“Jeunesse (Le Printemps)” : Wang Bing filme un portrait touchant de la jeunesse ouvrière chinoise

Jeunesse (Le Printemps) de Wang Bing était présenté en sélection officielle au dernier Festival de Cannes, marquant au passage le retour du documentaire en compétition. Depuis deux décennies maintenant, le cinéaste chinois, 55 ans, filme son...

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Jeunesse (Le Printemps) de Wang Bing était présenté en sélection officielle au dernier Festival de Cannes, marquant au passage le retour du documentaire en compétition. Depuis deux décennies maintenant, le cinéaste chinois, 55 ans, filme son pays avec une obstination, un talent et un esprit de synthèse admirables. Il a filmé la dislocation de la Chine communiste industrielle dans À l’ouest des rails (2002), son chef-d’œuvre inaugural de plus de neuf heures, la misère des campagnes (Les Trois Sœurs du Yunnan, 2012), une vieille femme qui explique sa vie face caméra pendant trois heures (Fengming, chronique d’une femme chinoise, 2007), les asiles psychiatriques glauques et décrépits où l’on ne soigne personne (À la folie, 2014) ou encore l’exploitation des ouvriers et ouvrières du textile (Argent amer, 2016).

Avec Jeunesse (Le Printemps), que Bing présente comme la 1ère partie d’une trilogie, il demeure dans l’industrie textile. Mais cette fois, son sujet est la jeunesse. Elle aussi exploitée (coudre à la machine à cette vitesse et aussi longtemps – treize heures par jour, six jours sur sept – semble surhumain), mais toujours prête à chahuter, agitée, amoureuse. Le tout est tourné sur plusieurs années à Zhili, à 130 kilomètres de Shanghai, une autre cité textile gigantesque (on y compte plus de 18 000 ateliers) où les jeunes de la région du Yunnan, éloignée de plus de 2 500 kilomètres, filles et garçons, viennent gagner leur vie et où ils rejoignent parfois leurs parents qui y travaillent déjà.

Le quotidien saisissant d’une jeunesse

Bing les montre en train de coudre, de râler, de négocier leur salaire avec leurs patron·nes irascibles et intraitables, de menacer même parfois de faire grève. Il filme la promiscuité entre filles et garçons, qui partagent les mêmes ateliers, mais aussi les mêmes chambrées (juste au-dessus des ateliers), font la fête, boivent, se draguent, rient et crient, dansent, se tournent autour, se lient, comme toute jeunesse du monde, indifférent·es à la fatigue.

Tous et toutes sont venu·es gagner l’argent qui leur permettra de faire autre chose, de se construire une autre vie ou de devenir elles et eux-mêmes patron·nes d’ateliers pour exploiter d’autres petites mains… À la fin du film, l’un des employé·es nous fait visiter la bâtisse étrange qu’il s’est fait construire, une sorte de maison moderne en forme de temple néobouddhiste aux colonnes improbables.

Jouant sur le ressassement et la répétition, Jeunesse (Le Printemps) permet de saisir la routine dans laquelle vivent ces Chinoises et Chinois de moins de 20 ans parfois. Ici, même la drague et les fêtes semblent être une habitude presque intégrée au travail. Un film une fois de plus saisissant, obsédant, sur un pays aussi étrange qu’inquiétant, mais habité par des âmes qui dégagent une énergie étonnante. On attend avec impatience la suite de la trilogie.

Jeunesse (Le Printemps) de Wang Bing (Fr., Lux., P.-B., 2023, 3 h 35). En salle le 3 janvier.