"I Care a Lot" montre bien les zones d'ombre du régime de tutelle
CINÉMA - Les remous autour de l’affaire Britney Spears ne faiblissent pas. Alors que la demande, de la part de la chanteuse et de son avocat, de suspendre le contrôle que son père exerce sur elle a récemment été rejetée par la justice de la...
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CINÉMA - Les remous autour de l’affaire Britney Spears ne faiblissent pas. Alors que la demande, de la part de la chanteuse et de son avocat, de suspendre le contrôle que son père exerce sur elle a récemment été rejetée par la justice de la Cour supérieure de Los Angeles, la Maison Blanche a, elle, indiqué suivre “de très près” l’affaire, ce jeudi 1er juillet.
Cette histoire n’est pas anodine. Elle est révélatrice d’un système, celui des régimes de tutelle aux États-Unis. Là-bas, un tuteur peut être nommé par les tribunaux pour un adulte après qu’il a été déterminé qu’il n’a pas les capacités mentales pour s’occuper de sa vie. Le tuteur, qui peut être un parent ou une personne extérieure à la famille, détient ainsi le contrôle exclusif sur les économies et les ressources de l’individu.
À l’heure actuelle, on estime entre un à trois millions le nombre de personnes qui, comme l’interprète de “Toxic”, vivent cette situation dont il est difficile, si ce n’est impossible d’en sortir.
Le sujet reste méconnu, mais est au cœur d’un thriller réalisé par J Blakeson et mis en ligne sur Netflix en février dernier: “I Care a Lot”. L’histoire, c’est celle de Marla Grayson, un rôle qui a valu à Rosamund Pike, le Golden Globe de la meilleure actrice. Réputée auprès des autorités, elle est en réalité le cerveau d’une escroquerie qui consiste à devenir la tutrice légale d’une flopée de personnes âgées jugées inaptes à vivre seules pour les placer dans un établissement frauduleux. Le but? Les dépouiller de leur patrimoine et se remplir les poches.
Découvrez ci-dessous la bande-annonce de “I Care a Lot”
L’idée ne sort pas de nulle part. Elle est inspirée d’histoires vraies que le cinéaste a découvert à la télé. “Ces récits étaient horribles, mais pas si rares”, explique-t-il au magazine Esquire. En 2019, une femme du nom de Rebecca Fierla-Santoian a, par exemple, été arrêtée pour abus et négligence à la suite du décès d’un homme de 74 ans dont elle avait la tutelle. D’après le Guardian, elle avait obtenu une ordonnance pour boucher le tube d’alimentation de celui-ci, faisant fi de l’avis des médecins qui estimaient que cela causerait sa mort. La criminelle était à la tête de 450 tutelles.
Un scénario “kafkaïen”
Le mode de fonctionnement est souvent le même: mise en place d’un litige, isolement, prise en charge de la succession. “Des avocats identifient, ou ont fait identifier pour eux, une victime potentielle. Ils vont voir le juge et celui-ci entame un processus d’évaluation de l’incapacité de la personne”, explique au quotidien britannique Sam Sugar, auteur d’un livre intitulé Guardianships and The Elderly: The Perfect Crime.
Comme dans “I Care a Lot”, “la personne concernée ou sa famille n’est que peu, voire pas du tout, informée de la procédure. Lorsqu’elle s’en rend compte, il est trop tard pour engager un avocat, poursuit l’écrivain. L’ensemble du système ne repose que sur une seule chose, à savoir le transfert de richesses. Personne, dans le système judiciaire, ne se soucie de la personne âgée. Si vous essayez de lutter contre ça, vous courrez à la faillite.”
J Blakeson a transposé le schéma à la lettre. “J’ai trouvé qu’il y avait quelque chose de presque kafkaïen dans le fait de voir quelqu’un frapper à votre porte et vous emmener pour une raison que vous ignorez ou ne croyez pas valable, commente-t-il. Ces tuteurs ont la loi de leur côté et vous ne pouvez rien faire.”
D’après un document d’étude écrit par un chercheur québécois, une formation des tuteurs est exigée. Elle augmente, mais demeure inégale selon les États. Celui de New York n’exige en l’occurrence qu’une journée de certification à l’aspirant tuteur, dont les antécédents ne sont pas même vérifiés. “Bien qu’il y ait de plus de en plus de guides et de vidéos-échantillons pour les tuteurs, seulement 40 % des répondants ont indiqué que des instructions écrites ou des manuels fournis par les tribunaux étaient à la disposition des tuteurs”, peut-on lire dans l’étude.
Des “tuteurs sans scrupules”
Le phénomène est difficilement quantifiable. En 2010, un rapport gouvernemental a indiqué ne pas être en mesure de “localiser un seul site Web, une agence fédérale, une entité locale ou étatique, ou n’importe quel organisme capable de réunir des informations claires sur le sujet”. Difficile aussi de décrire le droit et la pratique en matière de tutelle. Le droit varie d’un État à l’autre, mais également au sein même d’un État. De grandes variations de pratique entre comtés ont été observées.
Les réflexions sont discrètes. En 2015, l’État du Nevada a créé une commission pour examiner le système de tutelle, dans le but de le réformer. L’une des idées évoquées: permettre à la personne placée sous tutelle d’avoir son mot à dire dans le choix de son tuteur. En 2018, un comité du sénat a appelé à une refonte du système, avertissant que des “tuteurs sans scrupules” manipulaient des personnes âgées. D’où la volonté de la Maison Blanche de se pencher sur le système pour l’harmoniser au niveau fédéral.
D’après les fans de Britney Spears, placée sous tutelle en 2008 après “une descente aux enfers” médiatisée, le principe serait le même. Ils accusent Jamie Spears, avec lequel la chanteuse entretien depuis longtemps des relations difficiles, d’avoir profité de la situation pour avoir la main mise sur les économies de sa fille. Si c’est avéré, cela montrerait que personne n’est à l’abris, peu importe l’âge. Le régime de tutelle fourmille de zones d’ombre. Grinçant et inquiétant, “I Care a Lot” le montre bien.
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