Jim Jarmusch à l’honneur sur Arte : 5 films pour (re)découvrir un cinéaste inclassable
Du 1er août au 31 décembre 2023, la chaîne Arte diffusera une sélection de cinq films de Jim Jarmusch. Marqué par la scène underground new-yorkaise de la fin des années 1970, le cinéaste musicien né dans l’Ohio est un pilier de la scène cinématographique...
REJOINDRE L'ÉQUIPE DE RÉDACTION
Tu penses avoir un don pour la rédaction ?
Contacte-nous dès maintenant pour rejoindre notre équipe de bénévoles.
REJOINDRE L'ÉQUIPE DE RÉDACTION
Tu penses avoir un don pour la rédaction ?
Contacte-nous dès maintenant pour rejoindre notre équipe de bénévoles.
REJOINDRE L'ÉQUIPE DE RÉDACTION
Tu penses avoir un don pour la rédaction ?
Contacte-nous dès maintenant pour rejoindre notre équipe de bénévoles.
Du 1er août au 31 décembre 2023, la chaîne Arte diffusera une sélection de cinq films de Jim Jarmusch. Marqué par la scène underground new-yorkaise de la fin des années 1970, le cinéaste musicien né dans l’Ohio est un pilier de la scène cinématographique indépendante depuis les années 1980. Ses films portent un regard sur une autre face de la société avec des personnages en marge.
La rétrospective des 1ères œuvres du réalisateur laisse apparaître les fondations de son univers et de sa philosophie qu’il définit comme suit : “Difficile de se perdre quand on ne sait pas où on va.” Le style jarmuschien se retrouve dans des signes facilement identifiables devenus au cours de ses seize longs métrages des images d’une marque déposée : le goût pour le monochrome, les lents travellings latéraux, les fortes plongées, l’importance accordée à la musique, au vide et au silence, le minimalisme des intrigues ainsi que le laconisme de ses personnages souvent taiseux qui vaquent à leurs occupations, à leur rythme.
Permanent Vacation (1980)
Pour son 1er film réalisé dans le cadre de ses études à l’université de New York , Jim Jarmusch, tout juste âgé de 27 ans, relate une flânerie urbaine bercée par rythme rock n’roll de la musique de John Lurie. Permanent Vacation s’ouvre sur une foule qui erre au ralenti, comme une masse compacte qui tranquillement irait dans le mur, dévoilant l’obsession de la déambulation du cinéaste. La caméra se pose ensuite dans les rues délabrées de la ville pour révéler le vide existentiel du héros.
En mettant en scène la vie désœuvrée d’Allie, un adolescent qui traîne ses guêtres dans un New York filmé en 16 mm avant un départ hypothétique pour Paris, le cinéaste invente déjà son style minimaliste irrigué de poésie, de rock et de jazz. Mais quelque chose ne va pas dans la démarche de Chris, comme dans cette scène illuminée par la danse jusqu’à l’épuisement du personnage sur la musique Up There in Orbit du group Earl Bostic. Est-ce le personnage qui va trop vite ou le monde alentour qui se traîne ? Cette question constitue le centre névralgique des réflexions du cinéaste.
Down by Law (1986)
Jim Jarmusch n’a pas son pareil pour mettre en scène les parias d’une société américaine malade. Dans Down by Law, son dernier film en noir et blanc après Permanent Vacation et Stranger than Paradise, Jim Jarmusch revisite un topos des années 1930 : l’évasion de prison.
Loin des péripéties rocambolesques des Démons de la liberté et des codes du genre des films d’évasion, Down by Law s’applique à retracer la fuite folklorique de trois compères, Jack (John Lurie), un maquereau, Zack (Tom Waits), un disc-jockey, et Bob (Roberto Benigni), poursuivis par les autorités. Il s’intéresse aux interactions entre ces personnages et leur amitié naissante.
Down by Law s’ouvre magnifiquement par un long travelling en noir et blanc sur Rain Dogs de Tom Waits. Il marque la 1ère collaboration du réalisateur avec son chef opérateur Robby Müller, compagnon de route de Wim Wenders, qui sublime en noir et blanc les paysages hostiles de la Lousiane avec ses bayous impénétrables et ses faubourgs déserts magnifiant l’errance des protagonistes.
Mystery Train (1989)
Avant d’embarquer dans le wagon de Dead Man six ans plus tard, Jarmusch nous balade avec Mystery Train dans les locomotives d’une Amérique à la fois mythique et miteuse. Ce quatrième long métrage, qui s’inscrit dans le cycle du désenchantement après Stranger than Paradise (1984) et Down by Law (1986), suit un couple nippon dans un train pour Memphis, en terrain jarmuschien, celui de la désespérance et du décapage.
La structure du films se découpe en trois temps, Loin de Yokohama, Un fantôme et Perdus dans l’espace, et fonctionne peu ou prou comme trois wagons tirés par une même locomotive. Si les intrigues apparaissent composites, elles se lient entre elles par une unité de lieu et de temps : un jour à l’Arcade Hotel de Memphis, la ville d’Elvis Presley dont le titre du film, Mystery Train, fait référence à l’une des chansons phares. Dans ce triptyque, on suit les parcours d’un couple japonais, d’une veuve italienne à la recherche du cercueil de son mari et d’une bande de potes éméchés en virée après avoir tué un homme.
Night on Earth (1991)
Après la déambulation à pied (Permanent Vacation) puis en train (Mystery Train), le personnage poursuit son errance en taxi. Avec Night on Earth, Jarmusch dessine une cartographie du spleen à travers plusieurs villes autour du monde, Los Angeles, New York, Paris, Rome et Helsinki. Le taxi se dévoile moins comme moyen de transport pour convoyer des promeneur·euses esseulé·es que comme un lieu de socialisation rare dans lequel les individus tissent un rapport humain aussi éphémère soit-il.
Comme dans son film précédent, Night on Earth prend la forme du film à sketchs, le morcellement du récit faisant se succéder des galeries de portraits et des collections d’instants suspendus. Les balades nocturnes accompagnées du thème musical de Tom Waits, qui trouve quelques légères variations au gré de chaque histoire, lui permettent de rendre hommage au cinéma de la Nouvelle Vague comme à la comédie italienne, sans oublier une citation au cinéma d’Aki Kaurismäki.
Dead Man (1995)
Avec Dead Man, Jim Jarmusch revient au monochrome cireux et renouvelle les qualités de ses 1ers films en réfléchissant au genre constitutif de l’identité américaine, le western. Il narre le lent voyage vers la mort de William Blake (Johnny Depp), comptable de profession, dont on voit en lui la réincarnation du poète du même nom et qui dérive vers l’Ouest sauvage pour fuir la civilisation occidentale.
Bercé par les stases électriques de la guitare de Neil Young, William Blake, une fois arrivé dans la ville de Machine, va croiser la route d’Iggy Pop travesti en grand-mère, de Robert Mitchum et d’un Indien nommé Nobody. Il s’y trouve accusé à tort d’un double meurtre et prend une balle logée près du cœur. Une odyssée funèbre.