J’étais une autre personne en sortant de la salle d’accouchement - BLOG

PARENTALITÉ - La maternité m’a profondément changée. Je savais que cet événement allait provoquer un tsunami dans chaque cellule de mon corps. Je le savais depuis toujours… mais je ne m’attendais pas à ce que cela modifie même mes attirances...

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De nature anxieuse, le séjour à l’hôpital et le deuil du dernier mois de grossesse ont été très compliqués… J’en garde toujours les stigmates psychologiques deux ans plus tard.

PARENTALITÉ - La maternité m’a profondément changée. Je savais que cet événement allait provoquer un tsunami dans chaque cellule de mon corps. Je le savais depuis toujours… mais je ne m’attendais pas à ce que cela modifie même mes attirances professionnelles.

Après mes études de psychologie, j’ai réalisé une thèse de doctorat. J’ai ensuite poursuivi des activités scientifiques, avec un dévouement inaltérable à mon travail.

J’ai toujours voulu être une jeune maman, pour avoir l’énergie nécessaire pour m’occuper pleinement de mon enfant et de toutes ces tâches connexes que les adultes et parents gèrent au quotidien… La vie en a décidé autrement… Après les longues études et avec nos vies bien remplies, il a fallu près de deux ans pour que nous puissions concevoir notre fils… Deux très longues années qui ont marqué, sans que je ne le remarque, le début d’un tournant décisif dans la vision que j’avais de moi et de mon activité professionnelle.

Vous avez envie de expliquer votre histoire? Un événement de votre vie vous a fait voir les choses différemment? Vous voulez briser un tabou? Vous pouvez envoyer votre témoignage à temoignage@huffpost.fr et consulter tous lestémoignages que nous avons publiés. Pour savoir comment proposer votre témoignage, suivez ce guide!

Dépression et burnout pendant la grossesse

Lors de la confirmation de la grossesse, l’euphorie et les doutes se sont entrechoqués. Préserver cette vie, conserver une activité professionnelle, préparer l’arrivée de notre enfant tant désiré, assurer les rendez-vous médicaux, les examens, les lectures nécessaires pour se préparer à cette aventure, les achats… tous ces éléments essentiels sont devenus aliénants.

À cinq mois de grossesse, je dois affronter la perte de deux personnes très chères à mon cœur, à deux semaines d’intervalle. À toute cette liste qui n’en finissait pas s’ajoutaient maintenant le deuil, le tri, le déménagement d’une vie…

La fatigue s’accumule, les pressions sociales et professionnelles aussi… Les rapports interpersonnels ne sont plus ce qu’ils étaient. Était-ce eux qui avaient changé ? Où avais-je déjà commencé à ne plus être cette personne que j’étais avant ?

Le verdict tombe. Dépression réactionnelle au deuil et burnout. Arrêt prolongé jusqu’à la fin de la grossesse sous ordre médical.

Cette période a probablement accentué ce virage délicat… Je me suis rendu compte que je ne voulais plus de cette vie-là. J’adorais mon travail, j’adorais l’environnement, les stimulations… Mais il y avait trop d’ombres au tableau, trop de pressions, trop de temps à y consacrer. J’y ai laissé ma santé, et ce congé n’a fait que confirmer l’évidence… Je voulais m’occuper de mon fils le plus possible.

La suite de la grossesse continua d’être mouvementée. Entre travaux de rénovation, achats, préparatifs en tous genres et les rendez-vous qui s’enchaînaient pour m’apprendre entre autres un diabète gestationnel, les deux mois qui ont suivi n’ont pas été de tout repos… Quelques jours après l’annonce qu’on provoquerait probablement l’arrivée de mon fils de façon précoce pour éviter un poids de naissance trop important, je me réveille soudainement un samedi matin, surprise par une fuite urinaire.

Presque amusée, je me précipite aux toilettes me félicitant d’avoir placé une alèse sous mon drap deux jours plus tôt en me disant qu’au dernier trimestre c’était des choses qui pouvaient arriver…

Si j’étais plus spirituelle, j’aurais hurlé à la prémonition… Je me rends vite compte qu’il ne s’agit pas d’une fuite urinaire, mais que le travail commence. Devant être placée sous antibiotiques dès la rupture des membranes, je prends une douche rapide, réveille Monsieur et hop on file à la maternité que je préviens par téléphone de notre arrivée.

