelle (on nous bassine sur le fait qu’il faut “s’en sortir” mais on n’en voit jamais rien, à part une mère dépressive clownesque) et d’une solidarité pour pubards (un final ahurissant avec des dizaines de voisins qu’on n’a jamais vus acclamant au balcon sans raison), saupoudré de coups de pschitt woke qui ne fleurent pas particulièrement la sincérité (le kebab tenu par une une jeune femme transgenre, incongruité sociologique que le film ne prend pas du tout en charge).
Dans cet énième occurrence du bon vieux match opposant l’excès de verlan (“c’est le sac qu’on a péta dans le tromé !”) à l’excès de pages roses (“J’en ai marre, je vais mettre la viande dans le torchon !”), le seul personnage un peu touchant restera probablement Abel/Abdel, arabe plus ou moins bien né (sa mère est avocate) cachant le “d” de son prénom pour évoluer masqué dans le milieu de la mode, mais cachant aussi aux rebeus de ses amis la réalité de ses origines : il n’a jamais grandi en banlieue. Pris entre les feux de deux représentations qui ne veulent pas de lui, il aurait peut-être fait un meilleur personnage principal, et le fait que le film l’expédie confortablement dans une pure fonctionnalité de boyfriend est finalement assez parlant.
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