“K Bay”, l’odyssée funk-soul de Matthew E. White
Quand on se connecte à Zoom, un peu en avance sur l’horaire du rendez-vous, Matthew E. White est déjà là, frais et dispo, en direct de sa Virginie natale. Loin des lubies de rock stars ingérables, le trentenaire est un fiable entrepreneur,...
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Quand on se connecte à Zoom, un peu en avance sur l’horaire du rendez-vous, Matthew E. White est déjà là, frais et dispo, en direct de sa Virginie natale. Loin des lubies de rock stars ingérables, le trentenaire est un fiable entrepreneur, à la tête du label Spacebomb et du studio éponyme, grand bâtisseur tant dans sa vie professionnelle que privée.
Six ans après son deuxième album, Fresh Blood, qui donnait suite à l’époustouflant Big Inner de 2012, on le retrouve marié et père de famille. “Quand j’étais petit, je ne me séparais jamais de ma mini-stéréo portable pour écouter en boucle mes cassettes des Beach Boys et de Chuck Berry, se souvient ce passionné. Je n’ai pas appris à jouer d’un instrument tout de suite. Écouter de la musique suffisait à mon bonheur. Ma maman aime expliquer que lorsqu’on allait à l’église le dimanche, je me plaçais tout derrière et je faisais semblant de diriger le chœur !”
Un musicien qui joue collectif
Tous ses excès, toute sa démesure, c’est dans sa musique ou celle des autres qu’il les déploie. Car en plus d’exceller dans sa carrière de songwriter et de chanteur, ce géant à barbe hirsute se met souvent au service d’ami·es artistes en tant que producteur, arrangeur ou coéquipier de choc.
Il a ainsi sorti deux disques en duo (l’un de reprises avec Flo Morrissey en 2017 et l’autre avec Lonnie Holley en mars dernier) et enluminé des albums de Foxygen, Max Jury, Slow Club, Nadia Reid, Dan Croll ou, bien sûr, Natalie Prass, qui, comme lui, a passé la majeure partie de son enfance à Virginia Beach. Tous·tes deux ont d’ailleurs formé un groupe ensemble au collège, cimentant une amitié qui continue de porter ses fruits.
La preuve sur K Bay, le troisième album de Matthew E. White, qui comprend deux morceaux coécrits par la fabuleuse Natalie Prass – Take Your Time (And Find That Orange to Squeeze) et Let’s Ball. Difficile de situer dans le temps ce son maximaliste, qui emprunte aux héros et héroïnes du passé tout en échappant à l’exercice de style puisqu’il s’inscrit résolument dans des techniques du présent. Impossible de lui apposer une étiquette tant il fourmille de références, reflétant les différentes obsessions de son auteur à l’érudition encyclopédique.
Mieux vaut se laisser porter par ce flot ininterrompu d’idées aussi exubérantes que prodigieuses, nourries de soul, de funk, de country, de pop et de folk – citons, entre autres, Never Had It Better, Judy et la conclusion Hedged in Darkness. “Même si ça ne s’entend pas forcément sur ce que je fais, je suis convaincu que c’est dans le hip-hop et le r’n’b qu’on trouve l’avant-garde en matière de production musicale, affirme Matthew. J’admire par exemple Madlib et Knxwledge pour leur immense liberté et cette aisance à marier une vision futuriste et des clins d’œil au passé. C’est très inspirant.”
Enregistré entre octobre 2018 et avril 2019, K Bay a été façonné bien avant le début de la pandémie, et ça tombe bien : son épouse ayant accouché en février 2020 d’un petit garçon, Matthew a eu de quoi s’occuper l’an dernier. Le titre de ce troisième album renvoie à Kensington Bay, son nouveau home studio.
“Sur ce disque, je me suis autorisé un peu plus de place qu’avant, poursuit-il. J’adore les collaborations et j’ai eu tendance à un peu trop m’appuyer dessus par le passé, en particulier sur Fresh Blood. Cette fois, j’ai pris les rênes. J’ai aussi voulu passer plus de temps sur ma voix et me charger moi-même des chœurs.”
“J’aimerais bien que mon fils grandisse ailleurs qu’aux États-Unis”
On retrouve tout de même une liste impressionnante d’invité·es (dont le duo Slow Club, le chanteur Joseph ‘Jojo’ Clarke, des cordes, des cuivres…) pour l’aider à échafauder un tourbillon d’orchestrations fastueuses, soigneusement élaborées avec une vision de départ et la possibilité de changer en cours de route.
Paradoxalement, cet orfèvre considère K Bay comme son album le plus intimiste, ne serait-ce que pour les paroles où il évoque plusieurs fois l’amour de sa vie (Merry, déguisée ici sous le pseudo de Judy) et lâche un étonnant diptyque contre le racisme et l’injustice (Only in America/When the Curtains of the Night Are Peeled Back). “J’aimerais bien que mon fils grandisse ailleurs qu’aux États-Unis, révèle-t-il. Quand j’étais petit, j’ai vécu plusieurs années à l’étranger [aux Philippines et au Japon]. On envisage de s’installer bientôt au Pays basque français.” On l’y attend à bras ouverts.
K Bay (Domino/Sony Music). Sortie le 10 septembre