Naissance et déclic d’un changement radical

Trente-trois heures plus tard, notre fils est né. Nous voilà comblés du plus grand bonheur et otages de la plus grande anxiété qu’il nous ait été possible de surmonter. En effet, né à 36 semaines, malgré une taille et un poids de naissance tout à fait honorables et des paramètres impeccables, la menace de nous le prendre et l’emmener en néonatologie était omniprésente. Celle-ci s’ajoutait au poids de maintenir en vie ce petit être qui était devenu notre univers. Nous avons alors découvert pendant huit jours de canicule extrême, les joies et les mésaventures hospitalières. S’étendre là-dessus ne serait pas constructif. J’ai quand même eu la chance d’être entourée d’un gynécologue exceptionnel, malgré la prise en charge tardive dans ma grossesse… Entendez par là: le jour de l’accouchement. Concernant les sages-femmes, je retiendrai deux personnes extrêmement bienveillantes… sur une soixantaine… Décrire en détail ce que nous avons vécu au cours de ces huit jours serait beaucoup trop long. Retenons juste que ce séjour n’a fait qu’enfoncer un dernier coup le clou dans la modification radicale de ma personne. C’était décidé, j’allais prendre un congé parental après le congé maternité pour réfléchir à la suite de ma carrière… au fond de moi, je pense que je savais je ne reprendrai pas mon activité de scientifique sans me l’avouer.

Je suis moi, j’ai toujours été moi et le resterai toujours. Franche, spontanée, d’un tempérament fort avec mes fragilités. Les débuts n’ont pas été faciles. De nature anxieuse, le séjour à l’hôpital et le deuil du dernier mois de grossesse ont été très compliqués… J’en garde toujours les stigmates psychologiques deux ans plus tard.

Malgré les lectures, les cours de préparation, j’ai découvert absolument tout sur le tas… En même temps, je la voulais cette maternité instinctive, intuitive, biologique… Naturelle. Je n’avais reçu aucune information vraiment utile à ce que j’étais en train de vivre. Ni en tant que femme, ni en tant que nouvelle maman. J’ai alors dû tout reprendre à zéro.

Grâce à ma formation scientifique, j’ai pu accéder à des sources d’informations qui ont littéralement sauvé ma maternité et le projet qui s’y dessinait. J’ai trouvé, enfin, les bonnes ressources. Pendant mes longues nuits blanches, j’ai lu, beaucoup… J’ai alors compris que mes recherches de littérature scientifique ne devaient pas rester inaccessibles et tomber dans l’oubli. C’est comme cela que sont nés deux projets professionnels:

  • Une maison d’édition et de vulgarisation scientifique, avec notamment l’édition d’un webzine gratuit autour de la parentalité sans tabou, le magazine qui libère la parole des parents. D’autres projets arrivent bientôt dans ce cadre, mais chuuuut je n’en dis pas plus…
  • Un groupe de parole qui propose des réunions aux jeunes parents qui peuvent venir accompagnés de leur enfant pour se rencontrer, confronter leurs expériences, et poser leurs questions.

En parallèle, je me suis rendu compte que toutes ces années de travail intellectuel avaient mis en sourdine mes capacités créatives et entrepreneuriales. En évoluant avec mon fils au fur et à mesure qu’il grandissait, je ne trouvais pas toujours dans le commerce ce que je souhaitais comme matériel. Je me suis alors lancée et j’ai fabriqué ce qui me manquait… de fil en aiguille, je propose des articles faits main pour les petits et les grands carabistouilleurs. J’y développe ma fibre artistique et y assouvis mon besoin de créer.

Aujourd’hui j’ai 34 ans, mon fils a 2 ans, je n’ai jamais eu aussi peu de revenus financiers, mais je n’ai jamais été aussi riche de mon travail. Chaque jour, je vois grandir notre enfant, je l’accompagne. Chaque nuit, je travaille au développement de mes multiples projets fous, que je gère seule tout en essayant de freiner ceux qui viennent se bousculer dans ma tête… Je n’ai jamais été aussi créative, heureuse et épanouie qu’aujourd’hui. J’offre une valeur dont je suis sûre, dont je peux mesurer la qualité et le bien qu’il génère à travers les témoignages, les réseaux sociaux, les rencontres et les échanges quotidiens. J’ai bon espoir de proposer un phare dans la nuit pour des parents en difficulté et si c’est bien le cas, ne serait-ce que pour une seule famille, cela vaudra tout l’or du monde pour moi.

Pour conclure, la maternité bouleverse toujours. Essayer de se retrouver tel.le qu’on était avant est illusoire. On ne l’est plus. Nous sommes une nouvelle personne, une nouvelle famille, un nouveau couple. Trouver un nouvel équilibre est nécessaire, s’y épanouir est essentiel. Afin d’optimiser les chances d’accéder à la parentalité qu’on souhaite, afin de se rassurer, de se rendre compte qu’on ne vit pas toutes ces difficultés seul. e. s., se faire accompagner est important. Mais se faire bien accompagner est primordial, afin de permettre de s’écouter, de comprendre ses besoins, ses désirs et ses instincts.

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