Investiture de Joe Biden: "l’Amérique restera pilotée par son propre intérêt"
ÉTATS-UNIS - Ceux qui ont suivi les élections américaines sur les différentes chaînes d’information en continu ont forcément vu Roland Lescure commenter en quasi direct les derniers rebondissements d’un scrutin pour le moins tendu. Député LREM...
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ÉTATS-UNIS - Ceux qui ont suivi les élections américaines sur les différentes chaînes d’information en continu ont forcément vu Roland Lescure commenter en quasi direct les derniers rebondissements d’un scrutin pour le moins tendu. Député LREM des Français d’Amérique du Nord, le président de la commission des Affaires économiques de l’Assemblée nationale garde toujours un œil attentif sur ce qu’il se passe de l’autre côté de l’Atlantique, même si la crise du coronavirus le tient éloigné de sa circonscription.
Alors que Joe Biden s’apprête à devenir officiellement le 46e président des États-Unis, le marcheur revient pour Le HuffPost sur les quatre années mouvementées qui ont marqué le mandat de Donald Trump, et évoque les perspectives qui s’ouvrent avec la victoire du candidat démocrate, que ce soit pour la France et pour l’Europe.
Et si le porte-parole de LREM exprime une forme d’optimisme, il se méfie toutefois d’une deuxième vague populiste qui pourrait submerger encore les États-Unis, voire d’autres démocraties.
Le HuffPost: Alors que le mandat de Trump s’achève dans la douleur, quel bilan tirez-vous de ses quatre années au pouvoir?
Cela a été, à de nombreux points de vue, un désastre. À la fois par la manière de gouverner, en fonctionnement par oukases, par déclarations contradictoires et avec des allers-retours imprévisibles, et par la politique qu’il a menée, que ce soit sur plan international ou migratoire. Aujourd’hui, on peut tous se féliciter de voir un président américain plus prévisible, plus en phase avec le fonctionnement du bicamérisme américain et bien plus respectueux des institutions.
Que vous évoquent les images de Washington, en quasi-état de siège?
J’espère que nous assistons au chant du cygne d’un cycle de quatre années extrêmement difficiles, et qu’on va passer à une Amérique plus apaisée. Que cette cérémonie d’investiture soit une cérémonie de transition entre deux Amériques. J’espère aussi que c’est une leçon pour le monde, avec pour la première fois un populiste défait de façon si claire et si directe. Certes il y avait eu un précédent avec Salvini, mais qui résultait aussi d’intrigues liées aux institutions italiennes. Là, c’est la première fois qu’on a un leader populiste élu ces dernières années rejeté aussi clairement par les urnes.
Même si les choses s’annoncent plus fluides, il faut que l’Europe continue à se montrer unie."Roland Lescure, député LREM des Français d'Amérique du Nord
Vous avez salué l’élection de Joe Biden et de Kamala Harris. Estimez-vous que ce résultat est une bonne nouvelle pour la France et l’Union européenne?
C’est une bonne nouvelle pour le monde, car cette élection annonce le retour du multilatéralisme. Et ce qui est bon pour le monde est bon pour la France. Nous aurons maintenant un partenaire plus prévisible et plus sensible aux enjeux environnementaux, avec le retour annoncé dans les Accords de Paris. C’est une très bonne chose, car l’UE ne peut pas à elle seule inciter le monde à prendre le virage environnemental. C’est aussi une bonne nouvelle au niveau commercial, puisqu’on peut espérer que nos différends (notamment les surtaxes qui frappent le vin français) puissent se régler à moyen terme. Même espoir concernant l’obtention de visas ou la collaboration sur des questions stratégiques, comme le terrorisme ou la menace cyber. On retrouve un partenaire plus ouvert, qui n’est pas hostile à la rationalité. Après, il ne faut pas être naïf. L’Amérique restera pilotée par son propre intérêt. Mais nous n’assisterons plus à des impasses. Je me souviens de la visite d’Emmanuel Macron à Washington, ou tout dialogue sur le nucléaire iranien était littéralement impossible.
La politique protectionniste de Trump justifiait les appels à la “souveraineté européenne” répétés par Emmanuel Macron. Ce discours ne risque-t-il pas de perdre en puissance après l’élection de Joe Biden, augurant des relations plus apaisées avec l’UE?
La souveraineté ne veut pas dire le repli sur soi. Et cela va d’ailleurs être un vrai défi de l’après Covid: comment sortir l’UE de la naïveté dont elle a pu se rendre coupable par le passé, y compris vis-à-vis des États-Unis. Donc la manière dont on intègre les enjeux sociaux, environnementaux ou commerciaux au niveau européen sera très importante pour préserver une unité qui s’est renforcée ces dernières années. Trump n’a pas eu beaucoup d’effets bénéfiques, mais il a quelque part unifié l’Europe. Donc, même si les choses s’annoncent plus fluides avec l’élection de Joe Biden, il faut que l’Europe continue à se montrer unie.
Vous êtes député des Français d’Amérique du Nord. Qu’est-ce que le changement d’administration peut changer pour eux?
L’obtention des visas, pour les entrepreneurs, mais pas seulement. Tout cela se fera dans le cadre de négociations, mais au moins on aura une prévisibilité et je crois à des changements concrets. Sur les barrières douanières, on peut espérer que ce conflit se résolve et, plus globalement, que le rapport à la mobilité évoluera positivement une fois le virus vaincu. Le Covid-19 a permis aux pulsions les plus répressives de s’exprimer. Demain, il faudra que la victoire contre le virus se traduise aussi par une meilleure ouverture entre la France, l’Europe et les États-Unis.
Nous devons collectivement tirer les leçons de ce qu’il s’est passé
Pensez-vous que le trumpisme peut se relever des désastreuses images de l’invasion du Capitole et, à terme, reprendre le pouvoir?
En tout cas, la vague de populisme n’a pas complètement reflué. Il y a de vraies préoccupations qui existent aux États-Unis (sur les effets de la mondialisation, le déclassement, certains États qui s’appauvrissent etc.) sur lesquelles le trumpisme peut encore agir. On a en parallèle une petite partie du trumpisme, qui est extrêmement bruyant et que l’on a vu dans l’invasion du Congrès, qui ne faiblit pas. Ces mouvements politiques extrêmes s’exprimant sur des réseaux alternatifs s’organisent, il faut en être conscient. Ces forces très organisées jouent pour Trump aux États-Unis, mais elles jouent aussi pour le populisme partout dans le monde. Il faut rester vigilant.
Donald Trump était la tête d’affiche d’un mouvement populiste plus vaste à l’international (Bolsonaro, Johnson…). Pensez-vous que sa défaite marque le déclin de cette tendance?
Là encore, il faut éviter la naïveté. Mais après quelques mauvaises années, marquées par le Brexit, les élections de Trump ou de Bolsonaro, on a des premiers signes qui montrent un reflux. Il faut maintenant que, dans les démocraties, les progressistes s’en saisissent, pour mieux répondre aux défis environnementaux, sociaux, économiques et sanitaires. Il faut aussi que toutes les instances internationales, comme le FMI ou la Banque mondiale, fassent leur aggiornamento et intègrent ce péril populiste dans leur approche de la gouvernance mondiale. Nous devons collectivement tirer les leçons de ce qu’il s’est passé.
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